TROIS-RIVIÈRES – En 2020, Christophe Normand ressentait un mélange de frustration et de déception envers la LCF qui venait d’annuler la saison en raison de la pandémie. Il a décidé de transformer ce sentiment négatif en du positif. 

Le moyen d’y parvenir était plutôt inusité, il a entamé le processus de s’enrôler dans l’armée. Il agira en tant qu’officier d’infanterie. 

« Je suis avec la Réserve et j’aime vraiment ça. Je retrouve tout ce que je connais au football comme l’esprit d’équipe et le travail de groupe », a confié Normand, mercredi, après deux séances d’entraînement au camp des Alouettes. 

Retenu par sa dernière formation du printemps avec l’armée, Normand avait été exempté des premiers jours du camp à Trois-Rivières. Au final, il n’a rien manqué puisque le conflit entre les joueurs et les dirigeants de la LCF a provoqué une première grève depuis 1974. 

Pour les prochains mois, il se concentrera sur le football. 

« Je vais m’impliquer quand je peux, quand je suis disponible. C’est la beauté de la Réserve, c’est trippant », a noté le centre-arrière. 

Après six saisons dans la LCF, Normand débarquait dans ce nouvel environnement avec une condition physique plus qu’enviable. 

« C’est beaucoup plus difficile qu’un camp de la LCF. Et ce, même que si la formation pour les recrues est plus facile que les formations régulières », a précisé celui qui avait été attiré par cet aspect. 

« Je m’étais donné ce défi, je savais que c’était exigeant physiquement. Je recherchais quelque chose de similaire au football. C’est aussi venu me chercher par le fait qu’on est en gang, qu’on doit compter sur tes collègues et qu’il faut faire preuve de résilience », a expliqué l’athlète de 30 ans. 

Normand n’irait pas jusqu’à dire qu’il a l’impression de se la couler douce au camp des Alouettes, mais ça se voit que sa préparation physique est optimale. 

Plus il avance dans le processus, plus il se voit travailler dans ce milieu à sa retraite du football. Il s’agit d’une autre corde à son arc alors qu’il a aussi œuvré en enseignement. 

Son parcours au football intrigue, bien sûr, ses nouveaux partenaires. 

« Ouais, j’ai quelques anecdotes à conter. Les gars trippent sur ça, certains m’ont dit qu’ils y avaient pensé », a répondu l’ancien du Rouge et Or de l’Université Laval. 

Des alliés inestimables pour Byron Archambault 

Débrouillard comme il l’est, Normand constituait déjà une ressource précieuse pour les Alouettes. Ce constat s’est amplifié avec la démission tardive de Jeff Reinebold à titre de coordonnateur des unités spéciales. 

Propulsé en relève, Byron Archambault peut, au moins, compter sur quelques vétérans comme lui, Alexandre Gagné et Kerfalla Exumé.
 
« C’est certain que Byron a dû se revirer sur un dix sous. C’est un gros défi pour lui, mais on s’est serrés les coudes. On est plusieurs Québécois, des vétérans, sur les unités spéciales et on va passer à travers », a admis Normand. 

Voici comment il a décrit le portrait actuel. 

« Le football, ça revient un peu aux mêmes concepts et on emploie pratiquement les mêmes jeux. Donc on peut s’autocorriger sur plusieurs petits détails. Par exemple, dans les réunions, on se regroupe et on se dit ‘Regarde ceci, on devrait faire ça de telle façon...’ On parvient à discuter de certaines stratégies et se corriger au fur et à mesure », a exposé Normand.  

« Pendant ce temps, Byron peut prendre plus de temps pour enseigner aux plus jeunes. Les vieux, on peut se débrouiller. Bref, ça crée une dynamique intéressante car c’est clair qu’il a beaucoup de pain sur la planche », a-t-il enchaîné. 

Pas évident de rallier tous les Américains

La présence de vétérans comme Normand a également été précieuse pour ses coéquipiers dans le conflit qui a opposé les joueurs aux dirigeants du circuit. 

L’un des grands enjeux était de protéger le ratio de joueurs canadiens. Cet élément ne peut guère mener à l’unanimité avec la prépondérance des Américains dans les équipes. Mais l’influence de Normand a pu aider des joueurs des États-Unis à mieux comprendre pourquoi les athlètes canadiens voulaient protéger leurs acquis.  

« Je le comprends, c’est leur jeu et leur pays. Je le respecte et je ne m’oppose pas à leur avis. Ils méritent d’être sur le terrain et de jouer également. Je suis à 100% de leur côté. Après tout, on est tous venus au Canada pour jouer », a commenté le demi défensif Rodney Randle fils. 

Par contre, d’autres Américains sont mécontents que le conflit se soit prolongé et ils n’ont pas hésité pas à critiquer l’insistance des Canadiens. 

« Dans notre équipe, on a une belle cohésion et je trouve ça vraiment cool d’entendre une opinion comme la sienne. Par contre, il y a eu des commentaires dans l’autre sens, dont ceux d’un joueur américain des Tiger-Cats qui n’a pas beaucoup de respect pour les joueurs canadiens. De garder 7 joueurs partants sur 24, on y tenait. Mais je trouve ça plaisant d’avoir des collègues qui respectent notre point de vue », a conclu Normand.