Le Canadien venait à peine d'effectuer une remontée à laquelle personne ne croyait, l'équipe était encore en état de choc après avoir éliminé les Capitals en sept matchs, quand Bob Gainey eut cette courte et rationnelle réaction, typique de sa personnalité calme et pondérée: « On ne sait jamais, dans le sport! »

Gainey, qui venait de laisser son poste de directeur général quelques mois auparavant, mais qui était dans l'entourage de l'équipe au cours des séries, n'était peut-être pas tout à fait dans le ton de l'euphorie qui régnait autour du vestiaire du Canadien, à Washington, en ce soir du 28 avril 2010. Mais son commentaire était très à propos. Doit-on rappeler qu'en saison régulière le Canadien concédait 33 points au classement aux Capitals de Washington qui, en principe, ne devaient faire qu'une bouchée du Tricolore en première ronde éliminatoire?

Évidemment, on ne peut aborder un retour sur le printemps 2010 sans placer le nom de Jaroslav Halak à l'avant-scène. Certains, du reste, ne retiennent que le nom du gardien slovaque en souvenir de cet extraordinaire accomplissement du Canadien. Et c'est bien compréhensible.

Cela dit, tout n'avait pas été à la hauteur pour Halak au début de cette série. Après avoir bloqué 45 tirs lors du premier match, remporté 3-2 par le CH en prolongation, Halak avait concédé 6 buts dans le deuxième (une défaite en prolongation). Il fut remplacé par Carey Price après trois buts des Caps au cours du troisième et pour tout le quatrième, tout à l'avantage de Washington.

L'entraîneur Jacques Martin a joué une carte miracle lors de la cinquième rencontre en redonnant le filet à Jaroslav Halak, dans une situation désespérée, à Washington. Ce fut le début d'une séquence irrésistible. Halak multiplia les miracles contre les francs-tireurs des Capitals et le plus souvent, à des moments névralgiques. Il dut faire face à un total de 134 tirs au cours des trois derniers affrontements et n'a flanché qu'une seule fois, à chacun des trois matchs! Il fut bombardé de 22 tirs lors de la troisième période du match 7, alors que les Capitals cherchaient à créer l'égalité. Alexander Ovechkin, Alexander Semin, Nicklas Backstrom, Mike Knuble, Brendan Morrison et Mike Green, tous de bons marqueurs, n'en finissait plus de hocher la tête, à tour de rôle!

À chacune des étapes de ce revirement spectaculaire, l'intensité montait de quelques crans pour nous tous, qui étions assignés aux reportages de la série. La météo était magnifique dans la capitale américaine tout juste avant la rencontre ultime, les lilas étaient en fleurs et nous avions consacré pratiquement notre marche d'une heure, en route vers la séance d'échauffement du matin, à discuter des exploits de Halak. On se demandait, légitimement, s'il allait pouvoir continuer de la sorte, contre une attaque qui avait marqué un impressionnant total de 318 buts en saison régulière. La réponse est venue quelques heures plus tard et elle aura duré quelques semaines de plus, Halak et le Canadien répétant leurs exploits contre les Penguins de Pittsburgh, la deuxième meilleure attaque de l'Est, derrière les Capitals!

Personnellement, cette série de 2010 Montréal-Washington, représente certainement l'un des moments les plus intenses de ma carrière. Décrire, de seconde en seconde, autant d'arrêts importants de la part d'un gardien qui ne devait même pas être l'homme de la situation, au sein d'une formation qui ne devait pas être de taille, cela ne s'oublie pas.

Au cours des prochains jours, RDS vous fera revivre les quatre victoires du Canadien qui ont permis à l'équipe de créer l'une des plus grandes surprises de son histoire. J'espère que vous serez des nôtres et que vous pourrez, vous aussi, renouer avec tout l'engouement qui a marqué cette série mémorable!