MONTRÉAL – « Oh oui, il est spécial un peu, mais dans le bon sens. Tout le monde va tomber en amour avec lui. » Danny Maciocia a tellement apprécié la personnalité, et le jeu bien sûr, de Benoît Marion qu’il n’a pas voulu risquer de l’échapper au repêchage. 

Marion, un joueur de ligne défensive, sourit quand on lui rapporte les propos celui qui a été son entraîneur avec les Carabins de l’Université de Montréal. 

« C’est une assez bonne réponse. Je suis très proche des gens et j’ai une personnalité très différente sur le terrain. Je suis vraiment intense et je joue avec beaucoup d’agressivité. Alors que, dans la vie, j’aime aller à la rencontre des gens, j’ai hâte de voir les partisans des Alouettes et de discuter avec eux. J’ai hâte que les gens me découvrent », a décrit Marion, un athlète volubile et rafraîchissant. 

Pour revenir au mot spécial confirmé par Maciocia, ça peut aussi faire référence à son apparence lors des matchs. Durant son parcours collégial à André-Grasset, Marion a choisi de se peindre le visage en noir. Oubliez les petites bandes sous les yeux, ça n’a rien à voir. 

« Ça me permet de rentrer dans un certain état d’esprit. Quand je vais sur le terrain, je me considère comme un guerrier. Je n’ai jamais manqué de matchs pour de petites blessures. J’ai la mentalité d’encaisser et de me défoncer pour mes coéquipiers et ma ville », a expliqué Marion qui devient plus effrayant encore en raison de son physique de six pieds cinq pouces et 250 livres.  

« Il y a aussi un petit côté d’intimidation dans tout ça. Dans le sens que si le joueur de l’autre côté commence à se dire que je suis un peu fucké, excuse-moi l’expression, j’ai déjà un peu gagné », a ajouté le joueur originaire de Montréal qui a étudié en relations industrielles. 

Le directeur général des Alouettes de Montréal a donc choisi de sélectionner son ancien protégé, quelque peu hâtivement, au 25e échelon, en troisième ronde. Certes, les prévisions des observateurs ne lui prédisaient pas une attente aussi brève, mais il se pourrait que les Alouettes aient agi au moment opportun. 

« Pour moi, les listes ne veulent pas dire grand-chose. Je suis confiant en mes habiletés et j’ai terminé dans le top-3 (2e en 2019 et 4e à 0,5 sac du 3e rang en 2018) pour les sacs à mes deux dernières années donc je suis capable d’avoir une bonne production. Je pense aussi que ça s’explique par la personne que je suis, Danny voulait continuer d’être associé avec moi », a d’abord réagi Marion avant d’ajouter cette précision.  

« J’ai aussi l’impression qu’il sentait que d’autres clubs allaient me repêcher. Mon agent leur a expliqué que j’allais sans doute sortir plus haut que les listes prévoyaient. »

Son potentiel s’est confirmé lorsque son nom a été annoncé, virtuellement, jeudi soir. 

« Peut-être que ce n’était pas un nom dont tout le monde parlait. Mais, durant ma dernière année avec les Carabins, je peux vous dire que beaucoup de dépisteurs voulaient des informations à son sujet. Ça reste que c’est un joueur de six pieds quatre pouces et 253 livres. C’est un athlète ! Un ancien joueur de hockey qui a été coupé vers la fin dans la LHJMQ. Il bouge bien, il est capable d’imposer de la pression sur le quart et il devrait être capable de contribuer sur les unités spéciales. Je le connais assez bien pour vous dire qu’il va tout donner, il va porter ce chandail avec beaucoup de fierté. Je crois que ce sera un bon fit dans notre vestiaire et que les partisans vont l’adorer », a détaillé Maciocia vendredi.

Cette fierté se sent facilement dans la voix de Marion. Elle revient au cœur de plusieurs de ses réponses qu’il ne précipite point. 

« C’est encore très frais et ça s’est vraiment passé vite jeudi soir. Mon cellulaire a explosé quand mon nom est apparu. J’ai reçu toute une vague d’amour de la famille, de mes amis, d’entraîneurs, plein de beaux messages et j’ai l’intention de répondre à tout le monde. J’ai été choisi en même temps que plusieurs Québécois, c’était un repêchage spécial pour les Alouettes. J’arrive vraiment à un excellent moment avec les Alouettes, l’équipe se dirige dans la bonne direction », a commenté le gentilhomme. 

Marion s’inscrit dans le plan de Maciocia et de son entourage pour doter le club de ressources canadiennes de grande qualité sur la ligne défensive. Cette unité a affiché une carence à ce chapitre depuis quelques années. Toutefois, le numéro 44 des Carabins devra s’ajuster et répondre aux attentes pour y mériter un rôle qui ne se limite pas aux unités spéciales. 

« J’ai un bon gabarit, de longs bras et je suis assez rapide pour mon physique. Je vais tout donner pour me tailler un poste. En plus, j’aurai la chance de le faire avec du monde que je connais, ça ne pouvait pas tomber mieux. Je suis un gars qui veut gagner et qui veut ramener la fierté envers les Alouettes », a présenté Marion en parlant notamment de Brian Harelimana, Marc-Antoine DeQuoy, mais aussi de Frédéric Chagnon, Junior Luke et David Ménard qui l’a beaucoup aidé dans le processus du repêchage. 

Dans son cas, le processus ne sera pas toujours beau, mais ce ne sera jamais sa spécialité. 

« Les gars me taquinaient beaucoup sur le fait que mes sacs étaient réussis uniquement avec mes efforts et avec peu de style. Mais c’est ainsi que je joue, j’ai une approche de tout donner pour chaque jeu. Mon moteur n’arrête jamais », a-t-il admis avec une populaire expression sportive anglophone.  

Il ne l’a pas réalisé cette semaine, mais Marion se félicite plus que jamais d’avoir choisi le football au lieu du hockey. Invité au camp des Remparts de Québec en 2012-2013, une saison qui regroupait Nikita Kucherov, Mikhail Grigorenko et Anthony Duclair.  

« Il y avait ces gars de haut calibre qui sont dans la LNH. J’ai fini par me retrouver dans le Junior AAA et c’est là que j’ai commencé à réaliser que j’avais moins de plaisir et que j’aimais de plus en plus le football. Je jouais à peine quelques minutes par partie et on me demandait de me battre », s’est rappelé Marion.  

« Je me souviens que c’est Tony Iadeluca (son entraîneur à Grasset) qui a eu une grande influence sur moi. Il m’a dit que si j’arrêtais de jouer au hockey, je pourrais avoir une carrière professionnelle au football. Il a été l’un des premiers à me le dire et à croire en moi », a remercié le colosse. 

À l’écouter, on comprend que sa passion pour le football ne s’envolera pas de sitôt. Par contre, advenant que son rendement ne soit pas au rendez-vous au niveau professionnel, il pourra se tourner vers ses études. Une avenue qui était moins facile à concilier avec le hockey.