Scène inusitée à l’entraînement des Golden Knights de Las Vegas jeudi dernier. Pendant que l’entraîneur Gerard Gallant dirigeait un entraînement aussi sérieux que rigoureux, comme il en a l’habitude, Max Pacioretty était le 13e attaquant utilisé. L’homme en trop dans les plans de l’entraîneur.

Devant les journalistes, à la veille d’affronter les Devils du New Jersey, Gallant avait été tranchant de vérité. Il n’avait pas l’intention de faire appel à son ailier gauche pour cette rencontre. Son explication en avait médusé quelques-uns. Il avait dit quelque chose comme : « Nous avons plusieurs attaquants; il faut bien faire jouer tout le monde ».

Une heure ou deux plus tard, la direction de l’équipe avait publié un communiqué contredisant l’entraîneur. Il soignait, semble-t-il, une blessure mineure. On avait choisi de protéger la fierté de Pacioretty qui, on le sait, est capable de jouer malgré la douleur. Il était d’ailleurs revenu le lendemain.

À Montréal, une histoire comme celle-là aurait fait les manchettes durant une semaine. Même à Las Vegas, cela n’aurait pas dû être une mince affaire. Après tout, il était question d’un marqueur naturel et de la future grande vedette de l’équipe que les Golden Knights avaient obtenu par le biais d’une transaction majeure qui allait contribuer à les garder parmi les plus sérieux prétendants à la coupe Stanley, croyaient-ils.

Dans l’échange, le directeur général George McPhee s’en est d’ailleurs bien tiré en ne sacrifiant qu’un élément de sa formation régulière, Tomas Tatar, un joueur que Gallant n’estimait pas beaucoup. Par ailleurs, il y a mis le prix en ajoutant dans ce marché le jeune Nick Suzuki sur qui les éloges des observateurs pleuvent fréquemment. Finalement, pour s’assurer que Pacioretty soit heureux avec sa nouvelle équipe, McPhee lui consentit un contrat de quatre ans, évalué à sept millions par saison. À compter de la saison prochaine, cette entente fera de lui le joueur le mieux rémunéré de l’équipe avec Marc-André Fleury.

Malgré tout, ça ne fonctionnait pas trop bien pour lui avant de subir une blessure à un genou durant le match de lundi soir contre Columbus. Pacioretty n’a marqué aucun but en décembre. Aucun but en sept matchs et deux buts à ses neuf dernières parties. Disons que pour l’instant, Marc Bergevin mérite une étoile dans son bulletin pour cette transaction.

Quand Bergevin a commencé à offrir les services de son meilleur franc-tireur aux plus offrants l’été dernier, on a émis de sérieux doutes sur ses chances d’obtenir une monnaie d’échange équivalente pour un marqueur de 35 buts. On entretenait aussi des craintes quand il a acquis Max Domi en retour d’Alex Galchenyuk qui est actuellement égal à lui-même en Arizona.

À la lumière de ce qu’on sait aujourd’hui, il semble que Bergevin avait clairement identifié les deux principaux responsables du problème d’attitude qu’il avait lui-même noté dans son bilan de fin de saison. Le départ de Pacioretty, loin d’affaiblir l’attaque du Tricolore, a contribué indirectement à dynamiser le premier trio du Canadien. Domi, de son côté, a injecté une bonne dose d’enthousiasme dans l’équipe, tout en contribuant par la même occasion à relancer un Jonathan Drouin visiblement pas à sa place au centre.

À Vegas, Pacioretty a retrouvé un entraîneur qu’il connaissait déjà et qui n’a pas l’habitude de faire dans la dentelle. Si jamais il lui est venu à l’esprit que son statut de super vedette pouvait lui permettre de prendre les choses aisément certains soirs, c’était très mal connaître Gallant.

Un observateur très au fait du genre d’athlète qu’est le grand Américain me trace un portrait de lui qui permet de mieux comprendre les difficultés qu’il a rencontrées durant sa dernière saison à Montréal et les problèmes qui semblent se répéter avec les Golden Knights. C’est un joueur qui, me dit-on, a besoin que les autres travaillent pour lui et non le contraire. Ça explique peut-être pourquoi il a connu tant de succès avec David Desharnais qui le cherchait constamment sur la glace et pourquoi cela n’a pas fonctionné avec Drouin qui voulait la rondelle autant que lui. Bref, sous des dehors de gars sympathique face aux caméras dans le vestiaire, il n’est pas toujours le plus vaillant sur la glace.

Or, s’il y a deux types de joueur que Gallant n’apprécie pas, ce sont ceux dont l’effort laisse à désirer et ceux qui craignent de se salir le nez quand la situation l’exige. Tatar avait la réputation de ne pas être très brave. Voilà pourquoi il l’a laissé de côté, même si son directeur général avait consenti des choix de premier, de deuxième et de troisième tours aux Red Wings de Detroit pour l’obtenir. Au sein du Canadien, Tatar travaille fort, mais on le voit rarement foncer tête première dans des coins de patinoire pour récupérer des rondelles.

Pour l’instant, il y a une statistique qui ne ment pas. Domi et Tatar ont un total combiné de 26 buts, comparativement à 13 buts pour le duo Pacioretty-Galchenyuk qui a toutefois manqué 16 matchs.

La tournure des évènements tend à donner raison à Bergevin. Ces deux importantes transactions ne faisaient pourtant pas le bonheur de tout le monde au départ. L’image de l’équipe a subi tout un changement. Il est intéressant de constater que cinq des huit nouveaux venus cette saison n’ont rien coûté à l’organisation, dont le jeune Jesperi Kotkaniemi, un choix au repêchage qui a fait sa place plus tôt que prévu.

Les autres sont Brett Kulak qui a été obtenu de Calgary en retour de deux marginaux qui n’auraient jamais joué à Montréal, Matt Taormina et Rinat Valiev. D’ailleurs, ces deux-là patinent dans la Ligue américaine sans avoir disputé une seule partie avec les Flames.

Quant à Michael Chaput, Kenny Agostino et Matthew Peca, ils ont été acquis sur le marché des joueurs autonomes à prix modiques, comme en font foi leurs salaires combinés de 2,6 millions pour la saison. Ces trois additions permettent de colmater des brèches dans l’attente de jours meilleurs.

Portes tournantes chez les entraîneurs

Il n’est sans doute pas arrivé souvent que cinq entraîneurs de la Ligue nationale aient été remerciés avant les Fêtes. Les portes tournantes se sont fait aller à Saint Louis, Los Angeles, Edmonton, Chicago et Philadelphie.

Chaque fois qu’un entraîneur perd son job, il y en a quelques-uns qui se rapprochent du téléphone dans l’espoir qu’on leur offre une occasion de reprendre du service. On pense notamment à Alain Vigneault, probablement victime de son salaire très élevé, à Michel Therrien et à Bob Hartley que le manque d’intérêt de plusieurs organisations doivent rendre très songeurs.

Je pense aussi à des entraîneurs chevronnés comme Lindy Ruff (1493 parties d’expérience), Marc Crawford (1151) et Jacques Martin (1294) qui, dans leurs rôles d’adjoints chez les Rangers, les Sénateurs et les Penguins, entretiennent peut-être encore l’espoir de retourner dans un poste de commande.

Le seul qui n’est pas inquiet pour la suite des choses est Joel Quenneville qui, avec plus de 1600 parties d’expérience, près de 900 victoires, avec trois coupes Stanley et un trophée Jack-Adams, ne sera pas sans travail très longtemps.

Incidemment, Quenneville, Vigneault, Hartley, Ruff et Crawford sont tous d’ex-gagnants du trophée Jack-Adams. Pourtant, pour tous ces chômeurs de luxe, le téléphone ne sonne toujours pas.

Les tendances changent dans la Ligue nationale. Ils n’appartiennent peut-être pas au genre de relève que recherchent certaines organisations.

L’effet Shea Weber

On était impatient de voir Shea Weber reprendre sa place dans la formation parce qu’il était l’homme tout désigné pour permettre à l’attaque massive d’exploiter ses chances. On croyait que son boulet de canon terroriserait les gardiens adverses.

Or, le Canadien n’a marqué qu’un but en supériorité numérique depuis son retour au jeu et Weber n’était pas sur la glace quand cela s’est produit. Faut-il que les ennuis du Canadien soient profonds pour que son leader de la défense soit incapable de faire la différence.