Sherbrooke – Le Québec a vu plusieurs joueuses de tennis de grand talent éclore ces dernières années, mais rare sont les garçons qui se sont illustrés. Double médaillé de bronze aux Jeux du Canada à Sherbrooke, Hugo Di Feo est le meilleur espoir de la province présentement et compte bien faire sa place au soleil.

« Mon objectif est de faire partie des grands joueurs canadiens », affirme le Montréalais, inspiré par les performances de ses compatriotes ontarien Milos Raonic et britanno-colombien Vasek Pospisil.

« De voir les gars qui se battent parmi les meilleurs, ça me motive beaucoup en tant que junior », avance Di Feo, 46e et meilleur Canadien au classement international junior.

Finaliste aux Championnats panaméricains juniors en octobre, il avoue avoir hâte de se mettre en marche. « Mes résultats ne sont pas encore à mon goût, mais avec le travail que j’ai effectué, mon niveau de jeu a beaucoup augmenté. Je m’attends à avoir de bons résultats d’ici la fin de l’année. »

Le protégé des entraîneurs Guillaume Marx et Jocelyn Robichaud au centre national d’entraînement de Tennis Canada à Montréal affiche une belle confiance.

« Mes entraîneurs croient en moi et, moi-même, j’ai un peu allumé. Je me rends compte que je peux jouer avec les meilleurs. »

Blessé à l’aine droite aux Jeux du Canada, Di Feo pourrait jouer de prudence et ne pas prendre part aux tournois Futures de Calgary et Winnipeg afin de se concentrer sur les Internationaux de Repentigny.

« J’aimerais vraiment gagner les Internationaux de Repentigny. J’ai le niveau », confie le seul Québécois qui participe aux tournois juniors d’envergure présentement.

« C’est vrai qu’il y a un creux de vague en ce moment », répond le joueur de 19 ans, questionné au sujet de l’absence de relève aux Sébastien Lareau, Sébastien Leblanc, Greg Rusedski, Frédéric Niemeyer, Simon Larose et Jocelyn Robichaud.

Pour l’instant, Erik Chvojka, 459e mondial, est l’unique représentant de la Belle Province qui participe à des Challengers et autres tournois de l’ATP.

La prise en charge encore plus précoce des meilleurs joueurs par Tennis Canada devrait favoriser le développement des Québécois selon lui. « Quand tu es seul à voir à ton développement, à te pousser, c’est évidemment plus difficile. Depuis cinq ans, il y a une nouvelle structure et c’est positif. »

La situation est par ailleurs quelque peu étonnante aux yeux de Daniel Cloutier, un des entraîneurs de l’équipe du Québec aux Jeux du Canada.

« Il nous manque pourtant de filles au Québec. Par exemple, pour un tournoi de 14 ans, nous allons avoir 90 gars et 25 filles. C’est étonnant de voir que nos filles font si bien et que nous avons de la difficulté à développer des gars. »

Perles rares

L’ancien directeur haute performance à Tennis Québec parle sans hésiter de perles rares.

« Je pense que nous avons la chance d’avoir trois talents assez extraordinaires : Aleksandra Wozniak, Eugenie Bouchard et Françoise Abanda, qui devrait devenir une grande athlète si les blessures peuvent la lâcher. »

« Du côté des gars, nous avons eu beaucoup de profondeur, beaucoup de bons athlètes, mais pas celui avec le petit quelque chose de spécial, comme un Milos Raonic par exemple. »

« Pour jouer au tennis chez les hommes présentement, il faut que tu ais quelque chose d’extraordinaire », avance le cofondateur de l’académie Tennis Momentum à Repentigny.

Cloutier rappelle également que l’aspect financier est intimement lié à la réussite. « Beaucoup de talents ont été gaspillés, faute d’argent. Présentement, avec le centre national à Montréal, nous savons qu’à partir de 15 ou 16 ans, si le jeune a le potentiel et est bon, Tennis Canada va lui donner la chance d’aller sur le circuit international. »

L’impossibilité de bien gagner sa vie en jouant au tennis sans être parmi les meilleurs est une autre limite qui rebute plusieurs athlètes. « Le tennis professionnel en général doit se poser des questions et trouver une manière de récompenser les joueurs classés entre les 100e et 300e places au monde. »

« Au golf, un joueur qui est 300e au monde, mais qui joue sur plusieurs circuits, peut gagner un million par année. En tennis, le gars qui est 150e au monde, à la fin de l’année, il ne lui reste pas grand-chose », avance Cloutier.

Tout n’est pas noir pour autant selon l’entraîneur. « Nous avons une très belle relève chez les 14 ans et les 12 ans. Peut-être que dans 10 ans, l’histoire sera bien différente. »