MONTRÉAL – Le 24 mai, trois jours après que l’Impact eut atteint le fond du baril en laissant un adversaire en désavantage numérique faire la loi au Stade Saputo, Daniel Lovitz poussait un cri du cœur qui s’était quelque peu perdu dans le négativisme du moment.

« C’est n’est qu’une question de temps avant que ça clique, avait prédit le défenseur alors que son équipe venait de perdre sept de ses huit derniers matchs. Je sais qu’on traverse des moments très difficiles, mais c’est important de comprendre que dès que ça cliquera, ça sera pour de bon. Nos succès seront durables et je crois que les longues léthargies seront définitivement chose du passé. »

Complètement farfelue il y a un mois, cette déclaration est peut-être sur le point de s’avérer prophétique. Peut-être.

En remportant trois de ses quatre derniers matchs, l’Impact ne s’est pas débarrassé de tous ses problèmes, mais il a fait assez de progrès au classement pour pouvoir se permettre d’envisager la deuxième portion de son calendrier avec optimisme. Au point médian de sa saison, il n’est qu’à trois points de la mince ligne rouge séparant les prétendants des aspirants.

Comment en est-on arrivé là? De l’extérieur, il apparaît évident qu’une prise en main collective s’est opérée. Le feu a été mis aux agendas personnels. La bouderie et les accusations ont fait place au volontariat et à la solidarité.  

Un navire qui coule se retrouvera rapidement dans l’abysse si tous ses matelots cèdent à la panique et courent aveuglément vers le pont sans considération pour les intentions de leurs collègues. En revanche, une chaîne humaine dans laquelle chacun fera sa part pour vider le contenu de la cale ne règlera peut-être pas tout d’un coup, mais permettra à tout le moins d’acheter du temps jusqu’à ce que le problème soit réglé à la source.  

« Le match [contre Orlando], au niveau de la cohésion de l’équipe, était sans aucun doute le meilleur qu’on a fait, faisait remarquer l’entraîneur-chef Rémi Garde au retour d’un rare déplacement victorieux en Floride, mardi. J’ai senti chez les joueurs une envie de jouer les uns pour les autres qui était d’un excellent niveau. Je le répète à chaque fois, c’est un prérequis avant chaque match et c’est quelque chose sur quoi on doit s’appuyer maintenant. »

Garde a rendu hommage à ses joueurs pour le revirement de situation actuel. « Je pense qu’ils se sont révoltés », sont les mots qu’il a utilisés en point de presse mardi.

Cette révolte, elle a eu lieu quelques jours après la prédiction de Lovitz, qui avait été suivie d’une défaite sans appel au Minnesota. Au retour à Montréal, l’abcès avait éclaté. Garde avait noté le manque de talent au sein de son effectif. À fleur de peau, ses ouailles avaient repris l’entraînement dans un climat tendu. Ignacio Piatti avait démontré de rares signes d’impatience. Chris Duvall avait haussé le ton. Dominic Oduro avait joué les médiateurs.

La suite des choses ne nous laisse d’autre choix que d’identifier l’éclatement de cette crise comme le moment charnière de la saison.

« Point tournant, peut-être, n’a pas nié Samuel Piette. Je pense que c’est à partir de ce moment que les joueurs se sont levés et ont pris un peu plus de responsabilités. Il y a eu cet épisode, mais d’autres fois ça a été moi, d’autres fois Nacho. On a pris les choses en main. Au final, c’est nous les acteurs sur le terrain, c’est nous qui décidons comment le match se déroule. »

Trop tôt pour s’emporter

L’Impact est-il donc en train de faire taire ses dénigreurs?

« Ce qui est important aujourd’hui, ce n’est pas de se taper sur le ventre et d’être content de ce qu’on a fait, prévient Garde. On a redressé une barre qu’on n’aurait jamais dû laisser partir. Donc aujourd’hui, bien sûr qu’il y a un peu de soulagement, mais il n’en faut pas trop dans le football professionnel. Il nous reste 17 matchs et ces 17 matchs, on doit les disputer avec l’état d’esprit qu’on a eu sur les trois ou quatre derniers. Là, on sera peut-être en mesure d’atteindre ce qu’on a tous envie d’atteindre. »

Pour y arriver, l’Impact pourra compter sur un calendrier plus clément. Trois de ses quatre prochains matchs aura lieu à domicile, où il a calmement remporté ses deux derniers matchs. Après avoir passé la majeure partie du printemps dans ses valises, le onze montréalais profitera du retour du balancier dans les chauds mois estivaux.

« C’est un facteur qui a été très important pour nous, un de ceux qui ont été en notre défaveur, a reconnu Garde, tout en demeurant prudent. Bien sûr que les prochains matchs à la maison seront importants. Les matchs perdus contre Philadelphie et le Galaxy, ici à domicile, nous ont fait très mal. Maintenant, ce n’est pas parce qu’on joue à domicile qu’on empoche les victoires comme ça. Bien sûr que c’est un petit avantage, mais je crois qu’on doit d’abord se concentrer sur le contenu des matchs et continuer à être bien équilibrés, à bien défendre. »

Les mauvaises langues diront que l’Impact n’a rien fait pour se péter les bretelles en balayant une équipe d’Orlando en pleine déroute. Dans cette optique, son prochain test représente une réelle opportunité de clouer le bec aux sceptiques.

Le Sporting Kansas City arrivera à Montréal en tant que leader du classement de l’Association Est. Il n’a subi que deux revers cette année. Samedi dernier, il a comblé un déficit de deux buts afin de renverse le Dynamo de Houston 3-2.

« Le championnat ne s’arrêtera pas samedi, mais c’est sûr qu’on va jouer une équipe dont la cote de confiance est inversement proportionnelle à celle d’Orlando, prévoit Garde. Kansas City n’est pas là par hasard, ils font un très bon championnat. Pour nous, ça sera l’occasion de tester notre résistance, notre niveau de jeu, notre envie d’aller de l’avant face à une bonne opposition. »

« On a eu des bonnes performances, des bons résultats dernièrement, mais on sait que ça peut se faire oublier assez vite en enchaînant des mauvaises performances », réalise Piette.