MONTRÉAL – Kevin Gilmore croit que le Stade Saputo pourrait accueillir jusqu’à 6400 spectateurs en respectant les règles de distanciation auxquelles doivent présentement se conformer certains secteurs de l’industrie du divertissement. 

Mais cette cible, si elle demeure un objectif à plus long terme, est pour l’instant hors d’atteinte. Lorsqu’il recevra la visite des Whitecaps de Vancouver mardi prochain, l’Impact sera l’hôte du premier événement sportif professionnel tenu devant des spectateurs au Canada depuis l’arrêt généralisé des différents championnats à la mi-mars. Il ne pourra toutefois accueillir plus de 250 partisans. C’est la limite qui lui a été imposée après l’étude de son dossier par la direction de la santé publique. 

« On sait que dans le récent décret qui a autorisé l’augmentation du nombre de spectateurs pour des événements de divertissement à 250, il y a certaines clauses qui permettent d’excéder ce nombre dans des zones non-contigües, a expliqué le président et chef de la direction de l’Impact en visioconférence jeudi. Je pense que c’est avec cette exception-là que le casino se retrouve. Nous autres, on a eu des consultations avec la santé publique pour voir s’il y avait une ouverture en ce sens et ce qu’on s’est fait dire, c’est que présentement, on était limité à 250, ce qu’on comprend entièrement. »

« De notre côté, c’est un scénario où on peut commencer avec 250, s’assurer que ce qui est en place livre ce qu’on doit livrer, c’est-à-dire une expérience extrêmement sécuritaire pour les joueurs, nos employés et les partisans. Mais au fur et à mesure que les choses progressent, on espère être capable d’augmenter ce nombre. » 

Au cours des prochains jours, le domicile de l’Impact sera configuré de façon à ce que les allées et venues de tous ceux qui franchissent ses portes soient conformes aux normes exigées. Les vestiaires seront aménagés à la demande de la Ligue. Dans les gradins, les spectateurs seront répartis dans cinq sections de la tribune sud, celle faisant face aux bancs des joueurs. L’entrée dans l’enceinte sera contrôlée, le masque obligatoire une fois à l’intérieur et l’offre aux concessions limitée. 

Les membres des médias ont déjà été avisés que la galerie de presse serait condamnée. Les journalistes accrédités seront dispersés dans les loges qui entourent le terrain et les entrevues d’après-match se feront à distance, par vidéo. 

Gilmore ne s’attend pas à ce que l’opération soit financièrement rentable. « Ça va être difficile de sortir du rouge », a-t-il exprimé dans ses propres mots. Mais il s’agit pour lui d’un passage obligé avant la tenue d’événements de plus grande envergure. 

« Avant de pouvoir attirer plus de gens, il faut d’abord attirer des gens, raisonne le gestionnaire. On ne pouvait pas rester assis et attendre de pouvoir accueillir 6000 personnes dans un contexte où l’on doit implanter un protocole de sécurité qui est solide sur papier, mais qui n’a pas encore été testé. Pour être honnête, même si le gouvernement nous avait donné le feu vert pour accueillir plus de spectateurs, on aurait probablement commencé avec 250 seulement pour s’assurer que tout était bien fait. » 

Billets : une procédure qui déplaît 

La vente de billets, réservée exclusivement aux détenteurs d’abonnements de saison, se déroulera sous forme d’enchère. À partir d’une mise minimale de 49$, un acheteur potentiel devra indiquer par le biais d’une application mobile le prix qu’il est prêt à débourser pour sa place. « Le système déterminera ensuite les chances d’obtenir un accès au Stade Saputo à ce prix et en informera l’utilisateur », a détaillé l’Impact dans un communiqué envoyé en après-midi. 

Cette façon de faire a été accueillie froidement par les supporteurs du club, qui ont vite fait connaître leur mécontentement sur les réseaux sociaux.

« On s’attendait à ce que les gens ne soient pas contents, a répondu Gilmore. On n’est pas content non plus. J’aimerais donner accès à tous nos membres pour le match de mardi, tant pour l’atmosphère qu’il y aura au Stade qu’au niveau financier. Ça, c’est la préférence. Mais la réalité, c’est qu’on vit présentement dans un monde imparfait. »

« On est chanceux de vivre dans une province, dans un pays où les mesures sanitaires sont prises au sérieux. On voit les chiffres, ça s’améliore. Donc on devrait se considérer chanceux. Mais la réalité, c’est qu’on doit vivre à l’intérieur de ces consignes pour se protéger et c’est ce qu’on fait. »

Gilmore a aussi rappelé que dans les conditions qui lui sont imposées, l’Impact doit prendre les moyens pour garnir ses coffres. 

« On est une équipe qui, à part les matchs au Stade olympique, a zéro source de revenus. Les joueurs sont payés pour l’année. On a gardé notre staff au complet jusqu’au début juillet, après on a fait quelques coupures. Mais à un certain point, il faut regarder l’aspect financier. » 

La prochaine étape 

L’Impact est assuré d’un minimum de trois parties, à des dates déjà fixées, au Stade Saputo. Pour la suite, le néant persiste. Gilmore est résolu à ce que son équipe joue tous ses matchs locaux de 2020 sur son terrain – il y en aura neuf, en saison régulière, si tout se passe bien – mais il aura besoin de l’assistance des autorités fédérales qui contrôlent avec zèle la circulation à la frontière.

Si les règles actuelles, qui imposent notamment une période d’isolement de 14 jours à tous les voyageurs qui rentrent au pays, ne peuvent être assouplies, l’Impact pourrait être forcé de s’exiler au sud de la frontière pour la durée de son calendrier et d’y jouer ses matchs locaux dans un domicile temporaire. 

« La prochaine étape dans ce processus-là, c’est de s’assurer qu’on peut aller et revenir des États-Unis en étant sujets à une quarantaine modifiée, tranche Gilmore. On va se le dire, on doit jouer nos matchs contre des équipes américaines, donc il va falloir se déplacer et aller aux États-Unis pour jouer nos matchs. Mais c’est impossible d’être assujettis à une pleine quarantaine, de ne pas s’entraîner et s’attendre à ce qu’on joue d’autres matchs. Ça, c’est primordial et c’est une priorité. »

« J’aimerais dire qu’une fois qu’on aura fait ça, et considérant que la situation au Canada continue de s’améliorer, on pourra regarder avec les autorités fédérales pour une situation où les clubs américains auraient la permission de rentrer pour venir jouer des matchs ici, aller-retour les jours de matchs. Mais comme on dit en anglais, c’est du "heavy lifting". » 

En d'autres mots, dans les bureux comme sur le terrain, il y a loin de la coupe aux lèvres chez l'Impact.