MONTRÉAL – Le temps commence à manquer pour les Sharks de San Jose, qui flirtent dangereusement avec le type d’échec que l’organisation n’a pas connu depuis plus d’une décennie.

Les Sharks, qui seront les visiteurs au Centre Bell samedi, sont menacés d’être évincés des séries éliminatoires pour la première fois depuis la saison 2002-03.  Avec onze matchs à disputer au calendrier de la saison régulière, ils auraient présentement besoin de cinq points de plus pour occuper le dernier rang permettant de se qualifier dans la division Pacifique et de six points pour remonter parmi les deux équipes repêchées dans l’Association Ouest.

Dans les deux cas, il s’agit d’un recul comparativement à la position qu’ils occupaient au début du mois. Depuis leur victoire de 4-0 sur le Canadien le 3 mars, les Sharks ont dû se contenter d’un dossier mitigé de quatre victoires et trois revers.

« On a encore beaucoup de temps devant nous et on s’approche de notre but, estime pourtant Logan Couture, qui faisait partie d’une poignée de joueurs à avoir revêtu l’uniforme pour l’entraînement optionnel de son équipe vendredi midi. Mais c’est vrai que chaque partie est comme un match numéro 7 pour nous présentement. Il faudra vraiment donner tout ce qu’on a, mais notre niveau d’effort est bon présentement. »

La situation n’est pas familière pour les vétérans de la formation californienne, habitués de pouvoir se laisser glisser jusqu’en séries pendant que le reste de la Ligue s’entre-tue pour les dernières places disponibles. Patrick Marleau, par exemple, n’a pas l’habitude d’être sur le gros nerf au mois de mars. Non seulement n’a-t-il raté les séries qu’une seule fois en 17 ans de carrière, mais son équipe a développé la bonne habitude d’entrer dans la danse par la grande porte. Chez les Sharks, le hockey printanier ne se prévoit généralement pas à la dernière minute.

« Pendant une brève période, je me suis surpris à surveiller ce que faisaient les autres équipes autour de nous, admet l’attaquant de 35 ans en souriant. Mais j’ai recommencé à me soucier de nos résultats et de rien d’autre. »

Marleau, qui a inscrit 103 points en 147 matchs de séries, croit que si la destination souhaitée est atteinte, ce petit voyage à l’extérieur de leur zone de confort pourrait être bénéfique pour les Sharks.

« Nos séries sont déjà commencées. Chacun de nos matchs est sans lendemain. Ce genre de situation peut parfois permettre à une équipe d’entrer dans une zone, dans une bonne séquence, et de faire des dommages en séries », transpose-t-il.

« Est-ce que l’on garde un œil sur les résultats des autres équipes à chaque soir? Oui, bien sûr, mais pas au point de surveiller le tableau indicateur pendant nos matchs. Les deux points qu’on peut aller chercher à la fin de la soirée, c’est notre seule préoccupation. Si on s’occupe de nos affaires, c’est à souhaiter que ça suffira pour nous pousser assez haut », ajoute le jeune joueur de centre Tommy Wingels, qui a deux buts à ses quatre derniers matchs.

Le sprint final des Sharks sera toutefois parsemé de nombreuses haies. Le passage de l’équipe à Montréal représente le troisième arrêt d’un voyage de sept matchs disputés en treize jours.

« Dès que l’horaire est sorti, on a remarqué cette séquence qui s’annonçait déjà difficile. Mais on s’est nous-même placés dans une position où on doit se battre pour notre survie. C’est à nous de nous en sortir », dit Couture, auteur d’un but et d’une passe la veille dans une victoire de 4-1 contre les Maple Leafs.

« On sait ce qui nous attend, on est conscients des équipes qu’on devra affronter, observe calmement l’entraîneur Todd McLellan. Le Canadien est premier ou deuxième dans toute la Ligue, est excellent à domicile et garde probablement de mauvais souvenirs de ce qui s’est passé lors de sa visite à San Jose. Ce sera un autre gros défi pour nous. »

Une tempête bien gérée

Comme si la situation n’était pas assez critique, les joueurs des Sharks ont récemment dû lever les boucliers pour se protéger d’une situation hors glace potentiellement dommageable. Une déclaration du directeur général Doug Wilson au sujet du vétéran Joe Thornton, qui s’est fait retirer le titre de capitaine l’été dernier, a fait remonter à la surface de vieilles amertumes en début de semaine. Des gros mots ont été lancés, des pots cassés ont dû être réparés et l’équipe a dû traverser à travers une brève intempérie, n’a pas tenté de cacher le chef du navire.

« On m’a posé la même question hier à Toronto... », a répondu McLellan lorsque le sujet lui a été présenté dans les coulisses du Centre Bell.

« Peu importe l’équipe que vous dirigez, qui vous êtes ou depuis combien de temps vous êtes dans la Ligue, les circonstances sont appelées à varier à chaque année, a poursuivi l’entraîneur. Toutes les saisons débutent différemment et évoluent différemment. Mais si vous gardez les lignes de communication ouvertes avec vos joueurs, vous pouvez vous en sortir ensemble. Ça ne veut pas dire que vous allez tout gagner, ou même que vous allez bien jouer, mais vous serez capable de faire face à l’adversité. »

Les Sharks sont une équipe en transition. Cinq joueurs qui étaient en uniforme contre les Leafs – Mirco Mueller, Chris Tierney, Tomas Hertl, Matthew Nieto et Barclay Goodrow – sont âgés de 22 ans ou moins. Un autre, le Suédois Melker Karlsson, est une recrue de 24 ans. En décidant de passer une saison sans capitaine, la direction souhaitait forcer ces espoirs à prendre leur place plus rapidement, expose McLellan, qui dit avoir été agréablement surpris par le résultat.

« Je ne sais pas ce que Michel (Therrien) ou Bergy (Marc Bergevin) vous diraient à propos de leur groupe, mais cette année à Montréal, il y a probablement des joueurs qui ont saisi la corde un peu plus serré que les autres. Chez nous, des leaders dominants ont pris l’avant-scène. Certains de nos jeunes ont ressenti le besoin de s’imposer et de contribuer à différents niveaux. »

« Il y a amplement de leaders au sein de cette équipe, approuve Couture. Ce n’est pas nécessaire d’avoir une lettre brodée sur son chandail pour savoir qu’on en est un. Je sais en tout cas qu’il y a des gars qui n’en ont pas et qui ont embrassé ce rôle cette année. »

« Ça n’a tout simplement jamais été une histoire dans notre vestiaire. Ça ne nous a pas affectés du tout », affirme Wingels.

« On sera toujours jugés selon nos résultats, mais notre groupe est très uni, assure McLellan. On l’a vu avec ce qui est arrivé à « Jumbo » cette semaine. On a traversé une petite tempête, mais vous auriez dû voir le nombre de joueurs qui se sont rassemblés autour de lui pour lui offrir leur support. Ils ne vous le diront peut-être pas tous, mais c’était palpable à l’intérieur du vestiaire. »