Il est quand même ironique que ce jeudi, ouverture de la saison 2018 du baseball majeur et peu après le passage remarqué des Blue Jays et de Vlad Junior au Stade olympique, nous a quitté LA vedette de la première heure des Expos de Montréal, Rusty Staub.

Le Grand Orange, comme on le surnommait en raison de sa chevelure rousse, a eu un impact majeur à Montréal et à titre d'ambassadeur des Expos, seul Gary Carter a pu approcher son statut.

Staub avait été acquis des Astros de Houston avant le début de la saison 1969, la première de l'histoire des Expos. Mais la transaction a bien failli ne jamais se concrétiser. Un des joueurs impliqués, Donn Clendenon, avait refusé de se rapporter à Houston, ce qui avait amené les Astros à réclamer l'annulation de la transaction. Alors que le dossier était sur le bureau du commissaire Bowie Kuhn, le président des Expos, John McHale, avait commencé à trimbaler Staub à la grandeur du pays, d'un océan à l'autre, afin de promouvoir l'équipe. Le fait que les Expos en avaient fait leur porte-étendard avant même le camp d'entraînement avait compliqué la volonté des Astros de le rapatrier à Houston. Si vous ajoutez l'amitié qui liait McHale et Kuhn, il était donc devenu impossible de retourner en arrière. Le dossier fut complété à la fin du camp d'entraînement quand Jack Billingham et Skip Guinn avaient été envoyés à Houston.

Sur le terrain, Staub a rempli son mandat et davantage. Il a été le meilleur frappeur de l'équipe de 1969 à 1971 et un des meilleurs du baseball majeur, représentant les Expos au match des étoiles à chaque occasion. De fait, il était au sommet de sa carrière alors qu'il était à Montréal. En trois ans, il a disputé en moyenne 160 matchs. Il apprit quelques mots de français, suffisamment pour se faire adopter par la population. Une biographie a été publiée dans les deux langues sur sa carrière lors de son séjour. Bref, peu d'athlètes bénéficiaient d'une telle cote d'amour de la part des amateurs sportifs, incluant les joueurs du Canadien.

Malgré tout, dans leur volonté d'accélérer leur route vers la respectabilité (il a été démontré qu'il faut cinq ans à une nouvelle organisation pour se battre à armes égales avec les équipes établies), les Expos décidèrent de l'échanger aux Mets de New York tout juste avant la saison 1972 pour Ken Singleton, Mike Jorgensen et Tim Foli. Ces trois joueurs allaient devenir des réguliers dès leur arrivée. Mais le départ de Staub a eu un terrible effet sur les amateurs, qui en ont voulu à la direction, même si l'échange se justifiait sur le plan baseball. Les assistances au Parc Jarry en ont d'ailleurs souffert en 1972.

Après avoir brillé en Série Mondiale 1973, Staub allait passer quelques saisons avec les Tigers de Detroit avant de revenir avec les Expos en juillet 1979. Le 27 juillet, au retour d'un voyage sur la Côte Ouest, à l'occasion d'un programme double contre les redoutables Pirates de Pittsburgh, Staub effectuait son retour à Montréal. L'ovation qu'il reçut en huitième manche du premier match alors qu'il s'amena comme frappeur suppléant est probablement un des moments les plus marquants de l'histoire des Expos.

Plusieurs croyaient que l'aventure de Staub allait se poursuivre en 1980 mais le gérant Dick Williams décida de confier le poste au premier but à Warren Cromartie. Staub continuerait sa carrière avec les Rangers du Texas avant de la terminer en 1985 dans un rôle de frappeur suppléant avec les Mets.

Staub aura joué 23 ans saisons dans les majeures. Ces statistiques sont impressionnantes et certains croient même qu'il aurait dû être considéré davantage par les votants appelés à élire les membres du Temple de la Renommée. Ici, nul doute que sa place va demeurer à jamais dans le coeur des amateurs de la première heure des Expos.