MONTRÉAL – Mavrik Bourque était si jeune quand il a commencé à regarder le Championnat mondial junior qu’il se rangeait derrière l’équipe avec la plus belle couleur de chandail. « Je me souviens très bien qu’il prenait pour la Suisse et ça me mettait en maudit. »

Son père, Serge, affiche son plus grand sourire en racontant cette histoire qui produit le même effet sur Sylvie, la mère de l’attaquant des Cataractes de Shawinigan. 

« Mon père n’arrêtait pas de me dire ‘Non, tu dois prendre pour le Canada’. Je ne comprenais pas encore », a réagi Mavrik, avec amusement, à propos de son plus vieux souvenir au sujet de l’intournable tournoi des Fêtes. 

À cette époque, le petit Mavrik aimait donc le chandail rouge de la Suisse et le hockey, mais encore plus les tracteurs de la ferme familiale. Il faut savoir qu’avant de quitter sa terre pour l’aventure du Midget AAA, il s’imaginait devenir la huitième génération des Bourque à opérer la ferme laitière de Plessisville. 

« Il n’était pas tuable sur le tracteur, il restait éveillé toute la journée à mes côtés dans la cabine alors que son petit frère, ce n’était pas long qu’il s’endormait. Dans ces années-là, je pensais plus qu’il allait faire un agriculteur qu’un joueur de hockey! », a lancé son paternel.

Le choix de première ronde des Stars de Dallas, en 2020, a confirmé le tout en entrevue avec le collègue Stéphane Leroux. 

« Jusqu’à 14 ans, dans ma tête, je voulais plus reprendre la ferme que jouer au hockey même. Si je n’avais pas connu le hockey, je serais probablement établi avec mon père », a admis le droitier qui travaillerait aussi avec son oncle. 

Dans une famille tissée serrée comme la sienne, ce n’est pas évident pour les parents de voir l’un de leurs quatre enfants s’éloigner. Chaque fois qu’il revient à la maison pour quelques jours, le plaisir est au rendez-vous. Plus souvent qu’autrement, ça se produit durant les vacances de Noël. Et qu’est-ce que Mavrik s’empresse de faire?

« Il monopolise la télé chaque fois qu’il débarque! Parfois, ça nous arrivait de lui dire qu’il y a d’autres choses à regarder (que le CMJ) », a confié Sylvie en sentant les émotions monter en elle. 

« Mais il disait ‘Maman, il faut que je l’écoute parce qu’un jour, c’est moi qui va représenter le Canada. Quand tu entends ça, comme parent, tu ne veux pas briser ses rêves, mais en même temps tu te dis qu’il y a si peu d’élus. Sauf que là, de savoir qu’il est là, ouf... », a ajouté sa mère avec yeux remplis de larmes et de fierté. 

Instantanément, elle revoit dans sa tête une scène magique qui faisait tant plaisir à Mavrik et son petit frère Wylen quand, enfants, ils suivaient tout de ce tournoi. 

« Ils jouaient au hockey dans la maison et ils me demandaient de passer la balayeuse, c’était comme la zamboni dans leur jeu. Après ça, il fallait que je leur chante l’Ô Canada. Quand on va être là-bas et qu’on va entendre l’hymne national ... », a prononcé Sylvie en essuyant des larmes qui seront encore plus nombreuses, le 26 décembre, au lancement du match Canada-Tchéquie. 

Aucun plan B pour la famille Bourque cette année 

L’émotion chez ses parents vient de tous les efforts effectués par Mavrik, un jeune homme discipliné, terre à terre et zéro tête enflée comme l’a déjà dit son entraîneur Daniel Renaud. 

Plessisville, ce n’est pas Longueuil, Laval ou même Victoriaville. Dans son petit coin de pays, Bourque connaît presque tout le monde et il a développé de solides amitiés avec plusieurs personnes dont son voisin, Hugo Lamontagne, un grand passionné de hockey qui est papa de quatre petits garçons. 

« Quand on va le voir jouer à Victo ou à Shawi et qu’il voit mes garçons près de la bande, il prend toujours le temps de leur lancer une rondelle. Partout où il est allé, il a rendu ses équipes meilleures, mais il demeure toujours le petit Mavrik généreux de son temps », a souligné Lamontagne, un enseignant à la Polyvalente La Samare. 

Tous les petits récits du genre réchauffent le cœur des parents de Bourque sans trop les étonner, par contre. 

« C’est ce qu’on lui dit depuis toujours, de rester lui-même et se souvenir d’où il vient », a expliqué son père. 

Lamontagne a connu Bourque sur le 8e Rang. Quand le numéro 22 des Cataractes a le temps de revenir dans sa région natale, Lamontagne et ses enfants sont toujours heureux de le voir passer dans un tracteur pour donner un coup de main à la famille, mais ils sont encore plus fascinés de le voir s’entraîner. 

« Il va dans la cour asphaltée de l’étable avec ses patins à roues alignées et il fait des parcours avec une balle et son bâton. Sinon, on le voit en bedaine à prendre des lancers avec sa chaudière de rondelles. Je ne te cacherai pas que je tripe à fond de voir ce qu’il vit puisque c’est tellement mérité et je lui ai dit », a confié Lamontagne.

Quand la passion y est, Bourque affiche une grande persévérance et il ne lésine pas sur la discipline. 

« Tous ceux qui l’ont eu comme joueur de hockey vont le dire, il est plus vieux que son âge et il a une maturité incroyable », a soulevé Sylvie tandis que son père est impressionné par ses rares écarts de conduite à son âge. 

Autant que possible, il évite même la poutine. Une mission colossale quand on provient de la région des Bois-Francs, il faut l’admettre. 

Ses parents sont épatés par son dévouement, mais ils savent que c’est sage d’envisager un plan B. Ça faisait quelques fois que son père lui glissait ce message. 

« Il dit à Serge ‘Toi, à part la ferme, avais-tu un plan B? Non. C’est parce que ton plan A, tu y crois tellement qu’il finit par fonctionner », a raconté sa mère.  

« Il m’avait bien eu avec ses réponses », a dû avouer, en riant, son papa. 

Cette année, durant les Fêtes, la grande famille Bourque n’aura pas de plan B. Ses sœurs Émy et Myka et son frère Wylen ne rateront rien de l’action du CMJ. Ce sera la même chose pour la famille de Lamontagne, les quatre garçons aiment tellement Mavrik qu’ils le choisissent parfois au PlayStation au lieu de Sidney Crosby. Dans quelques jours, ils pourront le voir, en vrai, dans leur télé, avec le chandail d’Équipe Canada. Assurément, ils ne tomberont pas en amour avec le plus beau chandail, mais plutôt celui porté par Bourque.