La semaine dernière, je jasais au téléphone avec Christian Tétrault de NRJ, un collègue que j’estime énormément. C’est toujours agréable de discuter avec lui. Contrairement à bien d’autres, il se fout pas mal des statistiques. Qu’un athlète ait deux buts et une passe, un touché ou quatre doubles, ça ne l’intéresse pas vraiment. Ce qui l’intrigue c’est tout ce qui passe en arrière de la performance. Comment cet athlète s’est-il préparé? C’était quoi son état d’esprit? Qu’est-ce qui le motive? Qu’est-ce que ça va changer maintenant?

Donc la semaine passée, Christian et moi on parle ensemble et la conversation s’est orientée vers l’incident Chara-Pacioretty. Lui, il s’en moque un peu de savoir ce que la ligue va faire. Évidemment, il trouve ça salaud et dégueulasse et il souhaite un encadrement plus strict et des règles claires. Mais ce qu’il veut vraiment savoir de Luc Gélinas ne concerne pas Gary Bettman, Geoff Molson ou Colin Campbell. «Toi Luc, t’as des kids qui jouent au hockey. T’as pas la chienne qu’il leur arrive quelque chose? Tout ce qui se pass dernièrement dans la ligue nationale, ça t’influence pas comme parent?»

Bon point Christian! Plutôt baveux et arrogant, le fiston qui vient d’avoir dix-sept ans se fait aller le mâche-patates ce qui lui attire son lot de coups. Si je jouais contre lui, c’est certain que je le fesserais moi aussi! Des slashings dans les chevilles, des coups dans les cotes, des claques au visage…c’est de la routine! Il est incapable de se la fermer et il court après les ennuis! Ça m’en revenu en raccrochant le téléphone. Quand ti-cul est parti pour son premier match après l’incident, mon câlin a été plus gros qu’à l’habitude et je me souviens de l’avoir regardé droit dans les yeux en lui demandant très sérieusement d’être prudent sur la glace. Je venais juste de voir un gars couché inconscient sur la patinoire et aucun parent ne voudrait vivre ça avec un de ses enfants.

Les meilleurs exemples sont dans l'entourage

Et tout ça m’a fait penser à ce qui peut amener un athlète à poser des gestes aussi dangereux. Parce qu’il n’y a pas que Zdeno Chara et Matt Cooke qui ont fait les manchettes cet hiver. Des coups sournois, ont en a vu à profusion. On peut blâmer la LNH autant que l’on veut, le respect doit d’abord et avant tout venir des joueurs eux-mêmes. Et le respect, ça s’inculque à partir des premiers pas au hockey mineur. Que mon fils écœure et mange des baffes en retour, ça ne me dérange pas. Qu’il jette les gants, c’est aussi correct…et vous n’êtes pas obligé d’être d’accord avec moi. Toutefois s’il pose un geste pour blesser, là ça ne marche pas et c’est certain qu’on va avoir une discussion très animée à la maison.

J’aborde ce sujet car depuis la blessure de Max Pacioretty, beaucoup de gens ont soulevé le rôle de modèle que les vedettes de la LNH jouent auprès des enfants. Pas d’accord. Pas une seule seconde. La vraie influence elle vient de la maison et des entraîneurs que les enfants croisent dans leur cheminement au hockey. Parce qu’être coach, c’est pas mal plus que faire des changements de trios et apprendre aux jeunes à être bons sans la rondelle. Un entraîneur qui prend son rôle à cœur pose des gestes comme celui que j’ai vu moi-même l’an passé alors que mon garçon jouait midget-espoir pour les Pionniers de Lanaudière. C’est arrivé pendant un match où l’on se faisait varloper. Comme la moitié des joueurs de son équipe, mon ado était visiblement très frustré. Quand ça a commencé à dégénérer, le coach Gilles Sureau a envoyé trois de ses joueurs au vestiaire car il sentait qu’ils étaient potentiellement en perte de contrôle. La tension était palpable et il a ainsi prévenu que la situation se dégrade. Puis après la partie, il a rencontré ses trois joueurs et il les a lui-même suspendu pour la joute suivante car il n’avait pas aimé leur comportement agressif sur la patinoire.

Ça c’est prendre son rôle d’éducateur au sérieux. Ce jour-là, en agissant de la sorte, monsieur Sureau a rendu service à trois petits gars. En tout cas, le mien a bien compris et le message a passé. Il ne gagnera jamais le Lady Bing du hockey mineur mais cette tranche de vie l’a aidé à mieux progresser comme individu et aussi comme hockeyeur. On en a reparlé ensemble il y a quelques jours et même si ça fait un an que c’est arrivé, il reconnaît que son ancien coach l’a forcé à réfléchir.

À moins d’avoir un contact direct avec lui, il n’y a pas un joueur de la LNH qui peut avoir un impact du genre sur un enfant ou un adolescent. Oui, la LNH doit donner l’exemple mais parents et entraîneurs doivent faire leur job aussi car les bons et les mauvais exemples se retrouvent en premier lieu dans l’entourage immédiat…Et vouloir tout pelleter dans la cour de la LNH serait une tentative de se soustraire à son propre rôle.