Malgré la débâcle du Canadien face aux Oilers d’Edmonton et les doléances sévères que Michel Therrien a défilées après la performance, ou non performance c’est selon, de son équipe, la tenue de Jacob De La Rose a semblé apaiser la colère de l’entraîneur-chef du Canadien.

Du moins un peu.

Bien qu’il n’ait que 19 ans, bien qu’il ne disputait que son cinquième match en carrière dans la LNH, bien qu’il était toujours en quête de son premier but en carrière, c’est Jacob De La Rose que Michel Therrien a envoyé aux côtés de Max Pacioretty pour écouler la pénalité écopée par Tomas Plekanec.

Avec une mince avance d’un but à défendre, avec tout juste deux minutes à faire à la troisième période, De La Rose s’est retrouvé sur la patinoire devant bien d’autres joueurs qui auraient pu, voire dû, le devancer.

Pourquoi avoir affiché ainsi une telle confiance en De La Rose ? «Parce qu’à ce point dans le match, j’ai fait appel aux joueurs qui méritaient d’être envoyés sur la patinoire», a simplement convenu Michel Therrien après la rencontre.

Efficace dans plusieurs facettes du jeu, intelligent dans sa lecture des poussées adverses et sa façon de contrecarrer les attaques ennemies, De La Rose méritait pleinement ce mandat important accordé en fin de rencontre. Un mandat qu’il a relevé avec brio puisque c’est après la sortie de Plekanec du banc des pénalités et après que le vétéran eu bousillé une attaque en zone des Oilers alors que Viktor Fasth était au banc à la faveur d’un sixième attaquant qu’Edmonton a nivelé les chances.

La présence de De La Rose sur la patinoire en fin de rencontre jeudi a rappelé sa présence en prolongation, mardi, face aux Flyers de Philadelphie alors que le jeune Suédois a réalisé un jeu défensif – tir bloqué de Vincent Lecavalier – qui a ensuite conduit au but victorieux marqué par David Desharnais quelques 30 secondes plus tard.

Dans ces circonstances, doit-on se surprendre d’avoir vu Michel Therrien récompenser son jeune joueur de centre en lui confiant le mandat de pivoter le troisième trio à la place de Lars Eller qui s’est retrouvé sur le flanc gauche lors de l’entraînement vendredi?

Certainement pas. Croisé dans le vestiaire du Canadien après le revers gênant aux mains des Oilers d’Edmonton, Max Pacioretty a d’ailleurs assuré que ces mandats offerts par l’entraîneur-chef au jeune attaquant étaient loin de passer inaperçus autant sur le banc que dans le vestiaire.

«C’est évident qu’on s’en rend compte. Et je te dirais que Jacob mérite pleinement cette confiance qu’on lui affiche. Depuis le premier jour de son premier camp d’entraînement, il m’impressionne par la maturité qu’il affiche en dépit de son jeune âge. Une maturité sur et hors de la patinoire. On répète souvent que les bonnes équipes profitent de la compétition interne pour mettre sur la glace les meilleures formations possible. On doit donc se réjouir de voir un gars comme Jacob venir mettre la pression sur le reste du groupe. D’autres l’ont fait avant lui. D’autres devront le faire après lui. C’est comme ça qu’on bâtit une bonne équipe de hockey et qu’on l’améliore. Une chose est sûre : la qualité de ses performances et l’importance que les coachs lui accordent sont remarquées par tous les membres de l’équipe», a défilé celui qui agit de plus en plus comme le capitaine du Canadien.

Calme et patience

Pas question ici de partir en peur. Pas question de crier sur tous les toits que le Canadien vient de faire la trouvaille de l’année et que Jacob De La Rose est à Montréal pour y rester.

Ça non !

Mais comme l’a fait Dale Weise à plusieurs occasions depuis qu’il s’est joint au Canadien il y a un an, et plus particulièrement comme l’ailier droit l’a fait alors qu’il s’est retrouvé au sein du premier trio avec Desharnais et Pacioretty, Jacob De La Rose est en train de se faire un nom, et une place au sein du vestiaire, en mettant de la pression sur des coéquipiers qui sont aussi un brin ou deux des ennemis. Des ennemis qu’il doit surclasser s’il veut se faire une niche sous les gradins et la glace sur Centre Bell.

Michel Therrien a avisé tous les observateurs et partisans après l’entraînement : «Ne vous fiez pas à ce que vous avez vu pendant la pratique pour conclure que les trios sur la glace aujourd’hui seront les mêmes lors du match de demain.»

En passant, ce sont les Maple Leafs de Toronto qui n’affichent que quatre victoires à leurs 25 derniers matchs qui feront escale au Centre Bell samedi.

Mais au-delà l’appel au calme qu’il s’est senti obligé de formuler après l’entraînement, Michel Therrien a malgré tout offert un avant-goût de ce que l’organigramme de son attaque pourrait avoir l’air dans un avenir plus ou moins rapproché.

Car ce que Jacob De La Rose est en train de dire à Michel Therrien, ses adjoints, et surtout son patron Marc Bergevin, c’est qu’il s’approche rapidement de la grande ligue. Ce faisant, il avise l’état-major du Canadien que Lars Eller peut maintenant servir de monnaie d’échange dans la quête du Tricolore d’aller chercher du renfort à la ligne bleue et/ou un attaquant susceptible de donner plus de punch offensif sur le flanc droit.

Marc Bergevin est muet comme une carpe quant aux discussions et négociations qu’il mène de front avec plusieurs de ses homologues de la LNH.

Autour de la LNH, ses homologues le sont moins. C’est ce qui a permis à nos collègues de TSN – Pierre Lebrun, Darren Dreger et Bob McKenzie – de déterminer que Lars Eller justement ainsi que le défenseur Alexei Emelin sont présentés comme appâts par le Canadien aux équipes avec lesquelles Bergevin aimerait transiger.

Est-ce que De La Rose est prêt ?

Sans doute pas complètement. Et c’est normal. Mais contrairement à Nathan Beaulieu en début de saison, contrairement à Jarred Tinordi qui peine encore à convaincre l’état-major du Tricolore en dépit du fait qu’il évolue dans la Ligue américaine, Jacob De La Rose donne des signes évidents qu’il est prêt… ou sur le point de l’être.

Ce qui est une très bonne nouvelle pour le Canadien et ses fans. Ce qui est une moins bonne nouvelle pour Lars Eller qui, au lieu de profiter de la pression que lui applique De La Rose pour hausser son niveau de jeu, semble en train de casser sous cette pression.

Après cinq matchs avec le Grand Club, Jacob De La Rose est toujours en quête d’un premier but. Il revendique une passe. Et s’il a bien paru lors des deux dernières rencontres, ses premiers coups de patin ont été plus ardus comme le confirme le différentiel de moins-2 accumulé lors de sa toute première rencontre dans la LNH, il y a dix jours face aux Sabres de Buffalo.

L’important pour De La Rose – excusez l’analogie, mais quand j’écris ce petit bout de phrase je ne peux m’empêcher de fredonner l’un des grands succès de Gilbert Bécaud : l’important c’est la rose. Les plus vieux comprendront… – et le Canadien est la progression que le jeune joueur affichera au cours des prochaines rencontres. Une progression qui aura un impact important sur l’avenir à court terme du jeune Suédois avec le Canadien, mais aussi sur l’avenir à court terme de quelques autres joueurs de l’organisation : à commencer par celui de Lars Eller.

L’autre grande question qu’une implication hâtive et continue de De La Rose entraînera sera : si le Canadien contrevient à sa politique de développer lentement mais sûrement ses jeunes de talent comme le dont les Red Wings de Detroit par exemple pour faire une place à De La Rose immédiatement, vaudrait-il la peine de tenter le même coup avec Charles Hudon qui est de presque un an plus vieux que son ancien coéquipier Suédois des Bulldogs et qui connaît une bien meilleure saison – du moins sur l’aspect statistiques offensives personnelles – que De La Rose à Hamilton ?