MONTRÉAL – « Après ce match, je me souviens d’avoir pleuré dans les bras de ma mère! Quelques années plus tard, je peux en rire, mais il m’a fait pleurer ce gars-là pendant qu’on mangeait au Cosmos sur Grande Allée. »
Matthieu Proulx est drôlement souriant, et honnête, en racontant cette anecdote. Ça s’explique puisque, contre toute attente, son bourreau d’un jour, Dave Stala, est devenu l’un de ses meilleurs amis quand ils ont abouti, ensemble, avec les Alouettes de Montréal.
Mais, à cette époque, Proulx en était à sa première année comme partant avec le Rouge et Or de l’Université Laval et il ne s’attendait jamais à se faire malmener par ce redoutable receveur qui agissait aussi comme botteur.
« Ça faisait deux matchs que je dominais, je jouais super bien. Et là, Saint Mary’s est arrivé à Québec, j’étais le demi défensif devant lui et il m’a mangé tout rond! Quand je dis tout rond, ils ont gagné et il a pratiquement réussi tous les points de son équipe. Il a tout fait sur le terrain et tout à mes dépens », a retenu Proulx (voir le touché du 88 à partir de la 13e seconde dans la vidéo).
Le Rouge et Or nous a aidés à retracer les statistiques du match. Dans un gain de 26-24, Stala avait inscrit 20 points (6 via un touché contre Proulx, 12 via 4 placements et 2 grâce à des transformations) tout en captant 4 passes pour 84 verges.
« J'étais au top du monde, je me disais pratiquement que j’allais être une vedette. Et là, il passe et il me casse! Je me suis mis à travailler encore plus fort et à être plus humble », a confié Proulx alors que cette dose d’humilité n’était que le premier impact de Stala sur sa vie.
Trois ans plus tard, les Alouettes ont repêché Proulx dès le cinquième rang et il n’a pas tardé à rejoindre le club alors que Stala était un receveur à l’aube d’exceller.
Malgré ce qui s’était produit sur le terrain du PEPS, les deux hommes sont devenus de très grands copains. Si ça peut sembler étonnant à première vue, en écoutant Proulx parler de Stala, on comprend à quel point il devait être attachant.
« Dave était un coéquipier complètement fou! Il ne prenait rien au sérieux. Pour lui, la vie, c’est un trip, c’est le fun. Il s’amuse tout le temps, il est souriant et il fait rire tout le monde. C’est le gars qui fait des blagues sans arrêt », a décrit Proulx en ajoutant une précision cruciale.
« À la limite, pour des entraîneurs, ça peut devenir tannant parce que c’est un bouffon, mais c’est aussi le gars qui connaît tous les tracés de tous les jeux et pour toutes les positions. T’as besoin de quelqu’un pour jouer n'importe où comme receveur, il va le faire. Tu peux le mettre comme quart-arrière, il saura quoi exécuter. Il était aussi le botteur réserviste. Bref, il connaît le foot sur le bout de ses doigts donc tu peux difficilement lui reprocher quoi que ce soit parce qu’il ne se trompait jamais », a vanté celui qui a d’ailleurs un fabuleux parcours (joueur, avocat, analyste, descripteur et animateur) axé sur la polyvalence.
On arrive au croustillant, aux nombreuses anecdotes vécues auprès de celui qui était surnommé « Sticky » Stala car tout collait à ses mains.
« Une année, dans le vestiaire, il avait reproduit un terrain de basket avec du ruban et il avait installé des paniers. On jouait ensemble et il avait aussi apporté des quilles une autre fois », a poursuivi l’ancien numéro 20 des Alouettes.
« Notre coéquipier et ami Shaun Diner avait un toc (un trouble obsessionnel compulsif) et le chiffre qu’il devait toujours suivre, c’était le 4. Avant un match, il prenait une photo et lui donnait 4 becs ou 14 becs. Quand on faisait un exercice, il faisait toujours 4, 14 ou 24 répétitions. Dave allait toujours foutre le bordel dans son casier juste avant les pratiques. Quand on sortait des réunions, on était pressés pour aller sur le terrain, mais il ne pouvait pas partir si son casier était à l’envers. Ça le faisait capoter et il devait tout remettre en ordre », a noté Proulx.
Proulx reconnaît toute la valeur d’un tel coéquipier.
« Dans un contexte sportif, d’avoir un gars qui est capable de faire rire les autres constamment puis de détendre atmosphère, c’est le meilleur que j’ai pu avoir. Chaque journée, il se lève et se demande comment il peut faire rire les autres aujourd’hui et s’amuser », a louangé Proulx qui ne veut pas perdre cette précieuse amitié.
Au-delà de divertir ceux qui l’entourent, Stala a inspiré plusieurs personnes dont Proulx.
« Ouais, vraiment. Quand tu le rencontres, tu penses que c’est le plus grand bouffon que tu as connu. Mais, quand on s’entraînait, il était hyper investi et il était le premier à pousser les autres. Étant donné qu’il était receveur, on s’entraînait souvent ensemble l’un contre l’autre », a convenu Proulx qui juge avoir pu trouver un bel équilibre entre sa carrière d’athlète et le plaisir.
« Je me suis toujours dit que si j’avais moins fait la fête, j’aurais pu prolonger ma carrière d’une ou deux saisons. Je ne veux pas que les gens pensent que je sortais tous les jours, mais j’en ai profité. En fin de compte, ça ne me dérange pas considérant tout le plaisir que j’ai eu et Dave a fait partie d’un grand bout de ce parcours. Il a été un partenaire parfait parce qu’on s’amusait, mais on s’entraînait pour être en forme », a admis Proulx au sujet du farceur qui excellait à n’importe quel sport auquel il touchait.
Né en Pologne, Stala a appris à mordre dans la vie et à redonner aux autres. Proulx l’avait d’ailleurs accompagné une année à Halifax où il tenait un camp de football pour les jeunes.
« Il a vraiment eu une influence positive. Quand je pense à des gens inspirants, c’est le gars qui me vient en tête et c’est un personnage spectaculaire. Il a été un très beau modèle chez les professionnels », a conclu Proulx qui invite les gens à voir ou revoir l’une de ses célébrations amusantes et impressionnantes.