LAVAL – D’abord, il y a eu le choc de voir son nom placé au ballottage, un sentiment étrange doublé quelques heures plus tard par celui d’être ignoré par 30 employeurs potentiels à l’échelle de la Ligue nationale. Puis à peine avait-il eu le temps d’encaisser tout ça que Nicolas Deslauriers s’est fait demander de rester chez lui. Même dans la Ligue américaine, les Sabres de Buffalo ne voulaient plus de lui.

 

« Ils ne m’ont pas dit d’attendre un échange, mais tu relies les points, tu t’en doutes un peu », confiait-il jeudi après son premier entraînement avec le Rocket de Laval.

 

« Je peux te dire que les cinq dernières journées ont été vraiment tough. C’était quasiment plus dur que tout ce que j’ai vécu dans ma carrière. Je m’étais entraîné fort tout l’été, je voulais jouer au hockey. Être forcé de rester à la maison, c’était vraiment bizarre. »

 

Lorsqu’il a su que le Canadien de Montréal avait transigé avec les Sabres pour obtenir ses services, Deslauriers n’a pas perdu une minute. Il a embrassé sa femme et ses deux enfants et est sauté dans sa voiture pour entreprendre les huit heures de route qui allaient le mener à sa nouvelle vie.

 

Moins de 24 heures après l’annonce de la transaction, le natif de LaSalle était sur la glace de la Place Bell sur un trio tout québécois complété par Daniel Audette et Antoine Waked.  « Je le sens aujourd’hui, les jambes sont lourdes un peu, mais je vais prendre un bon repas et d’après moi je ne me coucherai pas tard! », disait le sympathique colosse.

 

Mais autant Deslauriers était pressé d’arriver à Laval, autant il n’a pas l’intention de s’y éterniser. Ses derniers matchs dans la Ligue américaine remontent à la saison 2013-2014, sa première dans l’organisation des Sabres. Depuis, il a disputé 211 matchs dans la Ligue nationale, où il s’est bâti une solide réputation de redresseur de torts tout en récoltant une trentaine de points. Son avenir, c’est toujours dans la LNH qu’il le voit.

 

« C’est sûr qu’à 26 ans, je ne pensais pas être un vétéran dans la Ligue américaine, admet-il candidement. Mes quatre ou cinq prochaines années, je suis pas mal sûr que ce seront mes plus grosses années, alors même si j’ai le plus grand respect pour les joueurs qui jouent ici, ce n’est pas ici que je veux être. C’est un petit défi que je dois relever, mais je viens ici pour mettre mes bottes de travail et foncer. Je veux me retrouver avec le Canadien et quand je vais y arriver, ça va être difficile de m’enlever mon chandail. »

 

Un retour comme défenseur?

 

Selon le site HockeyFights.com, Deslauriers a livré 18 combats depuis son accession à la Ligue nationale. Il croit qu’à Buffalo, cette bravoure qui lui a d’abord permis d’y gagner un poste a fini par lui être nuisible. Il était désormais étiqueté comme un pugiliste alors qu’à ses yeux, les atouts dans son jeu sont beaucoup plus nombreux.

 

« Je pense que je peux amener un peu de tout, estime l’athlète de 6 pieds 1 pouce et près de 200 livres. Oui, je sais me battre. Je n’ôterai jamais ça de ma game, c’est ce qui m’a amené ici. Mais j’ai plus à offrir et je pense que l’organisation sait ce que je suis capable de faire. »

 

« Il amène de l’expérience et du jeu physique, a d’entrée de jeu observé Sylvain Lefebvre, son nouvel entraîneur. Dans la LNH, il s’est bâti une réputation d’un gars qui n’a pas peur de venir en aide à ses coéquipiers. Aussi, quand le match ne va pas comme tu veux, il peut changer le momentum avec une bonne mise en échec ou une bataille.  Mais on ne veut pas nécessairement qu’il passe son temps à se battre. »

 

Le retour au bercail de Deslauriers pourrait-il coïncider avec un retour aux sources? À son premier entraînement avec le Rocket, l’attaquant a exécuté quelques exercices au poste de défenseur afin d’arrondir le nombre d’arrières à la disposition des entraîneurs. La position ne lui est pas étrangère. Il a été un défenseur à caractère offensif pendant trois de ses quatre saisons dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec. C’est un futur quart-arrière potentiel, et non un robuste ailier, que les Kings de Los Angeles voyaient en lui lorsqu’ils en ont fait leur choix de troisième ronde en 2009.

 

Huit ans plus tard, ses nouveaux patrons semblent intrigués par la possibilité d’une reconversion.

 

« On veut également qu’il soit ici pour parfaire certaines facettes de son jeu, a ouvertement déclaré Lefebvre. On sait tous qu’il était un défenseur naturel au niveau junior et qu’il a été transformé en attaquant. Il se peut qu’à un moment donné, on ait besoin de lui à la défense. On a un gars qui peut être utile de plusieurs façons, alors on va lui donner du temps de jeu. »

 

Il est donc déjà établi que la prochaine saison en sera une d’adaptation pour Nicolas Deslauriers. Un nouvel uniforme, de nouvelles responsabilités... et une nouvelle réalité.

 

« Depuis le début de la journée, je parle en anglais aux francophones. Ça fait longtemps que je suis le seul Québécois, il va falloir que je m’habitue! »