LAVAL – En s’élevant comme la vedette incontestée du sublime parcours éliminatoire du Rocket de Laval, Cayden Primeau a finalement mis un beau ruban doré sur une saison qui n’a pas toujours été un cadeau.

Le premier séjour prolongé dans la Ligue nationale est un moment charnière dans la carrière d’un joueur. Primeau gardera un souvenir doux-amer du sien. Convoqué pour une douzaine de matchs par le Canadien, il a peiné à en compléter la moitié. Il n’est ressorti de cette éprouvante pige qu’avec une seule victoire et une moyenne de buts alloués de 4,62.

Des mois plus tard, bien à l’abri de la tempête, le jeune homme de 22 ans est capable d’y repenser avec sérénité. Il parle d’attentes, les siennes surtout, qui n’ont pas été comblées. Des sables mouvants dans lesquels il a commencé à s’enliser et de sa façon plus ou moins adéquate des gérer la glissade.

C’est facile de l’oublier maintenant qu’il vient de présenter des statistiques qui rappellent celles de Carey Price lors de sa seule participation aux séries de la Ligue américaine, mais fut un temps où a cru qu’il ne s’en sortirait pas indemne. Que le Canadien, parmi les nombreuses hérésies de son horrible saison, venait de trouver le moyen de gaspiller son gardien d’avenir.

S’il admet avoir passé un mauvais quart d’heure, Primeau assure qu’il n’a jamais craint que les dommages à sa confiance soient irréversibles.

« J’en ai parlé au psychologue sportif de l’équipe, en fait. On discutait du fait que même si on ne savait pas exactement, à l’époque, ce qui allait ressortir de tout ça, on savait qu’il y aurait du positif à en tirer. Je souhaite ne plus jamais avoir à traverser des moments semblables, mais je sais que ça m’a rendu plus fort et aujourd’hui j’en suis reconnaissant. »

« Je suis un bien meilleur gardien, insiste-t-il, que je l’étais en début d’année. »

Les bénéfices, bien évidemment, n’ont pas été instantanés. En 17 matchs dans la Ligue américaine après sa rétrogradation en février, il a montré une moyenne de buts alloués de 3,11 et un taux d’efficacité de ,907. Les soirées plus difficiles ont continué de faire partie de son quotidien, mais le fait d’avoir un rôle mieux défini à l’ombre de la cohue montréalaise l’a aidé à se rebâtir.

« Être capable de trouver mon rythme en étant au même endroit et pouvoir me concentrer sur un retour à la base, ça a été gros pour moi. Je crois que c’est ce cette stabilité qui m’a le plus aidé à retrouver ma confiance. »

Primeau n’a pas été titularisé pour le début de la série contre le Crunch de Syracuse, mais il fait 37 arrêts dans le deuxième match et n’a plus jamais eu à céder sa place. Il a mené le Rocket à une victoire d’une participation à la finale. Ses chiffres : une moyenne de buts alloués de 2,17 et un taux d’efficacité de ,936.

« Oui, il m’a surpris, admet l’entraîneur-chef Jean-François Houle. Et comme je lui ai dit ce matin, ce que j’ai aimé de lui, c’est que j’ai trouvé qu’il avait beaucoup plus de confiance. Il était plus solide devant son filet quand les équipes adverses allaient vers lui pour essayer de le pousser. Il tenait son bout beaucoup plus qu’il le faisait en début d’année. J’ai trouvé qu’il contrôlait le match un peu mieux avec les temps d’arrêts. Quand on avait besoin d’un sifflet, il gardait la rondelle ou la faisait dévier en haut. Sa gestion du match était bien meilleure. »

« Tout le monde a vu, durant les séries, à quel point il était bon, reconnaît même Kevin Poulin, qui a été contraint de lui laisser le filet en fin de saison. Il était bien préparé, bien concentré. Il nous a donné une chance de gagner même les soirs où on n’était pas dans le coup. »

Une autre année à Laval?

Les récents exploits de Primeau pourraient facilement se révéler être une arme à deux tranchants. Immanquablement, on recommencera bientôt à débattre de sa place dans l’organisation et du rôle qui devrait lui être confié la saison prochaine.

Pour l’instant, le principal intéressé joue de prudence. Si une place permanente dans la LNH s’inscrit dans ses objectifs à court terme, il n’en dit mot. « Ça sera assurément le plus gros été de ma carrière, je ne m’en cache pas. Mais je ne veux pas me faire d’attentes quant à l’endroit où j’amorcerai la prochaine saison. Je vais tout donner cet été, je vais me pointer au camp et espérer le mieux. »

Le mieux? Pour Poulin, qui a atteint la Ligue nationale à 20 ans mais qui n’a jamais pu s’y accrocher, il n’y a aucun doute que ça signifie un retour dans les mineures.

« Je pense qu’il a besoin d’avoir une année sérieuse seulement dans la Ligue américaine. Qu’il joue tous les matchs, que sa concentration soit juste sur le Rocket, qu’il ne fasse pas trop la navette. Qu’il joue ses matchs, qu’il se développe. »

« En tant que gardien de but, c’est beaucoup plus mental que physique à un certain point, enchaîne le vétéran de 32 ans. Il a gagné en confiance je pense durant les séries. S’il peut ramener ça l’année prochaine, être plus confiant... Après ça tu lui donnes une chance, mais pas juste parce qu’il y a un blessé ou quelque chose. Une vraie chance. »

Houle n’hésite pas à se ranger derrière le gardien d’expérience.

« C’est vrai pas juste pour lui, mais pour plusieurs joueurs. Il faut être patient, il faut prendre le temps. Il faut être sûr de bien développer les joueurs et ça, ça prend du temps des fois. Ça prend parfois plusieurs années dans la Ligue américaine. Sauter des étapes, des fois, ce n’est pas trop bon. Je pense qu’il faut être patient comme organisation et je pense que c’est comme ça qu’on va pouvoir développer plus de joueurs. »