McPhee-McCrimmon : un « monstre à deux têtes » efficace
LNH samedi, 22 janv. 2022. 07:00 vendredi, 15 nov. 2024. 15:06MONTRÉAL – Depuis leur entrée haute en couleur à l’automne 2017, les Golden Knights de Las Vegas sont devenus une référence dans la LNH.
Le succès phénoménal du repêchage d’expansion qu’ils ont mené a mis en évidence la grande qualité de leurs recruteurs qui ont mis en place l’équipe que Gerard Gallant derrière le banc et Marc-André Fleury devant le filet ont mené à la grande finale de la coupe Stanley.
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En plus d’être une référence sur la patinoire, les Knights le sont aussi devenus en matière d’animation lors des parties, des entractes et aussi dans la gestion des médias sociaux.
Les Golden Knights démontrent aujourd’hui qu’un président impliqué au quotidien dans les opérations hockey et un directeur général peuvent mettre en commun connaissances, expériences et stratégies pour le bien de l’équipe. Qu’un « monstre à deux têtes » responsable de la gestion d’un club de la LNH peut être efficace.
Joint par RDS à Las Vegas jeudi, le président des Golden Knights a échappé un long soupir lorsque je lui ai soumis que lui et son DG Kelly McCrimmon pourraient d’ailleurs servir d’exemple, voire conseiller, Jeff Gorton et Kent Hughes dans l’art de diriger un club de hockey. Surtout que le nouveau vice-président des opérations hockey du Canadien et le plus nouveau encore directeur général du Tricolore étaient attendus au T-Mobile Arena pour assister à leur première rencontre à titre de « monstre à deux têtes » responsable de la gestion d’un club à rebâtir.
« Je vais attendre après le match pour donner des conseils si ça ne te dérange pas trop », que McPhee a répondu au terme de son long soupir.
Directeur général dans l’âme
À l’image de Jeff Gorton qui a été embauché à titre de V.-P. des opérations hockey après le congédiement de Marc Bergevin, George McPhee est un directeur général dans l’âme et dans le cœur.
Au terme d’une carrière de sept saisons dans les rangs professionnels – il a disputé 106 matchs avec les Rangers et neuf les Devils – et d’études en droit effectuées après sa retraite, McPhee a fait ses premiers pas en gestion sous les ordres de Pat Quinn avec les Canucks à Vancouver.
En 1997, il a amorcé la reconstruction des Capitals de Washington. Sous la direction de McPhee, les « Caps » ont atteint leur première finale de la coupe Stanley. Une finale (1998) qu’ils ont perdue aux mains des Red Wings de Detroit. Après une décennie de succès, McPhee a profité d’une baisse de régime de son équipe pour liquider de gros noms en fin de carrière afin de préparer le repêchage qui a permis de relancer l’organisation avec la sélection d’Alexander Ovechkin. Une relance qu’il a supervisée jusqu’au 2014.
Deux ans plus tard, après une escale d’une saison au sein de l’état-major des Islanders de New York, McPhee a mis le cap sur Las Vegas où il a orchestré la naissance des Golden Knights qui, ironiquement, ont perdu en grande finale dès leur première saison contre les Capitals qu’il avait rebâtis.
De son propre aveu, McPhee serait sans doute toujours le DG de son équipe, n’eût été l’obligation d’offrir une promotion à son ancien adjoint Kelly McCrimmon.
« Je n’avais pas le choix. Deux équipes courtisaient Kelly (McCrimmon) en lui offrant un poste de DG. On a bâti une belle équipe sur la glace, mais une plus belle encore au niveau des opérations hockey et je tenais à garder Kelly qui était mon adjoint depuis le début. »
Un seul patron et c’est Kelly!
De l’extérieur, on pourrait croire que McCrimmon est toujours l’adjoint de McPhee alors que seuls les titres associés aux noms des deux hommes de hockey ont changé.
« C’est loufoque », réplique McPhee sans hésiter.
« Nous formons une équipe. Nous travaillons en étroite collaboration, mais quand vient le temps de prendre la décision finale, c’est Kelly qui la prend. C’est lui le boss. C’est la seule façon de faire pour que ça marche », assure le président des Knights.
Ceux et celles qui connaissent McPhee, sa passion pour le hockey, pour son travail, pour son équipe, pour ses joueurs savent que le président ne passe pas ses journées à se tourner les pouces en regardant le classement ou en consultant les statistiques. Bien au contraire. Ils savent qu’il est au centre des décisions.
Comment alors George McPhee fait-il pour se retirer lorsqu’il sent qu’il est temps de le faire alors qu’il a toujours été celui qui mettait la touche finale aux transactions, aux embauches, aux mises sous contrat?
« Tout est une question de complicité, de confiance et de respect mutuel. Quand j’étais directeur général et que Kelly était mon adjoint, nos deux bureaux étaient voisins. Quand il n’était pas dans le sien, il était dans le mien. C’est encore vrai aujourd’hui, sauf que nous avons changé de bureau.
« On déjeune ensemble en parlant de notre équipe et de la Ligue. On lunche ensemble en parlant de notre équipe et de la Ligue. On soupe souvent ensemble et passons des heures interminables sur la route à parler de notre équipe et de la Ligue. Nous cherchons ensemble des moyens pour nous améliorer. Nous échangeons sur les contrats, sur les négociations à mener avec d’autres équipes pour effectuer des transactions, sur les joueurs que nous ciblons autant au repêchage que sur le marché des joueurs autonomes. Mais quand vient le temps de faire les appels, de conclure les transactions, de signer les contrats, c’est maintenant moi qui retourne dans mon bureau pour lui laisser toute la place. Est-ce difficile? Pas vraiment! Parce que je sais exactement où nous allons en raison de la complicité qui nous unit. Et tu sais quoi? C’est maintenant lui qui compose avec les médias au quotidien. Ça me laisse plus de temps pour retourner mes autres appels. Après deux ans dans ce nouveau rôle, je peux t’assurer que je m’y sens bien », ajoute McPhee qui se permet même d’apprendre quelques mots de français et de les échanger avec les Jonathan Marchessault, Nicolas Roy et William Carrier de temps en temps.
George McPhee n’a pas de grands secrets à souffler aux oreilles de Jeff Gorton et Kent Hughes pour qu’ils mènent à bien le travail qu’ils amorcent à la tête du Canadien. Surtout que c’est le Tricolore qui, l’été dernier, a privé McPhee est ses Golden Knights d’une deuxième présence en grande finale de la coupe Stanley.
L’ancien directeur général devenu président souhaite tout simplement à ses adversaires du Tricolore de bâtir la même complicité et de tisser les mêmes liens de confiance et de respect qui l’unissent à Kelly McCrimmon.
« Regarde autour de la Ligue. Ce nouveau modèle de gestion est de plus en plus populaire – on le retrouve entre autres à Columbus, New York, Toronto, Philadelphie et bientôt Vancouver – et c’est normal. Le travail est rendu tellement difficile. Les défis sont énormes. Le parcours pour arriver au but ultime est long et miné d’embûches qui te sautent au visage sans avertissement. Il y a tellement à faire que c’est une bonne chose d’être deux. En fait, nous sommes bien plus que deux quand tu regardes tout le travail abattu pour les autres membres de l’état-major qui nous aident à nous y retrouver dans tout ça. Complices, associés, partenaires : choisis le terme que tu veux. Mais pour réussir, il faut d’abord travailler en équipe pour établir le plan. Quand vient ensuite le temps de prendre la décision finale, il n’y a qu’un boss. Je ne sais pas comment ça fonctionne ailleurs et comment ça fonctionnera à Montréal, mais ici, le boss : c’est Kelly! »