Les partisans du Canadien voulaient John Scott : ils l’ont eu. Dans les hauteurs du Centre Bell, des fans en mal d’exploits à applaudir, de favoris à encourager, de séries éliminatoires à savourer, des fans ont passé la partie à saluer toutes les présences du gentil géant, les quelques passes qu’il a réussies et les trois mises en échec qu’il a assénées.

Las des insuccès de leur club et du manque de saveur de leurs préférés, les partisans trépignaient chaque fois que Scott sautait sur la patinoire. On a même entendu, dans la section 405 située derrière moi sur la galerie de presse, des amateurs saluer bruyamment le retour au banc de John Scott après qu’il eut complété un « dump and change » en zone neutre. Je crois vraiment que c’était la première fois que j’étais témoin d’un tel fait saillant.

Mais dans l’uniforme bleu-blanc-rouge qu’il endossait pour la première et dernière fois mardi comme dans celui de toutes les autres équipes dont il a défendu les couleurs, John Scott n’a rien pu changer au cours du match.

Et le Canadien a perdu 4-1 aux mains des Panthers.

Joueur ordinaire, coéquipier extraordinaire

Comprenez-moi bien : je n’ai rien de mal à dire de John Scott. Rien de rien. Je trouve que ces joueurs n’ont plus leur place dans la LNH, mais il n’allait quand même pas refuser l’invitation de disputer une partie avec le Canadien de Montréal. Surtout que son match d’hier passera peut-être à l’histoire comme son tout dernier en carrière dans la LNH.

Scott n’a pas le coup de patin pour justifier une place avec l’une des 30 équipes de la grande ligue. Mais bien qu’il soit trop lent, il comprend le jeu. Il sait où aller, où se tenir, où ne pas aller pour éviter d’être pris trop loin d’une action qu’il ne sera pas en mesure de rejoindre. En 14 présences totalisant 9:01 de temps d’utilisation, Scott n’a pas décoché de tir au but ou en direction du filet; il a écopé deux minutes de pénalité; il a asséné trois mises en échec; il s’est rendu coupable d’un revirement et a terminé sa soirée de travail avec un différentiel de moins-1.

Difficile de le blâmer toutefois sur le but puisqu’il a été marqué 10 secondes seulement après la mise en jeu initiale. Il est toutefois permis de se demander pourquoi le Canadien lui a accordé « l’honneur » d’amorcer le match alors que l’entraîneur-chef des Panthers Gerard Gallant avait déjà annoncé ses couleurs en donnant le mandat à son premier trio de commencer la rencontre sur la patinoire.

Le fait que les partisans du Canadien aient suivi l’épopée John Scott avec une attention qui frôlait la frénésie – son rappel et les heures qui ont précédé son match avec le Canadien ont obtenu une couverture médiatique démesurément exagérée – démontre à quel point le Tricolore a perdu des plumes cette saison. Autant sur la patinoire, que dans les gradins et surtout dans le cœur de ses partisans déçus, outrés, désabusés.

Mais une fois encore, il serait injuste et injustifié de diriger quelque blâme que ce soit à l’endroit de Scott qui n’a fait que remplir un rôle de soutien au sein d’un club qui a grand besoin de soutien.

Dans le vestiaire des Panthers de la Floride, le défenseur Brian Campbell a rendu un bel hommage à John Scott avec qui il a déjà partagé le vestiaire des Blackhawks de Chicago. « John sait jouer au hockey. Il comprend la partie. Il joue depuis toujours. Il a joué à toutes les positions. Mais John est d’abord et avant tout un coéquipier hors pair. C’est un gars drôle, qui comprend son rôle. Un rôle difficile à remplir. C’est plaisant d’avoir un gars comme lui dans le vestiaire. Ce genre de gars t’incite à venir travailler tous les matins et t’aide à garder le moral », a défilé le vétéran défenseur.

Panthers-Canadien : rôles inversés

John Scott a volé la vedette du match de mardi. Grand bien lui fasse puisque cela mettra un terme de belle façon à sa carrière. Mais les Panthers de la Floride demeurent les vraies vedettes de cette rencontre qui leur a permis de remporter le titre de champion de la division Atlantique.

« Je savais dès le début de la saison que nous avions une bonne équipe. Que j’avais sous la main des joueurs qui allaient se battre toute la saison pour nous permettre d’accéder aux séries éliminatoires. Mais si vous m’aviez dit qu’on terminerait au sommet de notre division, je vous aurais répondu que cette projection était exagérée », a convenu l’entraîneur-chef Gerard Gallant après la 46e victoire de son équipe (46-25-9), une victoire qui permet aux Panthers de fracasser la barre des 100 points.

En analysant le calendrier avant le début de la saison, il était facile de croire que le match du 5 avril au Centre Bell permettrait au Canadien de se hisser en première place de la division Atlantique, ou du moins bien près de la tête.

Mais voilà! Sept mois plus tard, les acteurs avaient changé de rôle.

Comment Gallant et ses joueurs comptaient-ils fêter ce gain? : « On va se taper le trajet en direction d’Ottawa en autobus », a répliqué l’ancien adjoint de Michel Therrien avec le Canadien.

Pas de champagne, pas de bières, pas de fête. Les joueurs ont bien lâché quelques cris de satisfaction lorsque la défaite du Lightning aux mains des Rangers – ils ont suivi les dernières minutes de la partie derrière des portes-clauses du vestiaire des visiteurs au Centre Bell – a officialisé leur titre. Ils ont aussi enfilé quelques pointes de pizza. Rien de plus.

« Il n’y a rien à fêter pour le moment. On n’a rien accompli encore. On va se rendre à Ottawa pour notre match de jeudi, on va rentrer à la maison pour disputer notre dernier match – contre la Caroline – et on va s’assurer de donner un effort complet, car c’est quand tu lèves le pied que les blessures arrivent. On va tenter de prolonger notre saison le plus longtemps possible et une fois que ce sera terminé, là nous pourrons célébrer », a conclu Galland qui recevra bien des votes dans la course au trophée Jack-Adams remis à l’entraîneur de l’année dans la LNH.

Tour du chapeau spécial

Alors que plusieurs partisans du Tricolore espéraient voir John Scott réaliser un tour du chapeau à la Gordie Howe – un but, une passe, une bagarre – le vétéran défenseur Brian Campbell a réalisé un tour du chapeau un brin spécial mardi soir.

Non il n’a pas marqué. Il n’a pas même récolté de point et encore moins jeté les gants. Mais Campbell a atteint le plateau des 1000 matchs dans la LNH, dans le cadre d’une victoire de son équipe, victoire qui a confirmé le titre de division.

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« La victoire et le titre sont des primes qui s’ajoutent à une très belle étape que je franchis aujourd’hui. Et honnêtement, je pourrais ajouter à ces primes le fait d’avoir disputé ce match historique à Montréal, dans cet amphithéâtre qui est l’un des plus majestueux de la Ligue. Je me suis battu toute ma carrière. J’ai été repêché tardivement – choix de 6e ronde des Sabres de Buffalo en 1997 –, j’ai fait mes classes dans la Ligue américaine, j’ai été confiné à la galerie de presse bien souvent, j’ai sauté des tours lors des matchs, mais je n’ai jamais perdu confiance. J’ai persévéré et je viens de me rendre à 1000 parties dans la LNH. C’est une étape qui a beaucoup de valeur à mes yeux », a indiqué le défenseur qui aura bientôt 37 ans.

Brian Campbell a soulevé la coupe Stanley avec les Blackhawks de Chicago en 2010. Depuis qu’il s’est joint aux Panthers, il n’a atteint les séries qu’une fois. En 2012. Les Panthers avaient alors été éliminés dès la première ronde. Outre Campbell, les défenseurs Erik Gudbranson et Dmitry Kulikov sont les seuls autres Panthers qui étaient en Floride lors de cette dernière présence en séries.

« Nous avions un club plus vieux, mais un club de plombiers dans le temps. Nous sommes beaucoup mieux équipés pour faire face aux séries cette année. Nos jeunes manquent peut-être d’expérience, mais ils ne manquent pas de talent. Nous comptons sur une offensive bien diversifiée et nos joueurs d’impacts produisent sur une base régulière. Rien n’est acquis en séries, mais nous y arrivons avec confiance », a conclu Campbell.

Petite statistique en terminant, grosse statistique en fait, avec les deux passes qu’il a récoltées face au Canadien mardi soir, Jaromir Jagr revendique maintenant 1866 points en carrière. Avec les trois points récoltés par Galchenyuk (but), Gallagher et Pacioretty (passes), les 12 attaquants en uniforme pour le Tricolore hier soir en revendiquent 1831.

Finalement, ce n’est ni une petite ou une grosse statistique : c’est une très grosse statistique.