Les athlètes passent par toute la gamme des émotions dans les semaines et les jours précédant un grand rendez-vous sportif. Espoirs, doutes, remises en question, acharnement, découragement, tout y passe.

Souvent ces phases se déroulent sous l‘oeil du public et des médias. Heureusement dans mon cas, j‘ai vécu un processus plus personnel. C‘est que j‘ai passé les deux derniers mois à m‘entraîner intensément pour le marathon de Montréal qui sera couru dimanche. Au cours de ces semaines j‘ai pu modestement me mettre dans la peau de ces dizaines d‘athlètes de pointe que j‘ai l‘occasion de rencontrer dans le cadre de mon travail de journaliste sportif.

J‘ai pensé à ces magnifiques athlètes des sports amateurs qui connaissent des années à l‘avance la date de la compétition aux Jeux Olympiques où il leur faudra être au sommet de leur art sur la plus grande scène imaginable. Je me suis également transposé dans le rôle de ces boxeurs que je cotoie régulièrement et qui souvent s‘accordent 3 mois d‘entraînement intensif avant un combat d‘envergure.

Prenez Lucian Bute. Depuis la mi-août il sait qu‘il devra être à son meilleur pour son prochain combat le 5 novembre. C‘est alors le début de la diète, le début du programme d‘entraînement. Quotidiennement, toutes ses actions seront consacrées à ce moment du 5 octobre à raison de 2 séances d‘entraînement par jour.

C‘est aussi le cas pour les milliers d‘autres coureurs qui comme moi ont choisi la date du 25 septembre pour livrer leur combat personnel. Je m‘entraînais régulièrement depuis le mois de janvier, mais depuis le 1er août dernier, fini l‘alcool, fini le junk-food. On augmente alors le rythme d‘entraînement et on suit la progression qui nous amène à l‘objectif du 25 septembre. Une date qui devient en quelque sorte une obsession. Vraiment!

Il peut survenir des imprévus. Par exemple, en ce qui me concerne, on m‘a diagnostiqué une bursite à un tendon d‘Achille à 6 jours du marathon. C‘est la panique! J‘annule? Je me repose et je cours tout de même?

Imaginez alors lorsqu‘un athlète vers qui tous les regards et les espoirs sont tournés vit la même situation. Je reprends l‘exemple de Lucian Bute. En 2008, à quelques jours d‘un combat où il doit défendre son titre de champion, son système est affaibli par un virus. L‘athlète de pointe se pose alors les mêmes questions: J‘annule? Je me repose et je boxe tout de même? Dans son cas, les conséquences sont plus importantes. Il y a des milliers de dollars d‘impliqués si le gala dont il est la tête d‘affiche est annulé. Et il y a le risque de perdre s‘il monte dans l‘arène. Finalement Bute a boxé mais il a gagné son combat de justesse.

Je vais donc courir mes 42,2 kilomètres, sachant que de mon côté je n‘aurai pas de ceinture à perdre, que je n‘aurai pas d‘adversaire face à moi; le chronomètre n‘est pas un rival, mais un partenaire. Je n‘aurai pas de compte à rendre aux médias après ma course. D‘ailleurs, pour la plupart des gens qui me demanderont mon temps, cela ne fera aucune différence que je leur dise que j‘ai complété la distance en 2 heures 3 minutes ou en 4 heures 30.

C‘est toute une chance!