MONTRÉAL - Pour une troisième année consécutive, la grande finale de la coupe Stanley oppose un club qu’on n’attendait pas vraiment contre un prétendant logique aux grands honneurs.

 

Et pour la troisième année consécutive – les Blues de St.Louis sont partis du dernier rang du classement général pour se hisser jusqu’à la coupe Stanley l’an dernier et qui a oublié l’épopée des Golden Knights il y a deux ans lorsqu’ils sont entrés dans la LNH – c’est de l’Ouest que débarque Cendrillon chaussée de patins noirs et usés plutôt que de beaux et fins souliers de verre.

 

Les Stars ont terminé la saison écourtée par la Covid au troisième rang de la division Centrale, au quatrième de l’association Ouest. Et contrairement aux Golden Knights qui sont venus de nulle part, les Stars sont quand même un club à prendre au sérieux depuis quelques saisons. Ils partaient donc de moins loin que les Blues.

 

Je veux bien.

 

Mais avec un différentiel global de plus-3 et avec un club qui peinait à trouver un élan victorieux – les Stars avaient perdu leurs six derniers matchs du calendrier écourté (0-4-2) et n’affichaient trois victoires (3-5-3) à leurs 11 derniers matchs – ce club soulevait bien plus de questions qu’il attisait la confiance de ses partisans lors de son retour sur la patinoire.

Inversement, le Lightning représentait un choix logique pour représenter l’Est. Comme les Bruins et les Capitals sans oublier les Flyers qui étaient sur une lancée et les Penguins.

 

Après avoir patiné sur la bottine en début de saison et malgré une séquence ordinaire de trois victoires (3-6-1) dans les 10 matchs qui ont précédé l’interruption de la saison, les Bolts étaient toujours mes favoris pour soulever la coupe Stanley.

 

Ils le sont toujours.

 

Khudobin-Vasilevskiy : avantage Tampa

 

Vrai qu’ils croiseront des Stars plus reposés samedi soir dans le cadre du premier match de la grande finale.

 

Vrai qu’ils ont eu besoin de la prolongation pour sortir gagnants de leurs trois premières séries contre les Blue Jackets, les Bruins et les Islanders.

 

Vrai qu’ils ont déjà établi un record de la LNH pour le nombre de minutes disputées en prolongation en séries éliminatoires.

 

Vrai que Brayden Point, le pivot de leur attaque devant Nikita Kucherov selon moi, patine sur une jambe.

 

Vrai aussi que Steven Stamkos n’a pas encore donné un coup de patin dans un vrai match. Ce qui pourrait arriver en grande finale cela dit.

 

Mais avec Andrei Vasilevskiy devant le filet, le Lightning compte sur le meilleur gardien de la Ligue nationale au grand complet.

 

Son vis-à-vis Anton Khudobin connaît des séries sensationnelles. À certains égards, il a même été plus spectaculaire que son rival. J’en conviens. De fait, les Stars doivent aux arrêts sensationnels de leur gardien auxiliaire le fait d’avoir surpris l’Avalanche en deuxième ronde alors que le Colorado n’a pu compter sur les arrêts de son gardien et d’avoir surpris davantage Las Vegas en finale de l’Ouest.

 

Mais en dépit tout ce que Khudobin a fait de bien, de bon et de miraculeux – il demeure mon candidat numéro un chez les Stars pour mettre la main sur le Conn Smythe – l’avantage devant le filet doit aller du côté de Tampa.

 

Une muraille devant Vasilevskiy

 

Il en va de même à la ligne bleue.

 

Miro Heiskanen confirme sa place au sein du top-5 des défenseurs de la LNH – un groupe complété par Victor Hedman, Roman Josi, Seth Jones et Dougie Hamilton dans mon calepin personnel – et cette remarque dépasse le fait qu’il domine tous les défenseurs de la Ligue avec 22 points (5 buts) récoltés en 21 matchs – depuis le début des séries.

 

John Klingberg offre lui aussi des performances intéressantes.

 

Mais Victor Hedman est non seulement le meilleur défenseur de la LNH selon moi, il est aussi le meilleur joueur du Lightning et le meilleur tout court depuis le début des séries. Il est le point d’ancrage du Lightning. Le phare. Il est dans une classe à part. Et comme si ce n’était pas déjà assez, il semble rien de moins qu’en mission alors que les 26 minutes 39 secondes qu’il passe en moyenne sur la glace à chaque match, ne semble pas le ralentir le moindrement.

 

Au contraire!

 

Derrière Hedman qui est aussi dominant en zone offensive qu’il ne l’est en zone défensive, le Lightning est beaucoup mieux nanti avec Ryan McDonagh –même s’il affiche un différentiel de moins-3 – Kevin Shattenkirk sans oublier Mikhail Sergachev qui est déjà très bon et qui deviendra sans l’ombre d’un doute un exceptionnel. Erik Cernak, Zach Bogosian et même Luke Schenn complètent un groupe de sept défenseurs qui impressionnent par leur efficacité depuis le début des séries.

 

Cernak est un défenseur très efficace. Il est solide. Il est difficile à contourner. Un vrai bon défenseur de soutien. Je me demandais ce que Bogosian donnerait aux Bolts. En fait, je me demandais si Bogosian avait vraiment encore du bon hockey à donner. Schenn me semblait bien suspect. Mais l’utilisation intelligente de tous les membres de cette brigade – c’est rare qu’une rotation de sept arrières soit vraiment un plus au sein d’une formation – mousse les performances des défenseurs en minimisant sans doute les risques associés à une surutilisation de vétérans qui ne peuvent plus l’être sans ralentir l’attaque.

 

Plus de minutions à Tampa

 

Parlant d’attaque, je ne vois pas comment celle des Stars pourra rivaliser avec celle du Lightning.

 

Le premier trio des Stars est très explosif. Du moins, il est capable de l’être. Surtout que Jamie Benn semble avoir décidé de jouer du gros hockey. Joe Pavelski donne un leadership d’une valeur exceptionnelle à sa nouvelle équipe. Un leadership qui a cruellement fait défaut à San Jose en passant.

 

Mais Jon Cooper a plus de munitions à sa disposition que Rick Bowness.

 

Mettons de côté Kucherov et Point un instant. Deux joueurs qui sont dans une classe à part. Qui sont meilleurs et plus constants que les meilleurs des Stars on en conviendra tous. Du moins je l’espère.

 

Écartons même Stamkos pour la durée de la finale s’il le faut.

 

Anthony Cirelli est un jeune vraiment exceptionnel. Autant en attaque qu’en défensive. C’est lui qui m’a «forcé» à écarter Phillip Danault de ma liste de cinq candidats au trophée Selke cette année. Un trophée que Cirelli soulèvera dans un avenir rapproché j’en suis convaincu.

 

Alex Killorn est un monstre d’efficacité sur la patinoire. Et que dire de Yanni Gourde? Ce gars-là patine comme si sa survie en dépendait. Il n’arrête jamais. Il se défonce chaque fois qu’il pose les patins sur la glace. Il frappe n’importe qui. Il se relève après avoir été frappé par tous ses adversaires qui semblent vouloir le neutraliser sans jamais y arriver. Il est surtout efficace avec tout autant que sans la rondelle. Un as dans sa catégorie de joueurs de soutien. Comme Killorn. En fait, les Québécois sont bien plus que des joueurs de soutien.

 

Ce que les Barclay Goodrow, Blake Coleman, Pat Maroon et Cédric Paquette sont avec tout le mérite qui leur revient.

 

Et je n’ai pas encore écrit les noms des Palat et Johnson…

 

Le Lightning en six

 

Avec le meilleur des deux gardiens devant son filet. Et pas juste le meilleur au niveau de la réputation, mais également au chapitre des performances depuis le début des séries…

 

Avec le meilleur défenseur des deux équipes et le meilleur groupe de défenseurs…

 

Avec une attaque plus diversifiée et plus incisive...

 

Je crois vraiment que le Lightning a ce qu’il faut pour mettre un terme à la belle histoire des Stars.

 

Cette belle histoire représente à mes yeux le seul avantage des Stars aux dépens du Lightning. Les Stars vivent un conte de fées. Les Stars n’ont pas de pression. Ils n’ont qu’à se laisser porter par la vague sur laquelle ils surfent depuis deux mois.

 

Toute la pression est sur le Lightning. Sur le Lightning qui doit gagner… parce qu’il devrait gagner.

 

Si le Lightning étouffe sous la pression. Si les blessures se multiplient au point de vraiment miner les chances de Tampa. Si John Cooper n’est pas en mesure de rivaliser avec Rick Bowness, son ancien adjoint qui est vraiment un coach capable de soutirer le meilleur de ses joueurs, les Stars me feront mentir.

 

Je n’irais pas jusqu’à écrire que Tampa transformera en citrouille le beau carrosse piloté par Rick Bowness depuis le début des séries. Car avec tout ce que les Stars ont accompli jusqu’ici, ils méritent déjà les éloges. À commencer par ce coach qui, comme Craig Berube avec les Blues l’an dernier, est venu en relève pour non seulement sauver la saison de son club, mais le guider jusqu’à la finale de la coupe Stanley.

 

Une finale que les Stars arriveront, je crois, à prolonger jusqu’à un sixième match.

 

Mais une fois ce sixième match terminé, Cendrillon rentrera pieds nus à Dallas...