Championnat du monde : le Canada affrontera le Kazakhstan vendredi à 9 h sur RDS et RDS Direct

MONTRÉAL – Du centre-ville de Chicago, il faut rouler environ 1 h 30 vers le nord pour arriver dans la banlieue de Rockford. Géographiquement, le va-et-vient entre les deux villes est relativement modeste. Il a toutefois été la source d’importantes oscillations dans le moral de Nicolas Beaudin.

Le jeune défenseur l’avoue candidement : il ne s’attendait pas vraiment à jouer dans la Ligue nationale cette année. À 21 ans, il n’avait qu’une année dans la Ligue américaine sous la cravate. Il voyait pas mal de vétérans devant lui à la ligne bleue des Blackhawks. Peut-être pour éviter les déceptions, il restait réaliste.

Mais il a connu un bon camp d’entraînement, a gagné une place sur l’escouade de réserve, s’est fait dire qu’il serait du premier voyage. Au huitième match de la saison, à Nashville, on lui a donné un casier dans le vestiaire. Il a joué ce match-là et dix des onze suivants.

Évidemment qu’il y a pris goût. C’est ce qui a rendu la suite difficile à digérer.

« [Adam] Boqvist était laissé de côté à cause du protocole de la COVID, explique Beaudin en entrevue avec RDS. Quand il est revenu, il a comme repris son spot tout de suite. Tout ce que j’avais fait, c’est comme s’il ne s’était rien passé. Je comprends qu’il n’avait pas perdu sa place en raison de ses performances et que l’équipe veuille y aller avec les joueurs qui étaient là au début. Mais j’ai trouvé ça un peu tough. »

Pendant sa première véritable audition dans la LNH, Beaudin a obtenu son premier point en carrière (sur un jeu qui allait lui valoir quelques moqueries, mais « c’est le résultat qui compte! ») dans la LNH, puis a marqué son premier but. Il venait de récolter quatre points en trois parties et avait été utilisé pendant 19 minutes dans la troisième quand Boqvist a réintégré la formation.

Le retour au jeu du Suédois a d’abord eu un impact sur son temps de jeu, puis lui a carrément coûté sa place. Fin février, il a été cédé aux mineures.

La pilule a mal passé, mais Beaudin a fini par y trouver des effets bénéfiques. C’est qu’à Rockford, on ne le voyait plus comme la verte recrue qu’il était l’année précédente.

« C’est assez spécial, juste ce qu’une année peut faire, conçoit-il avec le recul. L’an dernier, j’ai joué toute l’année dans la Ligue américaine. Après avoir joué une dizaine de matchs dans la Ligue nationale, je suis retourné en bas et c’était comme un autre monde. J’avais l’avantage numérique, je jouais 20-25 minutes par match, si c’est pas plus. Ils comptaient sur moi pour faire la différence. Pour ça, c’était le fun. J’avais beaucoup de glace et je pouvais utiliser mes instincts offensifs. »

Congestion à Chicago

Beaudin a amassé six points à ses trois premiers matchs dans la Ligue américaine. Le temps de le dire, il était de retour dans la LNH, mais dans un rôle de réserviste. S’en est suivi une série d’allers-retours qui ont un peu sapé son moral. Il n’a jamais eu l’impression de retrouver sa touche lorsque les Blackhawks ont fait appel à ses services.

« Je pense que les dix premiers matchs que j’ai joués, j’ai vraiment bien fait. J’avais du momentum. C’était plus dur après de le retrouver parce que c’était comme un match dans l’alignement, un match en dehors, un match dans l’alignement, un match en dehors. J’ai trouvé ça plus dur, surtout quand tu joues entre dix à douze minutes par match. »

Dans un futur rapproché, les Hawks risquent d’avoir des décisions importantes à prendre quant à la composition de leur brigade défensive. Beaudin et Boqvist, deux choix de première ronde du club en 2018, sont deux défenseurs au gabarit et au profil similaires. À la compétition interne qu’ils se livrent depuis deux ans s’est ajouté cette année Ian Mitchell, un choix de deuxième ronde en 2017 qui cadre lui aussi dans le moule du petit quart-arrière mobile et doué offensivement.  

Beaudin est gaucher tandis que les deux autres sont droitiers. Boqvist deviendra joueur autonome avec compensation à l’été 2022. Ses deux coéquipiers pourront atteindre cette étape un an plus tard. Le Québécois, qui se dit toujours heureux à Chicago, analyse froidement la situation.

« Mitchell et Boqvist, ce sont des bonnes personnes aussi, des bons joueurs. C’est sûr que c’est tout le temps bon d’avoir de la compétition à l’interne. Ça te pousse à être meilleur. Ça pousse les vétérans à être meilleurs aussi quand les jeunes poussent. Mais sur le long terme, je pense qu’à un moment donné, Chicago va devoir prendre une décision parce que je ne pense pas qu’on puisse être les trois dans l’alignement en même temps. Ce n’est pas arrivé beaucoup cette année en tout cas. J’imagine que tout le monde va pousser de son côté et ils vont prendre leur décision. »

En attendant un camp d’entraînement qui s’annonce déterminant, Beaudin a accepté une autre sorte de défi. Immédiatement après son dernier match de la saison, contre les Stars de Dallas, Beaudin a reçu un appel de Hockey Canada. Lui qui n’avait jamais porté l’Unifolié de sa vie, on l’invitait à participer au Championnat du monde en Lettonie. Après s’être assuré qu’on ne le recrutait pas dans un rôle de faire-valoir, il a annulé les vacances qu’il avait prévues avec sa copine et a accepté l’invitation.

« Je pensais que c’était une bonne idée vu que je n’ai pas joué tant de matchs que ça cette saison. C’est tout le temps bon d’avoir du temps de glace et c’est la première fois aussi que je pouvais représenter le Canada. Ça va être une belle expérience », entrevoyait-il après le premier match du tournoi contre l’équipe hôtesse. Une semaine plus tard, avec quatre parties au compteur, son temps d’utilisation moyen se chiffre à un peu plus d’onze minutes par match. Pas la mer à boire, mais c’est de l’expérience de plus en banque.

« C’est sûr que ça n’a pas été une saison évidente. C’était du up and down. Mais je pense qu’on a quand même été chanceux de pouvoir jouer au hockey avec tout ce qui se passait. D’après moi, j’ai pris un gros pas cette année, mais il faut que je m’assure d’en prendre un autre l’année prochaine. »