Lorsqu’il évoluait au niveau Midget AAA, le joueur québécois Abraham Toro ne frappait seulement que du côté droit du marbre. Il est maintenant un espoir des Astros de Houston qui compte 13 coups de circuit au niveau A fort. De ses 13 coups de 4 buts, 11 sont venus du côté gauche du marbre. Comme quoi il n’est jamais trop tard pour apprendre. Toro a développé cet atout à l’Académie de baseball Canada.

Repêché par les Astros en 5e ronde de l’encan de 2016, Toro en est à sa 3e saison dans l’organisation des plus récents champions de la Série mondiale. Il connaît une excellente saison qui lui a valu une invitation au match des étoiles de la Ligue de la Caroline. C’est la puissance de son coup de bâton qui le fait ressortir du lot. Ses 13 circuits et 53 points produits le classent au 3e rang du circuit dans chacune des catégories.

« Pour percer dans le baseball majeur, ça prend de la puissance, affirme sans détour l’athlète de 21 ans. Je suis un joueur de 3e but, donc je dois produire des points et frapper la balle avec autorité. Je connais une bonne saison jusqu’à présent et ça doit continuer. Mon objectif est d’évoluer au niveau AA d’ici la fin de la saison. »

Couteau à double tranchant

Toro est présentement classé au 28e rang chez les espoirs des Astros, une équipe de tête dans les majeures qui a su construire via le repêchage et le développement de ses joueurs. Si l’ancien des Orioles de Montréal, dans la Ligue de baseball junior élite du Québec (LBJEQ), avait l’occasion d’évoluer pour des prétendants au titre, il sait également que la formation texane sera difficile à percer. Âgé de 24 ans, Alex Bregman est le 3e but des Astros. Rien ne laisse croire qu’il cèdera sa place.

« C’est certain que je suis conscient de cette réalité. J’aimerais évoluer pour les Astros, puisqu’ils m’ont donné une chance et ils m’aident à me développer. Si ce n’est pas à Houston, ce sera avec une autre formation. L’objectif principal demeure d’évoluer dans le baseball majeur », indique-t-il. Toro aimerait d’ailleurs fouler les terrains du « show » au cours de l’été 2020.

Il a eu l’occasion d’y goûter quelque peu lorsqu’il a pris part à un match de la Ligue des pamplemousses, lors du dernier camp d’entraînement. Alors, est-ce que c’est une rencontre comme une autre? « Non, dit-il en riant. J’essayais de me préparer comme si c’était un autre match, mais ce n’est pas facile, puisqu’on ne sait pas si on va avoir l’occasion de jouer. L’entraîneur des frappeurs m’a dit que j’irais peut-être au bâton, mais que rien n’était certain. »

En fin de duel, l’entraîneur des frappeurs s’approche du Québécois et lui dit qu’il est le prochain frappeur si le précédent se rend sur les sentiers. Le hic, c’est qu’il y a deux retraits, donc rien n’est moins certain. « C’était un sentiment spécial. J’étais nerveux lorsque je suis arrivé dans le rectangle des frappeurs, mais je devais me concentrer. Je voulais avoir l’occasion d’affronter ce type de lanceurs. »

Le Québécois a finalement été retiré sur un ballon au champ centre lors de sa présence.

Le plus travaillant

Marc-André Ronda connaît bien le joueur de 3e but. Il l’a dirigé au niveau midget AAA, puis dans la LBJEQ à Montréal. Bien entendu, Toro faisait partie des meilleurs joueurs québécois de son âge, mais il n’était pas dans une classe à part, comme certains pourraient le croire.

« C’était celui qui travaillait le plus, décrit d’abord Ronda. Peu importe la position à laquelle nous le mettions, il performait. Il évoluait au poste d’arrêt-court, mais il était aussi notre meilleur receveur. Il a percé à cause de sa détermination et de son intelligence. Lorsque tu accèdes au niveau professionnel, tu dois être en mesure de savoir quel tir le lanceur risque d’envoyer, dépendamment du compte. Tu dois t’adapter dès les premières fractions de seconde et Abraham possède cette qualité. Ça se travaille, mais ça doit d’abord être inné. »

La puissance de Toro pourrait l’amener dans les plus hauts niveaux, croit Ronda.

« Regarde les Yankees. Tous leurs frappeurs peuvent terminer le calendrier avec au moins 20 circuits. Les dirigeants regardent la puissance au bâton et la capacité de produire des points. Un joueur qui a peu de puissance et qui possède une bonne moyenne au bâton ne peut pas se permettre une saison avec moins de coups sûrs. Un frappeur de 25 circuits va bénéficier de beaucoup de plus patience de ses dirigeants », explique Ronda.

Ce dernier qualifie également le bras de son ancien protégé de canon. Il se souvient encore d’une soirée où Toro est allé lancer la dernière manche d’un programme double à Coaticook après avoir été le receveur lors du premier match.

« Il n’avait pratiquement pas lancé de la saison parce qu’il voulait concentrer ses efforts sur sa défense et son rendement au bâton. Nous étions à court de lanceurs et il s’est proposé. Il est allé s’échauffer, mais j’entendais constamment la balle rebondir dans la clôture. J’ai dit à mon adjoint qu’on ne pouvait pas l’envoyer dans le match, ça n’avait aucun sens. Il m’a répondu que c’était le receveur qui ne pouvait pas capter la balle, tellement la vélocité était élevée, raconte-t-il. Il est arrivé sur le monticule et lançait des balles rapides à 91 milles à l’heure. »

Un joueur de baseball, dites-vous?