LONDRES - « Hier, mon rêve est mort » : c'est par ces mots que l'entraîneur italien de Leicester City, l'Italien Claudio Ranieri, a commenté, dans un communiqué, son éviction surprise, décidée jeudi soir par les dirigeants du club anglais, champion d'Angleterre en titre.

« Après l'euphorie de la saison dernière, le titre en Premier League, tout ce dont je rêvais c'était de rester à Leicester City, ce club que j'aime, pour toujours. Malheureusement, ce ne sera pas le cas", ajoute l'Italien, nommé entraîneur de l'année par la FIFA.

Après avoir remercié son épouse Rosanna, sa famille et ses agents, Steve Kutner et Franco Granello, pour lui avoir « permis de devenir un champion », l'entraîneur a également salué ses deux adjoints, Paolo Benetti et Andrea Azzalin, qui quitteront Leicester City avec lui.

« Mais surtout, je me dois de remercier le club. L'aventure a été extraordinaire et je la porterai en moi pour toujours", affirme-t-il.

Avant d'ajouter : « mes remerciements les plus sincères vont à tous les membres du club, aux joueurs, au staff, à tous ceux qui travaillent ici et grâce à qui cette victoire a été possible. Mais avant tout, aux supporteurs. Vous m'avez ouvert vos cœurs depuis le début et vous m'avez aimé tout de suite ».

« Je vous aime aussi. Personne ne nous prendra ce que nous avons réalisé ensemble et j'espère que quand vous repenserez à ces moments, ce sera toujours avec le sourire », affirme-t-il.

Et de conclure : « Ce fut un plaisir et un honneur de remporter le championnat avec chacun d'entre vous ».

Le licenciement de Claudio Ranieri a ému vendredi le monde du football, qui y a vu la triste fin d'un conte de fées neuf mois après un titre de champion plus qu'inattendu. Mais pour les propriétaires thaïlandais du club, actuel 17e de la Premier League, il s'agit surtout d'éviter la catastrophe d'une relégation estimée à près de 120 millions d'euros.

Les dirigeants critiqués pour l'éviction de Ranieri

« Les propriétaires de Leicester sont des serpents qui prétendaient soutenir Ranieri » : le limogeage de l'entraîneur italien, évincé neuf mois après avoir offert aux Foxes un titre historique, vaut aux propriétaires thaïlandais du club un tombereau de critiques vendredi dans la presse britannique.

A l'image du tabloïd Daily Mail, qui assimile les dirigeants à des reptiles, le reste de la presse n'est pas tendre.

« Dégoûtant », enrage ainsi l'ex-attaquant du club Gary Lineker.

« J'ai versé une larme hier, poursuit l'ancien international au micro de la BBC dont il est l'un des commentateurs vedette. J'ai versé une larme pour Claudio, pour le football et pour mon club. Pour moi, pour de nombreux supporteurs qui adorent ce sport, c'est inexplicable et j'imagine qu'il s'agit d'un acte de panique. C'est une mauvaise décision et c'est très triste ».

« Le règne de Ranieri s'achève de façon cruelle et brutale », comment plus sobrement The Guardian.

Selon The Sun, les relations devenues mauvaises entre le technicien et certains cadres de son vestiaire tels que l'attaquant Jamie Vardy ou le gardien Kasper Schmeichel sont à l'origine de la baisse spectaculaire des résultats qui a fini par provoquer ce limogeage.

Après avoir savouré son sacre au printemps, le club des Midlands pointe désormais à une dangereuse 17e place, un point seulement au-dessus de la zone de relégation à 13 matches du terme de la saison.

Nommé en 2015, le technicien de 65 ans, surnommé « le bricoleur » du temps où il évoluait à Chelsea et précédé d'une réputation de ''loser'' jusqu'à la saison dernière, sera donc resté en poste moins de deux ans.

L'Italie déplore amèrement l'éviction de Ranieri

L'entraîneur de l'AS Rome Luciano Spalletti a évoqué « un scandale » après le licenciement par Leicester de son collègue Claudio Ranieri et les médias sportifs italiens regrettent vendredi « l'ingratitude » du club champion d'Angleterre.

« C'est incompréhensible, il n'y a pas de reconnaissance. Parce que c'est lui qui a réussi à faire naître cette alchimie dans l'équipe et le vestiaire qui a permis de gagner le championnat », a déclaré Spalletti en conférence de presse après le match Roma-Villarreal jeudi en Europa League.

Ensuite interrogé par Roma TV, la chaîne officielle du club de la capitale, il a été plus loin, parlant de « scandale ».

« Pour Ranieri, c’est un scandale, quelque chose d'insupportable. Il faut le féliciter. On voit bien l'alchimie qu’il a créée. Et quand tu gagnes un championnat d'Angleterre contre City, United et Chelsea, si tu as un peu de dignité, tu acceptes même d’être relégué sans toucher à rien. Ca doit être un tel bonheur d’avoir gagné, que l’année d'après, tu dois accepter d’être relégué », a-t-il estimé.

« C’est un beau métier, entraîneur, n’est-ce pas? C’est toujours nous qui partons. Vous avez déjà vu un président, un responsable ou un joueur se faire virer avant la fin de saison? », a-t-il ajouté.

Le choix des dirigeants de Leicester de remercier Ranieri neuf mois seulement après qu'il a offert aux Foxes un titre historique est également critiqué vendredi par la classe médiatique italienne.

« Leicester chasse l'homme des rêves », titre ainsi le Corriere dello Sport à côté d'un éditorial intitulé « A Claudio la légende, aux Anglais le ridicule ».

« Claudio a 66 ans. Il va rentrer chez lui et emportera avec lui l'histoire d'une vie. Et il laissera à Leicester le ridicule dont (les dirigeants) se sont couverts », écrit l'éditorialiste Alberto Polverosi.

« Ranieri licencié. Les Anglais ingrats », titre de son côté la Gazzetta dello Sport en Une. « Leicester salit le conte de fées qui avait enchanté le monde », écrit le quotidien aux pages roses.

En pages intérieures, la Gazzetta écrit que Leicester « a chassé le technicien qui a offert l'éternité à ce club ».