LONGUEUIL – « Coach, je veux jouer demain. »

Pas facile de tenir Samuel Girard loin d’une patinoire, même lors d’un match hors-concours sans importance qu’il ne doit pas jouer. Avec tout le talent et surtout la passion qu’il affiche, c’est encore plus difficile de lui dire non.

Quand le message texte de Girard a illuminé le téléphone de l’entraîneur-chef des Cataractes de Shawinigan Martin Bernard, ce dernier ne pouvait qu’acquiescer à la demande de son jeune défenseur.

« C’est tellement un jeune qui aime le hockey, comme (Anthony) Beauvillier. Ils sont talentueux, mais quand ils se retrouvent sur la glace, ils veulent encore s’améliorer. Ils en veulent encore, ce n’est jamais assez. Où se situent leurs limites? C’est dur à évaluer », s’émerveille Bernard.

Face aux Tigres de Victoriaville le 22 août dernier à Longueuil, Girard ne connaît pas son meilleur match, mais offre tout de même un autre échantillon de ce potentiel étalé au grand jour l’an dernier à sa saison recrue.

Calme, posé et nullement intimidé à la ligne bleue adverse par la pression exercée par un rival qui file droit vers lui, Girard tourne le dos à ce dernier et patiente jusqu’au dernier moment pour rejeter la rondelle profondément en zone ennemie et maintenir l’attaque à vie.

En apparence anodin, ce jeu – répété en quelques occasions – témoigne de la confiance du jeune homme, qui a conclu l’après-midi avec un but et un différentiel de plus-1.

« En possession de la rondelle, rien de l’effraie, avance Bernard. Il choisit rarement la mauvaise option. Soit qu’il garde possession de la rondelle, soit qui trouve l’option pour la bouger et se démarquer par la suite. Sa vision du jeu, c’est son atout principal. »

Troisième choix au total au repêchage 2014 de la LHJMQ, Girard n’a donc pas tardé à s’imposer comme le pilier de la défense des Cataractes, glanant 43 points (5 buts et 38 passes) à l’âge de 16 ans. Un rendement qui a fait de lui un finaliste au titre de recrue de l’année dans la LHJMQ, un honneur finalement raflé par Dmytro Timashov, des Remparts de Québec.

« Il n’y a pas beaucoup de joueurs de 16 ans qui ont eu autant de temps de glace que moi l’an passé. Je suis reconnaissant envers les Cataractes, mais je pense que c’est du donnant-donnant. S’ils m’en ont donné, c’est que je leur en ai donné », observe Girard.

« C’est impressionnant ce qu’il a accompli à 16 ans seulement. Je me rappelle encore son premier match dans la LHJMQ, à Chicoutimi, devant sa famille. Commencer ta carrière junior avec deux passes à ton premier match, ce n’est pas rien », signale quant à lui son coéquipier et capitaine Anthony Beauvillier.

Presque tous les atouts

Avec le statut de joueur élite viennent maintenant les responsabilités.

« Il devrait être le général de notre défense et jouer énormément de minutes, mais il est capable d’en prendre grâce à la fluidité de son coup de patin; il ne se fatigue pas à patiner. L’apport offensif est certes l’aspect no 1 de son jeu, mais l’an passé, il m’avait aussi surpris par ses attributs défensifs. Je ne serai donc pas inquiet de l’utiliser contre des gros trios », projette Bernard.

Un devoir que Girard se fera un plaisir d’assumer, promet-il.

« Mon leadership sera encore plus gros cette année. Il va falloir que je leur en donne un peu partout : sur le jeu de puissance, sur le désavantage numérique à cinq contre cinq. »

Girard aura donc toutes les occasions d’embellir la candidature qu’il déposera au prochain repêchage de la LNH.

« Il me fait un peu penser à Ryan Ellis (Predators de Nashville). Il a ce swag et cette arrogance positive qui font qu’un joueur canalise bien sa confiance en ses moyens », observe le dépisteur des Kings de Los Angeles Denis Fugère avant d’émettre un bémol.

« Il possède les habiletés offensives, il est de plus en plus imputable défensivement et il a un coup de patin déjà digne des professionnels. Il a tout, sauf une chose... le physique. »

À 5 pieds 9 pouces et 165 livres selon les données les plus récentes de la LHJMQ, Girard n’est définitivement pas le plus imposant des défenseurs.

« Mesure-t-il encore à 5 pi 9 po? S’il grandit encore dans les prochaines années et qu’il atteint les 5 pieds 11 po, il n’y a pas de problème. Après tout, combien y a-t-il de défenseurs de ce gabarit dans la LNH? », souligne Fugère, tout en évoquant de nouveau le cas d’Ellis, qui mesure maintenant 5 pi 10 po et pèse 175 livres.

Ne comptez toutefois pas sur Girard pour angoisser quant à sa courbe de croissance, il a autre chose à offrir.  

« Même si c’est mon année de repêchage, il ne faut pas que je stresse avec ça. Je dois rester fidèle à mon style de jeu comme je l’ai fait l’an passé. C’est une année comme toutes les autres. On pensera au repêchage quand ce sera le temps. »

Pour l’instant, c’est au prochain match qu’il pense.