TORONTO - Si les Blue Jays avaient nivelé les chances face aux Rangers vendredi au lieu de perdre un deuxième match de suite, Chris Colabello aurait été le grand héros de la rencontre. Et de loin.

Oui, Josh « MVP » Donaldson a frappé un circuit en solo dès sa première présence au bâton. Oui, Marcus Stroman a fait plaisir à la foule avec ses cinq retraits sur des prises, qui ont fait oublier son début de rencontre timide. Mais n’eut été de la performance de Chris Colabello, Stroman ne se serait peut-être jamais remis de cette première manche. Quant au coup de circuit de Donaldson, il aurait pu être sans signification aucune tant cette première manche aurait pu être néfaste.

C’est encore Colabello qui a ouvert la 12e avec un simple. Dalton Pompey qui l’a remplacé au premier a ensuite volé les 2e et 3e buts. Il n’a pu croiser le marbre en raison du retrait de Ryan Goins sur un roulant au deuxième but pour mettre un terme à la manche et priver les Jays du point de la victoire. Une victoire à laquelle Colabello aurait grandement contribué.

Mais bon…

Malgré sa solide performance, Chris Colabello semblait assommé par le résultat du match lorsqu’il répondait aux questions des journalistes dans le vestiaire des Jays. Plus tard en soirée, alors que les Jays franchissaient les contrôles de sécurité à l’aéroport Pearson avant de s’envoler vers le Texas, Colabello était toujours secoué par la défaite et ses conséquences. Quand je l’ai félicité pour sa partie magistrale alors que nous récupérions nos effets personnels, il a simplement levé les yeux en échappant un « Merci » poli, mais éteint.

Un produit de la Ligue Can-Am

Chris Colabello aura 32 ans le 24 octobre. Il a atteint les majeures à l’âge de 29 ans avec les Twins du Minnesota après un long séjour de sept ans dans la Ligue Can-Am. Une ligue indépendante sur laquelle il a régné dans les uniformes des Tornadoes de Worcester et du Pride de Nashua. La grande histoire du baseball assure qu’il est le seul joueur à avoir atteint les majeures après un séjour aussi long dans une ligue indépendante. Une ligue que Colabello n’a jamais oubliée.

Mercredi dernier, avant l’entraînement des Jays, j’ai demandé à Colabello si le fait d’avoir passé autant de temps à patienter avant de jouer dans le baseball majeur l’aidait à apprécier davantage la frénésie des séries qui s’annonçaient. Je lui ai demandé si, au cours des derniers mois, il avait pris le temps de réfléchir sur les pas de géants franchis en se joignant aux Twins d’abord puis aux Jays, qui l’ont embauché à titre de joueur autonome l’hiver dernier.

« Je n’ai jamais oublié mes racines et le fait que je me suis développé lentement dans une ligue modeste. J’ai toujours cru en mes moyens, sans jamais m’enfler la tête. Bien que je vive une expérience sensationnelle cette année et que j’évolue en compagnie de quelques-uns des meilleurs joueurs du baseball majeur, c’est loin de me monter à la tête. Je n’ai pas besoin de me rappeler mes années dans la Ligue Can-Am pour me rappeler que le succès est difficile à atteindre et qu’il peut être très éphémère. J’ai toujours été un gars très terre à terre et le Baseball majeur ne m’a pas changé. Je ne vois pas pourquoi je changerais maintenant que nous sommes en séries », m’a expliqué le premier-but des Jays.

Colabello a souri lorsque je lui ai dit que j’étais originaire de Québec où il a fait escale à plusieurs reprises au cours de ses années dans la Ligue Can-Am.

« J’ai toujours aimé jouer à Québec. Évoluer dans ce stade – il ne se souvenait pas du nom du stade municipal – fut une très bonne préparation pour moi, car on y jouait toujours devant des gradins bondés. Je sais que ça peut sembler surprenant, mais même s’il y a moins de partisans que dans un stade des ligues majeures, le fait de jouer devant des gradins remplis m’a bien préparé à faire face à la réalité de la grande ligue. Cela m’a aidé à ne pas être intimidé par les foules aussi nombreuses que celles qui nous encouragent ici cette année. »

Parce qu’il a trôné sur la Ligue Can-Am à titre de redoutable frappeur, il sera intéressant de voir comment Chris Colabello réagira maintenant que son club n’a plus le droit de perdre.

Chose certaine, avec ses performances offensives et défensives lors du match de vendredi, il sera difficile pour John Gibbons de retirer Colabello de sa formation. Surtout que les Rangers reviendront avec un gaucher (Martin Perez) pour amorcer la troisième rencontre. Mais peu importe le bras de prédilection du lanceur employé par les Rangers, il me semble que les Jays seront bien mieux servis par la présence rassurante de Colabello au premier comme dans le rôle des frappeurs que par celle de Justin Smoak, qui collectionne les retraits sur des prises depuis le début du duel Rangers-Jays. Certains ajouteraient qu’il les collectionne depuis bien plus longtemps déjà...