Je dois vous avouer d'entrée de jeu, mes amis, que le congédiement de Guy Carbonneau a eu l'effet d'une douche froide lorsque j'ai appris la nouvelle, en après-midi.

En fait, je venais à peine de déposer mes valises à la maison lorsque Benoît m'a téléphoné pour me refiler l'information. Nous venions de quitter l'avion nolisé de l'équipe quelques minutes auparavant et ma foi, il s'agissait probablement de l'un des vols les plus sereins des deux derniers mois. C'était vraiment relax à bord, relax dans le bon sens du terme cette fois.

Avec le recul et après avoir entendu les propos de Bob Gainey, on peut peut-être digérer un peu mieux la décision drastique qui a été prise par le DG du Canadien. On peut certainement saisir, en tout cas, l'ampleur du doute que ressentait le grand patron de l'équipe avant que celle-ci n'entame le dernier droit de cette course folle aux séries.

Mais personnellement, je croyais encore (peut-être de façon utopique) que les choses allaient se replacer pour l'équipe et son entraîneur-chef. Sans tomber dans le positivisme à outrance, je voyais des signes intéressants au cours des derniers matchs. Le rendement de Carey Price à Atlanta et Dallas en est un; le beau retour de Tomas Plekanec depuis sa suspension en est un autre. Il y a Alex Kovalev qui semblait retrouver une partie de sa touche depuis son petit congé. Les unités spéciales qui retrouvaient du lustre. Puis, il y eut ce souper d'équipe, samedi, au cours duquel l'unité entre les joueurs semblait vraiment rejaillir. Bref…

Bref, il faut croire que ces signes n'étaient pas convaincants, pas assez du moins, pour la haute direction.

Où et qui étaient ses alliés?

Ce que Bob Gainey a probablement constaté, c'est que son entraîneur et ses adjoints ont été complètement laissés à eux-mêmes par les joueurs de l'équipe, particulièrement les vétérans, tout au cours de la saison. On ne parle pas nécessairement ici de « mutinerie » ou de « haute trahison », mais plutôt d'une forme d'indifférence beaucoup plus subtile qui vient à s'installer au cœur de l'équipe et qui finit par se répandre comme un cancer.

Or, dans la réalité moderne de tout sport d'équipe, il faut que les entraîneurs puissent compter sur certains alliés dans le vestiaire. C'est capital! Ces joueurs doivent devenir tout naturellement le prolongement de la ligne de pensée, des attentes et de l'autorité du « coach » et doivent en devenir les gardiens et les promoteurs auprès de leurs coéquipiers. Or, je crois sincèrement qu'aucun joueur du Canadien n'a daigné s'identifier comme tel, cette saison.

Bien sûr, on pourrait conclure que c'est d'abord à l'entraîneur de s'assurer de trouver au sein de son équipe des hommes capables de jouer ce rôle et que c'est aussi à lui de s'assurer, par la suite, de les garder bien « éveillés ». Mais cela n'excuse pas complètement le laxisme des vétérans, particulièrement après tous les tumultes survenus depuis le début de 2009. Cela n'excuse pas non plus la nonchalance générale de certains joueurs plus jeunes qui auraient pu démontrer un peu plus de constance dans leur niveau d'implication générale auprès de leur équipe.

Un homme de grande qualité

Je ne vous cacherai pas, par ailleurs, ressentir beaucoup de compassion pour l'homme, bien avant l'entraîneur. Je sais que Guy Carbonneau projette l'image d'un homme plutôt froid et détaché, têtu et introverti, mais à chaque fois qu'une occasion se présentait, j'étais moi-même en mesure de découvrir un côté très différent de sa personnalité. Il devenait alors beaucoup plus ouvert, laissait filtrer sa passion pour ceci ou pour cela, son intérêt pour l'actualité, l'économie, etc. Il nous arrivait souvent de nous lancer des défis pour savoir qui allait terminer en premier les mots croisés de La Presse, au cours d'une envolée. Il suffisait souvent de faire un tout petit effort pour aller chercher cet autre aspect de lui-même. En tout cas, personne ne peut douter de son intégrité, de son intelligence et de sa loyauté.

Mais je comprends aussi que le métier d'entraîneur dans la LNH impose d'entrée de jeu une très grande flexibilité, afin de pouvoir composer avec toutes les nuances et les aléas qui accompagnent les athlètes de l'ère moderne. Homme entier et extrêmement rigoureux, ce n'était peut-être pas aussi facile pour lui d'adapter naturellement sa façon d'être au gré des situations.

Chose certaine, c'est encore un triste dénouement pour un homme de qualité, triste dénouement d'un genre qu'on voit trop souvent dans la Ligue nationale de hockey!