En attendant de mettre la main sur du renfort qui prendra place sur le banc de son équipe, le directeur général Marc Bergevin en a déniché pour venir se dresser derrière le banc : Kirk Muller revient à Montréal. Le « Capitaine Kirk » revient avec le Canadien.

Après un exil de cinq ans, Kirk Muller rentre au Centre Bell par la grande porte à titre d’entraîneur-associé de Michel Therrien. Durant cet exil, Muller a dirigé les Hurricanes de la Caroline et leur club-école à titre d’entraîneur-chef avant de se retrouver à St. Louis à titre d’adjoint à Ken Hitchcock.

Après deux saisons dans l’ombre de Hitchcock, Muller voulait plus que le contrat d’un an que lui a offert Doug Armstrong à titre de second à Ken Hitchcock. Muller a dit non merci et s’est mis à chercher une nouvelle destination vers laquelle mettre le cap autour de la LNH.

On saura bien un jour si Marc Bergevin avait déjà sondé le terrain ou s’il a simplement réagi avec vitesse et doigté dès qu’il a appris que Muller tournait le dos aux Blues et au contrat d’un an qu’ils offraient.

Peu importe les circonstances entourant l’embauche de Muller, cette embauche est importante. Très importante même. Elle représente un aussi gros coup pour le Canadien que l’arrivée d’un attaquant de premier plan par le biais d’une transaction, d’une embauche sur le marché des joueurs autonomes ou du repêchage.

Kirk Muller n’est pas David Backes, Troy Brouwer, Milan Lucic ou Andrew Ladd qui seront sans doute disponibles le 1er juillet prochain sur les étals du marché des joueurs autonomes. Il a déjà été un joueur aussi imposant qu’eux. Davantage même. Mais il ne l’est plus. Muller ne chausse plus non plus les patins d’un gars comme Steven Stamkos qui sera convoité par bien des clubs s’il décide de tourner le dos à Tampa et au Lightning.

C’est évident.

Mais en raison de son passé de joueur de premier plan, du type de joueur qu’il a été, de sa personnalité, du fait qu’il soit maintenant considéré comme un homme de hockey – un vrai – Muller commande le respect des joueurs et s’impose comme un allier de premier plan autour de l’entraîneur-chef qu’il seconde.

Attaque massive

À St. Louis, Kirk Muller s’occupait entre autres choses de l’attaque massive. Une des forces des Blues. Une des nombreuses faiblesses du Canadien.

Muller comptait sur un marqueur de la trempe de Vladimir Tarasenko à St. Louis et que Tarasenko complétait une brigade composée d’autres joueurs de premier plan. Il n’y a pas de Tarasenko à Montréal. Du moins pas encore. Mais avec les Pacioretty, Subban, Galchenyuk et Gallagher pour ne nommer que ceux-là, le Canadien devrait être meilleur qu’il ne l’a été au cours des deux dernières années en avantage numérique. Beaucoup meilleur même.

Maintenant qu’il est avec le Canadien, Muller servira un électrochoc à une attaque massive qui en a grand besoin. En souhaitant bien sûr que Michel Therrien lui confiera le mandat de faire de cette attaque passive une vraie attaque massive. Une décision qui devrait aller de soi. Du moins il me semble…

Courroie de transmission

Muller apportera bien plus au Canadien que la relance de l’attaque à cinq. Il deviendra illico la courroie de transmission entre le vestiaire et le bureau de l’entraîneur-chef. Une courroie qui a cassé le jour ou Gerard Gallant a quitté le Canadien pour hériter du rôle d’entraîneur-chef des Panthers de la Floride.

Michel Therrien a de grandes qualités comme entraîneur-chef. Sa capacité d’entretenir des relations étroites avec ses joueurs ne fait pas partie de cet éventail de qualités. Comme plusieurs autres entraîneurs-chefs autour de la LNH, Therrien n’est pas un «players coach» comme on le dit dans le jargon du hockey. Il a donc grand besoin d’un adjoint justement en mesure de gérer le vestiaire. De calmer les tempêtes, de faire comprendre les messages qui passent moins bien que les autres. Autant les messages du coach à l’endroit de ses joueurs que ceux des joueurs à l’endroit de leur coach.

Lorsque j’ai croisé Kirk Muller près du vestiaire des Blues alors qu’ils tentaient d’éliminer les Stars de Dallas pour passer en finale de l’Ouest, « Captain Kirk » m’expliquait qu’il remplissait exactement ce rôle dans le vestiaire des Blues. Dans les catégories des coachs qui passent de travers dans la gorge de leurs joueurs, Ken Hitchcock est dans une classe à part. Si Muller a su contenir les mutineries pendant les deux années passées à St. Louis, s’il a été en mesure d’obtenir que les joueurs jouent et gagnent pour l’équipe même s’ils n’avaient rien à cirer de leur coach – et qu’ils souhaitaient même son départ – il devrait être plus efficace encore dans ce rôle à Montréal considérant que Therrien est moins bourru que le vieux Hitchcock.

Que ce soit comme chef d’orchestre de l’attaque massive ou encore comme « parrain » des joueurs dans le vestiaire, Muller qui a déjà rempli ce double-rôle avec le Canadien alors que Jacques Martin était à la barre de l’équipe entre 2010 et 2011 prendra la relève de Jean-Jacques Daigneault et Daniel Lacroix.

Daigneault et Lacroix demeurent avec l’équipe.

Daigneault aura encore le mandat de contenir les élans de P.K., de ménager les jambes de Markov, de maximiser le rendement de Petry et de développer les jeunes afin que la brigade défensive puisse bien seconder Carey Price ou protéger celui qui lui viendra en relève de temps en temps.

Lacroix verra sans doute son rôle changer puisque Muller héritera de mandats qui étaient un brin ou deux les siens depuis qu’il s’est joint au Canadien. Mais Lacroix peut difficilement maugréer. Car avec un Kirk Muller qui était disponible, Marc Bergevin et le Canadien devaient lui offrir les responsabilités et la sécurité qu’il exigeait pour revenir chez lui dans le giron du Canadien.

Muller entraîneur-chef?

La grande question maintenant : avec Muller en poste à titre d’entraîneur-associé, Michel Therrien doit-il déjà sentir la pression? Doit-il sentir que son congédiement souhaité par plusieurs pendant et après la dernière saison, sera maintenant exigé au moindre signe d’effondrement du Canadien la saison prochaine. Et je ne parle pas ici d’une séquence de 10 revers de suite, mais bien de trois ou quatre matchs sans victoire…

S’il a pu survivre à la pire débandade de l’histoire du Canadien l’hiver dernier, c’est bien sûr parce que la blessure de Carey Price représentait une énorme bouée de sauvetage pour le coach du Tricolore.

Le vote de confiance de Marc Bergevin a aussi aidé.

Mais le fait qu’il n’y avait pas de candidat au sein même de l’organisation pour assumer ne serait-ce que l’intérim a aussi grandement aidé la cause de Michel Therrien.

Kirk Muller a déjà été entraineur-chef dans la LNH. Il tient à le redevenir un jour. Est-ce que le fait qu’il ne parle pas français est un obstacle qui le séparera à jamais du poste d’entraîneur-chef du Canadien?

Est-ce que, au contraire, son passé de capitaine du Canadien, sa conquête de la coupe Stanley en 1993, son amour pour Montréal, le Canadien et ses fans, et surtout l’amour des partisans – des deux langues – à son endroit pourraient surmonter la barrière de la langue?

Ma réponse à cette deuxième question est oui.

L’entraîneur-chef du Canadien de Montréal doit parler français. C’est indéniable. Mais j’ai toujours maintenu que si un candidat comme Mike Babcock était disponible, il faudrait songer à adoucir cette règle pour des considérations sportives.

J’ajouterais le nom de Muller sans retenue.

Mais bon! Pour l’instant, Kirk Muller se joint au Canadien à titre d’associé à Michel Therrien. Je suis convaincu que Muller l’épaulera avec toute l’énergie, les connaissances et la loyauté dont il dispose.

Mais avec l’embauche de Kirk Muller, le Canadien a maintenant sous la main un candidat de premier plan si jamais un changement d’entraîneur-chef devient un jour nécessaire.

C’est pour toutes ces raisons que l’embauche de Kirk Muller est importante. Qu’elle représente un très bon coup de la part de Marc Bergevin. Un coup qui était nécessaire.

Bien qu’il ait toutes les raisons au monde de se féliciter de cette embauche, le directeur général du Canadien ne doit pas s’en contenter. Que non!

Il doit maintenant prendre tous les moyens pour être aussi efficace dans sa quête de joueurs à mettre à la disposition de Kirk Muller et de l’équipe d’entraîneurs de son équipe. Mais le retour du « Capitaine Kirk » dans le giron du Canadien est certainement une très belle façon d’amorcer le remodelage estival du Canadien. Il nous aidera à patienter en attendant la suite des choses.