L'émission Table d'hôte est présentée à RDS à 19 h mardi.

Ils ont en commun d’avoir quitté le foyer familial bien avant la plupart des jeunes hommes de leur âge. Ils ont en commun d’avoir dû s’expatrier dans un autre pays, de s’intégrer à une autre culture, de s’adapter à une langue qu’ils ne maitrisaient pas tous convenablement. Ils ont en commun d’avoir dû s’adapter à la vie quotidienne d’abord seul, puis en couple, puis en famille, loin du support immédiat de parents et amis. Mais ils ont aussi en commun d’avoir atteint l'objectif suprême de tout jeune joueur de hockey le moindrement sérieux : celui de jouer un jour dans la Ligue nationale! Un objectif encore plus remarquable et difficile à atteindre quand on vient au monde au Québec…

Chaque athlète a son histoire

Ainsi va la vie dans le monde du sport. Chaque athlète a son histoire, sur le plan professionnel, mais aussi sur le plan personnel.

Tiens, quelques jours à peine avant la diffusion de l’émission Table d’hôte, mardi soir le 10 novembre 2015, trois des quatre joueurs québécois invités autour de la table, lors du tournage du 14 juin dernier, vivaient des moments extrêmement forts qui les envoyaient dans toutes les directions, sur le plan émotif.

Maxime Talbot, pas plus tard que la veille de la première diffusion de l’émission, apprenait qu’il était rétrogradé au club-école des Bruins de Boston, à Providence, et ce, pour la deuxième fois depuis le début de la saison. Il avait reçu, le 5 octobre dernier, un coup extrêmement dur en étant soumis au ballottage par les Bruins, ces mêmes Bruins qui avaient pourtant fait son acquisition le 2 mars dernier dans le but d’ajouter de l’expérience et de l’énergie dans leur quête de participer aux séries. Ce Maxime Talbot, c’est celui-là même qui a marqué 19 buts il y a quatre ans à peine à Philadelphie, celui qui en a marqué 8 en séries 2009 pour les Penguins, dont les 2 seuls de son équipe lors du match ultime menant à la grande conquête contre Detroit. C’est ce même athlète qui, encore tout récemment, excellait en infériorité numérique, se jetait devant les tirs les plus foudroyants, plaquait sans relâche des adversaires plus grands et plus costauds, venait à la défense des meilleurs joueurs de son équipe.

Pascal Dupuis, de son côté, a revécu les frustrations qui ont marqué la dernière année. Et probablement les mêmes angoisses aussi! Après avoir raté les six premiers matchs de la saison régulière, en raison d’une blessure au bas du corps, il fut hospitalisé à Edmonton la semaine dernière, victime de symptômes qui « pouvaient ou non s’approcher de son problème de caillot sanguin » survenu la saison dernière, selon l’équipe. À quelques heures de la diffusion de Table d’hôte, il s’était entraîné avec ses coéquipiers et espérait affronter le Canadien à Pittsburgh, le mercredi suivant.

De joueur étiqueté jadis « employé de soutien », Pascal Dupuis est devenu au fil des ans un rouage indispensable pour les Penguins de Pittsburgh. Ce sont les mauvais sorts de la vie qui l’ont écarté de ce savoureux parcours qui fut le sien jusqu’en 2013, à Pittsburgh, parcours marqué par deux saisons de 20 buts et plus et surtout, par une confiance absolue de son joueur de centre, Sidney Crosby. Il y eut d’abord cette déchirure du ligament croisé antérieur, en décembre 2013, qui nécessita une opération. Puis, plus inquiétant encore, ce caillot de sang au poumon en novembre 2014, qui l’éloigna du jeu pour le reste de la saison.

À l’autre bout du spectre, il y a l’événement heureux survenu dans la vie de Patrice Bergeron, le 21 octobre dernier. La venue au monde de Zack, premier enfant de Patrice et de son épouse Stéphanie Bertrand, survient à un moment où la carrière du centre des Bruins de Boston baigne dans l’huile. En fait, elle n’a jamais connu la moindre défaillance, si ce n’est des suites malheureuses de sa commotion cérébrale, résultat de la mise en échec vicieuse de Randy Jones des Flyers de Philadelphie, en octobre 2007. Lui qui a accompli l’exploit de remporter la Coupe Stanley, l’or olympique à deux reprises, le championnat du monde de hockey à deux occasions et le championnat mondial junior, il fait encore l’unanimité comme joueur de centre complet dans la LNH. Même si son équipe amorce une phase de transition incontournable, il demeure toujours aussi productif comme en fait foi sa moyenne d’un point par match depuis le début de cette saison. Au-delà de tout, il est reconnu par tous comme une personne aux valeurs extrêmement relevées, dans toutes les sphères de la vie! Un homme intègre, droit, bon et généreux…

Il n’y a finalement que Marc-Édouard Vlasic qui vit présentement, en apparence du moins, une période calme et tranquille, même si cela semble impossible pour un athlète d’élite. Le défenseur âgé maintenant de 28 ans évolue à raison de 22 minutes par match avec les Sharks de San Jose et il est l’une des pierres angulaires d’une équipe qui elle aussi est en mutation. Bâtissant sa carrière étape par étape, avec sérieux et détermination, après avoir été sélectionné au sein de l’équipe étoile des recrues en 2007, le jeune homme natif du West Island a forcé la main des dirigeants d’Équipe Canada en vue des Jeux olympiques de Sotchi en 2014. On voulait quatre gauchers; on a jugé qu’il était le meilleur choix après Duncan Keith, Jay Bouwmeester et Dan Hamhuis. Ce n’est quand même pas rien!

Vlasic et ses coéquipiers cherchent présentement par tous les moyens à regagner la confiance des partisans des Sharks, qui ont été d’une grande fidélité dès les débuts, en 1991, mais qui ont été souvent déçus en séries éliminatoires. Chose certaine, si une certaine stabilité s’avère nécessaire à travers tout ce processus, la présence de Marc-Édouard à la ligne bleue de cette concession se veut inestimable!

À cœur ouvert

Lorsque nous avons capté les propos savoureux de Maxime Talbot, Pascal Dupuis, Patrice Bergeron et Marc-Édouard Vlasic autour de notre copieux repas, le 14 juin dernier, nous étions incapables de prédire la plupart des événements qui allaient marquer la vie de nos quatre hockeyeurs québécois expatriés aux États-Unis depuis au moins une dizaine d’années. Mais tous ont ouvert leur cœur et ont été d’une générosité et d’une franchise irréprochables, avec leur personnalité propre, sans artifice et sans théâtre.

Maxime Talbot espérait des jours heureux à Boston, même s’il reconnaissait avec froideur le processus dans lequel les Bruins devaient s’engager. Y aurait-il une autre équipe intéressée à ses services? Pascal Dupuis a bien voulu nous parler de cet épisode dramatique qui a changé le cours de sa vie l’an dernier, à pareille date, et qui a suscité une vraie remise en question de l’ensemble de ses valeurs, bien au-delà de sa vie professionnelle. Patrice Bergeron a livré de superbes réflexions sur son parcours, mais n’a pas caché les angoisses naturelles qui accompagnent le grand bonheur anticipé d’un futur papa. Et Marc-Édouard Vlasic a parlé avec affection et reconnaissance de sa compagne de vie, Martine, qui l’accompagne depuis toujours et de ses parents qui lui ont donné une vie heureuse et saine, tout au long de son enfance et de son adolescence.

Nous avons abordé tous les thèmes humains qui entourent la vie de ces athlètes de chez nous, pour qui le succès n’eut été possible que par ce déracinement survenu lorsqu’ils furent à peine sortis de l’adolescence. Nous avons parlé des barrières de la langue, de l’amitié et du support de gens importants à des moments clés, de l’attachement pour le Québec, de l’importance des femmes de leur vie, de la vie de famille, de l’après-carrière, des passions qui les animent en dehors du hockey. Nous avons aussi bien sûr parlé de l’internationalisation du hockey et de son effet positif sur l’intégration des jeunes joueurs francophones dans les vestiaires de la LNH.

Je ne pourrai jamais dire assez souvent à quel point les quatre invités de notre émission Table d’hôte du 10 novembre 2015 figurent parmi les athlètes les plus agréables à interviewer, dans notre quotidien. Mais cette fois, dans le contexte intime de l’émission, ils ont accepté d’aller encore plus loin, largement parce qu’ils reconnaissaient les attentes particulières qui sont les vôtres, dans un tel contexte.

Je vous invite donc sincèrement à ne pas rater cette prochaine édition de Table d’hôte. C’est l’histoire de la poursuite et de l’atteinte des rêves, une histoire foncièrement heureuse. Mais qui comporte, comme la plupart d’entre elles, sa large part de rebondissements, d’aléas, parfois de drames, de peurs et d’angoisses. De sacrifices aussi, comme celui de l’éloignement et de l’exil, que tous les hockeyeurs québécois ont dû traverser pour arriver à leurs fins!