MONTRÉAL - Éliminé par les Flyers vendredi soir, le Canadien a quitté Toronto et la bulle dans laquelle il évoluait depuis un mois samedi après-midi pour rentrer à Montréal à bord du vol nolisé par l’équipe.

Une fois rencontrés par les entraîneurs et les membres de l’état-major pour dresser le bilan de la dernière saison et surtout des dernières semaines, Carey Price et ses coéquipiers devraient mettre aussitôt le cap vers leurs résidences permanentes pour aller y rejoindre leurs familles dont ils sont séparés depuis le début du mois de juillet.

Ce sera alors au tour de Marc Bergevin de jouer.

Fort de la progression évidente de Nick Suzuki et Jesperi Kotkaniemi qui ont prouvé être en mesure d’orchestrer les performances des premier et deuxième trios, le directeur général du Canadien doit maintenant prendre les moyens pour mieux les entourer.

Après avoir résisté aux pressions populaires qui le sommaient de dépenser à la limite permise par le plafond salarial au lieu d’épargner des millions $ comme il l’a fait au cours des dernières années, Marc Bergevin est solidement campé pour passer à l’attaque.

Que ce soit par le biais du marché des joueurs autonomes ou par celui des transactions, Bergevin peut maintenant identifier des cibles aux quatre coins de la LNH et partir à la chasse.

Avec l’espace dont il profite sous un plafond salarial qui stagnera ou grimpera très légèrement au cours des deux, trois, voire cinq prochaines saisons et les choix au repêchage – 25 lors des deux prochaines saisons – dont il dispose, le Canadien peut frapper aux portes des clubs pris à la gorge financièrement et leur offrir de les « aider »...

Imiter les Canucks

En fait, le Canadien se retrouve aujourd’hui dans la même position qu’occupaient les Canucks de Vancouver l’an dernier.

Avec l’émergence d’Elias Pettersson, la confirmation que Brock Boeser était bel et bien capable d’assumer un rôle de franc-tireur dans la LNH et l’arrivée de Quinn Hughes, les Canucks avaient besoin d’expérience et de leadership pour aider les Bo Horvat, Antoine Roussel et Alex Edler à encadrer l’une des meilleures jeunes équipes de la Ligue.

Ils ont donc frappé à la porte du Lightning de Tampa Bay. Déjà à bout de souffle financièrement et avec Brayden Point sur le point de passer à la banque, le Lightning ne pouvait pas vraiment garder J.T. Miller à qui il avait consenti un contrat de 5 ans et 26,25 millions l’été précédent.

Les Canucks leur ont offert de l’aide : ils ont acquis Miller et son contrat qu’il pouvait facilement se permettre en retour de choix au repêchage – le 3e de l’an dernier et le premier de la prochaine séance – en plus des droits sur le gardien Marek Mazanec qui, à 29 ans, est de retour en Tchéquie.

Les Canucks ont aussi ajouté Tyler Myers et Michael Ferland par le biais du marché des joueurs autonomes.

Cette équipe a progressé tout au long de la saison au point ou le directeur général Jim Benning a décidé d’offrir à son coach et à ses joueurs Tyler Toffoli à la date limite des transactions.

Et voilà que les Canucks viennent d’éliminer les Blues de St.Louis, champions en titre de la coupe Stanley, dès la première ronde et qu’ils sont les derniers représentants du Canada en séries éliminatoires à l’aube d’une deuxième ronde qui les opposera aux Golden Knights de Las Vegas.

« Le repêchage demeure la clef numéro un pour bâtir une équipe », a une fois encore insisté Marc Bergevin dans le cadre du point de presse qu’il a tenu pour clore l’aventure de son équipe en séries éliminatoires.

« Mais je suis prêt à prendre les moyens nécessaires pour améliorer notre équipe. Nous avons de l’espace sous le plafond, c’est vrai. On en a peut-être moins que plusieurs observateurs le croient parce que nous devons garder de l’argent pour payer nos jeunes qui grimpent et garder des vétérans qui profiteront bientôt de l’autonomie complète. Je dois donc être responsable dans la gestion de ma masse salariale. Il est hors de question de dépenser simplement pour dépenser. Mais oui, nous avons des moyens à notre disposition. Cela dit, avec toute l’incertitude qui nous guette alors qu’on ne sait pas quand la prochaine saison commencer et quand nos partisans pourront revenir dans les gradins, il est très difficile de prévoir à quoi ressembleront le marché des transactions et celui des joueurs autonomes au cours des prochains mois », a expliqué Marc Bergevin.

Garder Lafrenière dans la mire

En battant les Penguins de Pittsburgh en ronde de qualification, le Canadien de Montréal s’est privé du privilège de participer à la loterie Alexis Lafrenière. Une loterie qu’il aurait eu 12,5 % de chances de gagner – des chances égales pour les huit équipes en lice – mais que les Rangers de New York ont finalement remportée.

En accédant aux séries, le Canadien s’est aussi privé de la neuvième sélection en première ronde dont il aurait hérité. Une sélection qui a maintenant glissé au 16e rang en raison de sa participation en séries.

Malgré cette glissade, Marc Bergevin considère que l’expérience a grandement valu le coup.

« Le bilan que l’on présente aujourd’hui est bien meilleur que celui que nous aurions présenté à la fin de la saison si nous avions été exclus des séries après une saison normale. Les progressions de Nick Suzuki et Jesperi Kotkaniemi permettent de voir qu’on peut maintenant compter sur deux solides jeunes joueurs de centre qui seront avec nous pour les 10 ou 15 prochaines années. Sans oublier que d’autres jeunes comme Alexander Romanov et Cole Caufield s’en viennent », a commenté Bergevin.

Bien que les Rangers aient gagné la loterie Lafrenière, rien n’empêche le Canadien de frapper à la porte des Blue Shirts pour tenter d’obtenir cette sélection. Ça coûterait cher. Très cher même. Mais le Canadien doit tout faire pour au moins tenter de titiller les Rangers.

Questionné sur cette éventualité, Marc Bergevin s’est contenté de sourire. Il a tenté quelques amorces de réponses avant de finalement envoyer la balle dans le camp ennemi. « Si les Rangers sont intéressés à bouger, qu’ils nous appellent », a finalement répondu Bergevin.

C’est bien évident que le DG du Canadien n’allait pas déclarer publiquement que oui, il ferait des pieds et des mains pour convaincre les Rangers de lui échanger le tout premier choix de la cuvée 2020. Mais Marc Bergevin doit quand même tout faire pour tenter d’y arriver.

Quant à la baisse de huit rangs qu’il encaisse en première ronde – de neuf à seize – Bergevin assure qu’elle ne représente pas un trop gros handicap.

« Année après année, on voit des gars sortir en milieu de première ronde qui ont finalement de meilleurs résultats que des gars repêchés plus haut. Sans oublier qu’il est possible que le gars qu’on avait dans la mire au 9e rang puisse être encore disponible au 16e. On verra. Mais l’expérience que Suzuki et KK ont acquise au cours des dernières semaines n’a pas de prix. Nos jeunes et le reste de l’équipe aussi ont prouvé que nous avions raison de croire en nos chances d’éliminer les Penguins et même de sortir Philadelphie en première ronde. Ce qu’on vient de vivre va nous servir l’an prochain et pour bien des années encore », a plaidé Bergevin.

Julien de retour derrière le banc?

En terminant, Marc Bergevin est demeuré très vague sur la situation de son entraîneur-chef Claude Julien et la possibilité que Kirk Muller, qui a très bien fait en relève derrière le banc de l’équipe, puisse hériter du poste l’an prochain. Si Claude Julien n’est pas en mesure d’assumer son rôle en raison de son état de santé bien sûr.

« Il est bien trop tôt pour parler de ça. Claude va bien. Il est à la maison et il se repose. Après un malaise cardiaque comme celui qu’il a subi, il doit prendre tout le temps nécessaire pour se remettre. On va se parler au cours des prochaines semaines et on verra », a conclu le directeur général du Canadien.

Le printemps dernier, lors de la réunion des directeurs généraux qui se tenait en Floride quelques jours avant que la LNH mette la saison en pause en raison de la COVID-19, Marc Bergevin avait répondu : « Claude est derrière le banc. Il sera encore derrière le banc la saison prochaine et les autres qui suivront », lorsqu’on l’avait interrogé sur les chances qu’il congédie son entraîneur-chef en raison des insuccès de l’équipe qui s’acheminait vers une troisième exclusion des séries en quatre ans.

J’ai bien l’impression que c’est donc l’état de santé de Claude Julien et son désir de revenir, ou non, derrière le banc qui dictera la suite des choses dans le dossier de l’entraîneur-chef du Canadien. Un dossier sur lequel on reviendra s’il devient nécessaire d’y revenir. Ce qui est loin d’être le cas présentement.