Les Alouettes n’ont absolument pas d’excuse à offrir pour leur prestation décevante de vendredi, face aux Lions de Colombie-Britannique.

Fraîchement revenus d’une semaine de congé, ravivés par une récente séquence de deux victoires, et faisant face à des adversaires qui sont des candidats tout désignés à chiper la troisième place disponible dans l’Est en vue des éliminatoires (en vertu du règlement du croisement), les hommes de Mike Sherman avaient toutes les sources de motivation possibles. Qui plus est, les Als affrontaient une équipe qui n’avait remporté aucun de ses matchs à l’extérieur jusqu’à présent cette saison, et qui n’avait jamais enligné deux victoires en 2018.

Rajoutons à tout cela le fait que le quart partant des Lions Travis Lulay s’est fait sortir du jeu après deux jeux offensifs et que c’est le réserviste Jonathon Jennings qui a pris sa place. Il est vrai que Jennings est une police d’assurance intéressante en tant qu’ancien partant, mais ce n’est qu’un des ingrédients faisant en sorte que les Alouettes auraient dû être beaucoup plus convaincants qu’ils ne l’ont été.

Si le ballon est mal protégé, disons que la protection du quart faisait aussi défaut depuis deux matchs. Contre Ottawa, cinq sacs avaient été concédés. Vendredi contre les Lions, ce chiffre fut surpassé avec sept sacs du quart. Difficile de remporter un match de football dans ces circonstances!

C’est certain que le premier réflexe après un sac du quart sera de pointer du doigt les membres de la ligne offensive – je sais de quoi je parle! Mais ceux qui suivent attentivement le football savent que plusieurs facteurs peuvent expliquer qu’un sac ait été réalisé par la défense adverse. Vendredi, on les a toutes vues.

Il est arrivé que les joueurs de ligne à l’attaque se fassent carrément battre de vitesse. Il est arrivé que Pipkin n’arrive pas à décoder la couverture défensive des Lions, le forçant à conserver le ballon trop longtemps et à se faire rabattre au sol. Il est arrivé que les receveurs des Als n’arrivent pas à se démarquer, plaçant Pipkin dans une situation délicate. Et finalement, il est aussi arrivé que le porteur de ballon rate son bloc et que le sac provienne du joueur qui était sous sa responsabilité.

Voici quatre façons différentes d’encaisser un sac qui sont survenues dans la défaite de vendredi. L’idée n’est pas de sermonner les coupables, mais plutôt de faire comprendre qu’avec autant de jeux négatifs, les probabilités de l’emporter diminuent drastiquement.

Les chiffres compilés sont clairs : pour chaque séquence offensive durant laquelle aucun sac du quart ne survient, l’attaque possède 20 % de chances d’inscrire un touché. Lorsqu’un sac est concédé, ce n’est plus que 5 % de chances. C’est flagrant et c’est prouvé : dans le football à trois essais, ça ne pardonne pas.  

La défense des Lions a dominé

On en avait glissé un mot durant l’avant-match; cette unité défensive des Lions s’est considérablement améliorée depuis quatre ou cinq matchs. Ils créent des revirements et appliquent de la pression sur les quarts. Cette tendance s’est poursuivie au Stade Percival-Molson, au grand dam des Alouettes.

Les Lions ont eu une belle complémentarité entre leurs paliers défensifs. La tertiaire, avec ses couvertures serrées, enlevait à Antonio Pipkin sa première lecture de jeu. Le front défensif des Lions, lui, s’ajustait en conséquence et lui retirait aussi ses deuxième et troisième options. C’était suffoquant pour le jeune quart.

Si l’équipe de Wally Buono doit être félicitée pour son exécution du plan de match, on ne peut pas adresser de félicitations aux entraîneurs montréalais pour leurs sélections de jeux dans un match aussi chaudement disputé. Pour une raison que je m’explique mal, il y a eu un manque cruel d’équilibre entre le jeu aérien et la course. Comment on a-t-on pu croire que ce serait une stratégie efficace que de débuter le troisième quart avec sept jeux de passes consécutifs alors qu’en première mi-temps, la passe n’a permis d’engranger que 73 verges, en plus de mener à cinq sacs et deux interceptions?

À 10-6 au score à la mi-temps, le scénario n’appelait pas au football de rattrapage, mais plutôt au calme.

J’écris souvent dans mes chroniques qu’il faut aller plus loin que les chiffres eux-mêmes pour décortiquer les statistiques. La feuille de match d’hier démontre que l’attaque des Als se résume en 22 passes et 19 jeux de course. C’est toutefois loin d’être un portrait fidèle de la situation.

Ajoutons sept sacs du quart à ce nombre, et on est déjà à 29 jeux de passe appelés. Sur les neuf courses de Pipkin comptabilisés parmi les 19, j’en dénote au moins six qui sont le fruit de jeux improvisés qui à la base auraient dû être des passes. On tombe maintenant à 35 jeux de passe tentés. De vraies courses de porteur ballon, il n’y en a eu que neuf! Dans un soir où il est évident pour tout le monde que le quart en arrache et que les receveurs peinent à se démarquer, c’est inconcevable.

Si les jeux appelés m’ont laissé pantois par moments, on s’aperçoit aussi plus que jamais qu’il manque un marchand de vitesse à l’attaque montréalaise. L’adversaire ne semblait pas trop stressé dans sa couverture homme à homme. Il n’y avait pas inquiétude, sachant qu’il n’y a pas de vrai « frappeur de coup de circuit ». Ce Chris Williams qui garde la tertiaire sur le qui-vive. Ça s’est vu plus tôt cette saison avec ce même Williams, en Saskatchewan. Il a connu le match de sa saison parce que les Roughriders s’entêtaient à privilégier la couverture homme à homme, dont le rapide receveur s’est moqué. Vendredi, les Lions n’avaient pas cette crainte. Et lorsque les Als présentaient leur couverture homme à homme, les visiteurs arrivaient à s’en défaire grâce à l’homme de confiance des quarts, Bryan Burnham.

Sans vouloir m’acharner, un mot en terminant pour souligner à quel point les chiffres offensifs compilés en deuxième demie ont été anémiques. Un total de quatre premiers jeux et de 22 verges par la passe. Dix-neuf jeux au total pour une récolte nette de 25 verges et un temps de possession de 10 minutes… De tout le match, les Als ne sont jamais entrés à l’intérieur de la ligne de 20 des Lions. Bref, c’était pitoyable, et je ne me souviens pas de la dernière fois que l’attaque a été aussi anémique durant une demie.

La défense, dans tout ça, ne doit pas essuyer trop de critiques, même s’il est tentant de les écorcher pour la récolte de 32 points des Lions.

Pourtant, si on retire les 14 points inscrits sur des interceptions ramenées pour la majeur, et le touché de sûreté concédé, on soustrait déjà la moitié de la production des visiteurs. Et lorsqu’on considère que 10 autres points ont été alloués après que Pipkin ait lancé ses deux autres interceptions, il ne reste plus grand-chose qu’on puisse reprocher à la défense, si ce n’est que d’avoir permis aux Lions de prolonger quelques séquences ici et là, en deuxième demie. Ç’a eu un impact négatif sur le temps de possession, et sur la possibilité pour l’attaque de se donner un tant soit peu de rythme.

* propos recueillis par Maxime Desroches