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Carey Price avait été fort bien préparé pour ce premier match contre le Lightning, un peu comme on l'a fait avec lui durant toute la saison. Sous l'égide de son nouveau mentor Stéphane Waite, il a pu effacer de sa tête cette saison tous les éléments négatifs qui s'y étaient emmagasinés l'an dernier à la suite d'une fin de calendrier en queue de poisson et de séries éliminatoires plus décevantes encore.

Pour Waite, c'était tellement important que Price termine la présente saison sur le bon pied afin d'effacer les mauvais souvenirs et d'amorcer cette série sur une note plus positive que le printemps dernier. Price se sentait sans doute dans une forme mentale exceptionnelle quand il a blanchi les Rangers après avoir été bombardé de 41 tirs, samedi dernier. Le premier objectif était atteint.

Toutefois, peu importe la préparation qu'on y met avant un enjeu important, le gardien est toujours à la merci d'une soirée chancelante ou d'un brin de nervosité qui peut bousiller tous les efforts déployés pour pouvoir lancer ses coéquipiers sur la bonne voie en remportant le premier match de cette série.

On s'est souvent interrogé sur la méthode à succès de Stéphane Waite qui lui a permis de contribuer à deux conquêtes de la coupe Stanley en trois ans à Chicago en guidant deux gardiens différents, Antti Niemi et Corey Crawford, vers ces deux championnats. Une façon de faire qui lui a permis d'obtenir un succès instantané avec Carey Price. Cette méthode est basée sur l'effort, sur le positivisme et sur une absence totale de relâchement. Avec lui, il est interdit de prendre les choses mollement, peu importe le moment de la saison.

Ce qui ressemble en tout point à la préparation qui a été celle de Price mardi avant le départ du Canadien vers Tampa. À la veille de chaque match, Price (ou Peter Budaj) doit se soumettre à une séance de vidéos obligatoire. Que ça plaise ou non. Waite le dit avec fermeté, c'est non négociable. C'est sans doute ce que Price veut dire quand il affirme que Waite le pousse constamment. Quand on remarque des erreurs, on les corrige immédiatement. Mais tout n'est jamais négatif. Waite précise que 80 % des images qu'on met sous les yeux de ses gardiens représentent leurs plus beaux jeux et leurs arrêts les plus spectaculaires. Une façon indéniable de gonfler leur confiance.

« Quand ça va bien, certains entraîneurs de gardiens de but laissent tomber la vidéo, mentionne Waite. Ils ne croient pas en avoir besoin parce que tout se passe bien, mais à un certain moment, le gardien en vient à oublier pourquoi les choses allaient si bien. »

Avant l'entraînement de mardi matin, on a tenu le même genre de réunion. Après avoir fait le tour de la question et après avoir étudié les forces et les faiblesses de l'adversaire, Waite a convaincu Price qu'il se présenterait contre le Lightning super confiant, confortable dans ses patins et sans le moindre doute dans sa tête parce que dans sa préparation mentale, aucun détail n'avait été laissé au hasard.

Il ne lui avait pas fait uniquement cette prédiction pour augmenter son degré de confiance. Il le croyait vraiment. Après tout, Waite ne travaille-t-il pas avec l'un des grands gardiens du hockey?

Néanmoins, on l'a constaté, ça ne fonctionne pas toujours comme prévu. L'athlète est humain. Il y a des soirs où il commet des vols de grands chemins et des soirées au cours desquelles il peut avoir l'air d'un gardien numéro 2. La bonne nouvelle pour le Canadien et ses fans, c'est que l'équipe a gagné sans une grande contribution de sa part. Demain, on pourrait reconnaître le gardien qui a guidé les siens vers une étonnante saison de 100 points. En connaissant une soirée à la hauteur de ses capacités, il pourrait ainsi permettre au Canadien de rentrer à la maison avec deux victoires en banque. La mine déconfite de Steve Yzerman après le but gagnant de Dale Weise disait tout. S'il fallait que Price ressemble à Price demain soir, son équipe se retrouverait très tôt en difficulté dans la série.

Waite ne laissera pas son gardien s'octroyer une journée de congé jeudi. Il recommencera le même exercice. Séance de vidéos, conseils d'usage sur certains jeux de base pas très bien exécutés, assortis des encouragements qui suivent généralement ces discussions entre quatre yeux.

C'est ça, la méthode Stéphane Waite. Il n'y a pas de surprises. Juste un très grand souci du travail bien fait. On n'escamote aucun détail. Juste pour vous dire, en terminant son meeting de mardi, le coach ne lui a pas parlé de l'importance de gagner, encore moins de remporter la série ou la coupe Stanley en bout de ligne. Il lui a demandé de se concentrer à stopper chaque rondelle. S'il effectuait suffisamment d'arrêts, il allait connaître du succès.

Bon, d'accord, les choses ne se sont pas déroulées comme prévu, ce qui devrait fournir des munitions à ceux qui s'acharnent malicieusement sur Price. Mais il a gagné. Ce n'était pas joli, mais Price et le Canadien sont quand même en avance dans la série. Un de ces soirs, il sera miraculeux, mais il perdra 1-0. La loi du sport est ainsi faite.

Une belle complicité

On peut s'attarder par la même occasion sur la belle complicité qui existe entre Price et son coach personnel. Waite a mis cartes sur table avec ses deux gardiens immédiatement après avoir accepté l'offre du Canadien. Il a téléphoné à chacun d'eux. Il a notamment avoué à Price que s'il avait accepté la proposition de Marc Bergevin, c'était d'abord parce qu'il avait confiance en lui.

« Je l'ai rassuré sur un point, rappelle-t-il. Je n'avais nullement l'intention de modifier son style. C'est la grave erreur que commettent certains gardiens qui deviennent entraîneurs après leur carrière. Ils incitent leurs gardiens à emprunter le style qu'ils préconisaient eux-mêmes. J'entendais corriger quelques points techniques, sans plus. Je tenais à ce qu'il soit à l'aise avec moi. Je voulais que le point fort de notre relation soit la communication. S'il n'était pas d'accord avec certains aspects de mon travail, je tenais à ce qu'il le dise. C'était tellement important qu'il se sente bien que je lui ai mentionné mon intention de le suivre dans ce qu'il souhaitait faire. J'ai compris qu'il était soulagé que je ne cherche pas à le changer. »

Ce fut le jour 1 d'une relation qui a déjà rapporté beaucoup de dividendes.

La fameuse déclaration

Price, ça saute aux yeux, n'est plus le gardien mal dans sa peau qui avait avoué sa gêne de se mêler au public dans ses sorties occasionnelles. Montréal était un marché qui ne répondait pas à ses besoins de solitude et de vie privée. Il se disait indisposé au moment de faire une activité aussi anodine que son épicerie.

Dans le temps, ses yeux fixaient le plancher quand il répondait aux questions des médias. Aujourd'hui, il se tient droit comme un chêne devant son casier en regardant ses interlocuteurs dans les yeux. On le sent en plein contrôle de lui-même, nettement mieux dans sa peau. Pourtant, il y a un an, on a cru que le Canadien était en train de le perdre.

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« J'étais au courant de cette histoire quand je suis arrivé à Montréal, explique Waite qui refuse de prendre une once de crédit pour le changement radical noté dans le comportement de Price cette saison. Je crois qu'une année de plus dans son cheminement de carrière lui permet de jouir d'une plus grande maturité. Je ne suis jamais revenu sur les difficultés qu'il avait exprimées le printemps dernier. Il n'a jamais été question de cela entre nous. »

Le rapprochement s'est fait en douceur entre les deux hommes. Comme l'a précisé Price cette semaine, c'est plus facile de faire confiance à quelqu'un qui a déjà connu beaucoup de succès et qui a savouré deux coupes Stanley.

« C'est sûr que ces deux coupes Stanley ne peuvent pas me nuire sur le plan de la crédibilité, mais je ne lui ai jamais parlé de cela, dit Waite. Je n'ai jamais joué cette carte-là. Je ne vis pas dans le passé. Jamais je ne porte mes bagues de la coupe Stanley. J'ai gagné, c'est fait, c'est du passé. »

Waite n'est pas sans réaliser qu'il y a une certaine forme de message là-dedans. Quand un gardien a disputé un match, peu importe le résultat, il doit l'oublier et se concentrer tout de suite sur le prochain.

Dans sa rencontre avec Price aujourd'hui, il le lui rappellera cela, sans doute. « Oublie le dernier match. Ça ne compte plus. C'est derrière toi. »

Il lui aurait dit la même chose s'il avait disputé un match extraordinaire dans une victoire de 2-0. Ce qui est passé est passé.

Stéphane Waite est arrivé au bon moment dans la carrière de Carey Price qui avait probablement besoin qu'on lui parle de cette façon.