MONTRÉAL - Le rideau vient de tomber sur une septième saison professionnelle pour le lanceur Phillippe Aumont sans qu’il puisse s’établir dans le baseball majeur, mais l’artilleur québécois demeure confiant sans être toujours tendre envers l’organisation des Phillies de Philadelphie.

Normalement, à ce moment-ci de l’année, Aumont aurait dû se joindre aux Phillies pour compléter la saison alors que les équipes peuvent augmenter leur bassin à 40 joueurs. Par contre, le Québécois de 25 ans savait déjà qu’il ne ferait pas le voyage vers Philadelphie en raison d’une blessure.

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« Je savais depuis un certain temps que je ne serais pas rappelé parce que je me suis étiré des ligaments du majeur de la main droite », a confié Aumont au RDS.ca. « Mes deux dernières sorties ont vraiment été douloureuses, mais je ne voulais pas terminer la saison sur la liste des blessés. Après ma dernière sortie, mon doigt était enflé au point que je n’étais même plus capable de le plier. »

Ce motif vient donc tempérer certaines spéculations selon lesquelles la carrière d’Aumont tirait à sa fin avec cette formation. Malgré une saison laborieuse au niveau des statistiques et quatre sorties difficiles sur cinq dans l’uniforme des Phillies, le grand droitier s’attendait à un rappel avant de se blesser.

« Je pense que oui, parce que j’aurais continué sur ma lancée du mois d’août alors que tout allait bien », a exprimé Aumont.

Sur ce point, les chiffres donnent raison au numéro 48 qui fait référence à ses quatre sorties avec les Iron Pigs de Lehigh Valley sans accorder de point après avoir été cédé de nouveau au niveau AAA. L’année s’est toutefois conclue sur deux prestations ardues quand il était embêté par sa blessure.

Les dirigeants des Phillies, qui ont acquis Aumont et deux autres joueurs en cédant Cliff Lee à Seattle en 2009, doivent maintenant procéder au bilan de son parcours, mais ils n’ont pas cru bon s’asseoir avec lui pour discuter de cette campagne parsemée de hauts et de bas.

« Non, nous n’avons rien fait de cela. En partant, les Phillies ne sont pas très forts sur la communication », a admis Aumont sans détour en ajoutant qu’il peut parfois être un athlète difficile.

« J’essaie donc de faire mon évaluation par moi-même. Je connais mieux la game et je sais ce que je dois faire. C’est toujours utile quand on peut te pointer une direction quand ça va un peu moins bien. Je n’ai pas eu un grand coup de main dans ce sens, mais ça fait partie du sport professionnel. C’est ma carrière, je la prends en mains et c’est moi qui déciderai ce qui se passera avec ma carrière et personne d’autre », a poursuivi Aumont avec la conviction de travailler encore plus fort pour atteindre le niveau ultime.

Libre de regarder ailleurs prochainement ?

La suite des choses sera intrigante à suivre pour le Gatinois. En effet, s’il était retranché au camp d’entraînement de 2015, il serait soumis au ballottage ouvrant la porte à une autre équipe pour le réclamer. Il deviendrait aussi libre comme l’air si les Phillies décidaient de le retirer de leur formation des 40 joueurs protégés. Dans sa situation, Aumont n’a pas le choix de penser à son avenir en premier lieu.  

« Je n’ai aucun attachement émotif avec les Phillies. Il y a 29 autres équipes et mon but demeure de jouer dans les ligues majeures peu importe l’organisation », a-t-il convenu. 

« Oui, j’ai grandi et j’ai fait mes débuts avec les Phillies au baseball majeur et c’est toujours agréable de voir des joueurs qui passent toute leur carrière avec une organisation. Mais, la position de releveur n’est pas reconnue pour la stabilité à moins d’être un spécialiste des fins de match avec un contrat de longue durée. »

Aumont reconnaît que ses propos peuvent sembler tranchants, mais il explique le fond de sa pensée ainsi.

« Quand j’arrive avec le grand club, je travaille pour obtenir les victoires et aider l’équipe à gagner des matchs. Ce sont les mêmes buts que l’organisation, mais pour l’instant, je serai un peu égoïste puisqu’il s’agit de ma carrière. J’aimerais aller à un endroit où ils vont me donner une opportunité et me guider un peu par rapport à certains petits correctifs à effectuer dans la mécanique et mon approche des situations de match en général », a dévoilé celui qui demeure à la recherche d’une plus grande constance sur la butte.

Aumont pourrait pousser cette logique jusqu’à demander aux Phillies de le retirer de leur liste des 40 joueurs, mais il n’entend point franchir ce pas.

« Je pourrais le faire, mais je ne vais pas leur demander. Les Phillies possèdent encore la chance de me donner une occasion au camp l’an prochain sans perdre mes services. À partir de là, on verra ce qui se produira », a-t-il expliqué alors qu’il était en route vers le Canada.

Une progression malgré des chiffres décevants

D’un regard statistique, le bilan 2014 d’Aumont peut en effrayer plusieurs. D’abord, il a alloué deux points ou plus dans quatre de ses cinq présences avec les Phillies. Au cumulatif, il a présenté une moyenne de points mérités de 19,06 en 5,2 manches incluant trois circuits et 14 coups sûrs.

Mais de son point de vue, Aumont assure qu’il a progressé au cours des derniers mois. 

« Ce ne fut pas mes meilleures performances, je ne peux pas le cacher. Mais, dans l’ensemble, j’ai bien lancé en attaquant la zone des prises. J’ai lancé plus de prises et je commençais à être plus confortable sur le monticule. Évidemment, c’est difficile quand tu sais que tu n’as pas beaucoup de marge de manœuvre et que tu peux être retourné dans les mineures le lendemain », a-t-il jugé.

L’homme au franc-parler a même perçu du positif dans sa pire prestation face aux Nationals de Washington quand il a concédé six points mérités sur huit coups sûrs en deux manches de travail. 

« Je trouve que j’ai bien fait les choses et que j’ai subi certaines malchances particulièrement pendant ma sortie contre les Nationals. Ils sont parvenus à placer en lieu sûr plusieurs bons lancers... », se souvenait-il.

« Il y a eu beaucoup de positif, mais aussi du négatif dans cette année. Dans le fond, c’est de l’expérience de plus derrière la cravate et je continue à construire le fort », a évalué celui qui s’accordera quelques semaines de congé avant de se remettre au boulot.

L’exemple de Randy Johnson pour s’accrocher

Dans le dernier droit d’une troisième saison pénible d’affilée, les Phillies essuient des critiques de plusieurs amateurs. Dans le lot de commentaires négatifs, Aumont n’est pas épargné car les attentes étaient élevées envers celui qui a été sélectionné au 11e rang du repêchage de 2007 par les Mariners de Seattle.

Aumont assure que la pression ne le ralentit pas et il s’inspire d’un exemple qui n’est pas piqué des vers.

« Non, je ne m’attarde pas à cela. Au baseball, bien des athlètes vont atteindre le sommet de leur potentiel plus tard. Je songe souvent à l’exemple de Randy Johnson qui a atteint son apogée vers 27-28 ans et ça m’aide à continuer mon chemin. »

« Je ne me casse pas la tête avec ça même si j’ai été un choix de première ronde ce qui assure souvent une réussite. Mais j’admets que je ressens un peu de pression parce que je ne veux pas être un joueur de première ronde qui n’a jamais percé », a-t-il enchaîné.

En 45 apparitions sur un monticule du baseball majeur, Aumont n’a pu mieux faire qu’une moyenne de 6,13. Ce constat pourrait être catastrophique, mais, à 25 ans, il peut encore corriger le tir.

« C’est ma situation, mais je ne lâche pas et je n’ai pas fini de jouer au baseball. En fait, je pourrais continuer pendant encore 10, 12 ou même 15 ans. J’ai commencé jeune et j’acquiers de l’expérience. C’est comme ça le baseball, ça se passe étape par étape et ça exige du temps. Le développement prend parfois plus de temps même si ce n’est pas toujours plaisant que ce soit ainsi », a fait remarquer celui qui a reçu d’autres offres pour s’expatrier au Japon.

Après avoir émergé d’une enfance difficile, Aumont ne veut rien savoir de laisser tomber à un si jeune âge.

« Le baseball, c’est un sport difficile et je vais continuer de bûcher. Si les choses ne débloquent pas d’ici une dizaine d’années, on regardera les options. Je ne suis pas loin, je suis à la porte de m’établir au baseball majeur. Je dois seulement améliorer quelques aspects qui me retiennent de faire le grand saut », a assuré Aumont dont les outils lui permettent de s’agripper à son but.