On grogne contre moi. Parce que j'ai omis un détail important sur Vancouver. Depuis le début de mes aventures vancouvéroises, j'ai souvent utilisé le mot paradis pour découvrir la métropole de la Colombie-Britannique. Paradis des coureurs, paradis du sushi, paradis des buveurs de café, paradis de la marque Lululemon, paradis de la pluie. Mais on grogne parce que je n'ai pas encore écrit que Vancouver était aussi le paradis des chiens.

Comme chaque grande ville, Vancouver doit vivre avec ses inégalités et des divergences. Mais il y a deux phénomènes où les inégalités et les divergences sont inexistantes : l'amour pour les chiens et la marijuana.

Que vous soyez pauvre ou riche, pour les Jeux ou contre les Jeux, pro-Lululemon ou anti-Lululemon, type sauce ou type poulet, militant écolo pour Greenpeace qui se promène à vélo ou gosse de riche avec quatre livres de colliers dans le cou qui pense vraiment impressionnner les gens en louant un camion-limousine avec des gros mag pour sortir au centre-ville un samedi soir, vous êtes susceptible d'avoir un chien et de fumer un petit joint une fois de temps en temps.

Si le piéton est roi ici, le chien ne vient pas très loin derrière dans la hiérarchie. La preuve, c'est que le chien doit être assez haut placé pour que la ville décide de construire 33 parcs à chiens sur son territoire. Parce que des chiens, il y en a partout, partout, partout. Je ne me souviens pas d'avoir vécu dans une ville où il y a autant de chiens par habitant.

Et attention, qui dit parc à chiens ne dit pas un carré de sable de quatre par quatre sur le bord d'une ruelle à côté d'une cour à scrap. Non madame. De beaux grands parcs, certains clôturés, d'autres non, certains à proximité des plages, certains le long du Sea Wall pas très loin du village olympique, certains à trois coins de rue du quartier des affaires au centre-ville. Un paradis pour les bêtes à quatre pattes, grosses ou petites : sans laisse et en totale liberté.

Et si pitou est gentil dans le parc, qu'il ramène la balle, qu'il court bien et qu'il ne passe pas son temps à sentir le troufignon de ses amis canins ou à japper, peut-être que le maître l'amènera passer quelques heures au ToysRus des chiens, la plage de Kitsilano.

Rien de mieux qu'un dimanche après-midi pour aller se délier les pattes dans le sable de cette plage. Parce que si l'action du parc à chiens normal se résume à un peu de course et à du ramenage classique de balle de tennis, le parc à la plage est le lieu de tous les défis. Ici, pas question pour les mâles pit-bulls, labradors, bouviers-bernois, boxers et terriers de ramener uniquement la balle.

Non, ici, les chiens ramènent le gros bout de bois de 75 livres que le propriétaire peine à lancer à l'eau. Exit les pug, les beagles et les poméraniens. Ici, le chien transporte de la marchandise des ligues majeures… même s'il est trop tarte pour se rendre compte que le morceau de bois est démesurément trop gros et que ça lui prend 10 minutes pour regagner la plage avec le bout de bois dans la gueule. Parce qu'il faut bien montrer sa virilité pour impressionner la chienne de la voisine qui aboie d'envie et qui tente d'attraper sa propre queue depuis 15 minutes devant autant de démonstration de masculinité canine.

Dans plusieurs situations, je suis souvent aussi émotif qu'une roche. Mais je dois avouer bien humblement que voir ces dizaines de gros chiens jouer avec des gros bouts de bois, revenir sur la plage puant et détrempé du museau au bout de la queue et courir et jouer avec les autres chiens tout en se roulant dans le sable, je trouve ça cute et irrésistible. J'ai beau retourner là à chaque fin de semaine, le spectacle me divertit et me fait rire toujours autant.

Surtout l'hiver quand le mercure descend sous le point de congélation et que la température de l'eau doit avoisiner les 45 degrés Farenheit. Qu'il fasse froid et qu'il risque éventuellement de péter une crise d'hypothermie… on s'en tape… tout bon chien qui se respecte s'en va dans l'eau pour ramasser le fameux bout de bois avant de revenir et de branler la queue. Oui, un peu andouille comme comportement. Mais ce n'est pas aussi un peu pour ça qu'on aime les chiens? Parce qu'ils sont un peu cons.

En plus des parcs et des plages, les chiens ont également une place de choix sur le Sea Wall, le lieu culte des coureurs. Vancouver étant une ville de vrais sportifs, ici le concept du « tel chien, tel maître » ne signifie pas nécessairement que maître et chien partageront la même permanente ou la même dentition. Ici, ça signifie plus que si le maître est en forme, le chien devra suivre. Exit, les chiens à bourrelets!

Parce qu'ici chien chien ne reste pas à l'appart quand le maître va se délier les jambes. Non, qu'il soit petit ou gros, toutou court avec son maître.

Un p'tit deux que la population canine de Vancouver est la plus en forme au monde. Vous ne me croyez pas? On s'en reparlera dans trois ans quand Vancouver sera la première ville au monde à organiser un marathon pour chiens.