Tous ceux qui ont eu l’occasion de partager leur passion du baseball avec Felipe Alou, comptez-vous chanceux. Felipe est tellement passionné de son sport qu’il pourrait vous en jaser pendant des lunes. J’ai croisé Felipe Alou pour la première fois sur un terrain de baseball de Lantana en Floride en mars 1986. Denis Boucher et moi étions invités par Baseball Québec à participer au camp des ligues mineures des Expos. Je me rappelle qu’un bon matin, on m’invite à m’entraîner avec l’équipe de West Palm Beach dirigé alors par Felipe. Il était au courant de notre présence et m’avait simplement dit de ne pas me mettre de pression. Le but du jeu est de frapper, de lancer et d’attraper la balle comme tu le fais au Canada, rien de plus, rien de moins. Après les deux semaines que nous avions passées avec les joueurs professionnels, Felipe nous avait serré la main en disant que l’on allait assurément se revoir.

Il avait vu juste puisqu’à peine 3 ans plus tard, je me présente au stade municipal de West Palm Beach dans l’uniforme des Dodgers de Vero Beach et il était là, dans l’abri des joueurs des Expos. Je me demandais si je devais aller le voir ou de laisser faire et un bon jour on se serrera la pince. Il me devance puisque lors de l’exercice au bâton, c’est lui qui s’approche et me dit dans son anglais à accent latin, je t’avais dit qu’on allait se revoir!! J’étais vendu à Felipe dès ma première rencontre en 1986, mais de le voir agir ainsi en 1989 m’a complètement séduit. Ma belle histoire avec Felipe se poursuit durant l’été puisqu’il fait partie des entraîneurs pour le Match des étoiles de la ligue de la Floride. C’est à ce moment que j’ai réalisé que je pouvais l’écouter pendant des heures à nous parler de baseball. Un des nombreux conseils que j’ai retenus est celui de ne jamais gaspiller une présence au bâton puisqu’on ne sait jamais qui nous regarde ou qui est en train de nous évaluer ou même qui pourrait nous aider à atteindre le but ultime, c’est-à-dire, le baseball majeur.

Il n’avait pas tort puisque Felipe a longtemps fait référence à la « Florida State League » dans ses commentaires lorsqu’il était à la barre des Expos. Il a une mémoire phénoménale et il se souvenait de tous les joueurs qui l’ont marqué lors de ses nombreuses années à diriger dans les ligues mineures.

L’histoire est connue, Felipe remplace Tom Runnells par intérim en 1992 devenant ainsi le premier dominicain à diriger une équipe du baseball majeur. Tous ceux qui l’ont côtoyé lors de ses nombreuses années à diriger des équipes des ligues mineures savaient qu’il était unique. Felipe avait un sens du jeu extrêmement développé. Il semblait une ou deux manches d’avance sur ses rivaux. Il avait le tour d’échauffer le bon releveur au bon moment ou utiliser une stratégie qui surprenait l’adversaire. L’exécution des jeux de base était la clé pour lui. Tu pouvais être spectaculaire par moment, mais si tu commettais une erreur sur un jeu de routine ou de base, ça ne passait pas. Il avait également le tour d’aller chercher le meilleur de chacun. Même les joueurs qui semblaient difficiles à diriger, Felipe trouvait une manière qu’il soit à leur meilleur entre les fameuses lignes blanches! Il détestait les retraits sur des prises pour ses frappeurs. Que pouvons-nous bâtir avec un retrait sur des prises, avait-il dit!

Felipe avait et a toujours un charisme qui commande un respect instantané. Sa relation avec le public québécois prouve qu’il était un vrai et que lui tenait à cette franchise plus que tout. Quelque part, je me dis que si l’on avait impliqué cet homme lorsque c’était le temps de prendre les grandes décisions sur l’avenir des Expos, il aurait possiblement fait pencher la balance! Il avait une telle influence et surtout, une telle intelligence. Peu de gens peuvent se vanter d’avoir l’attention de tout un public lorsqu’il parle. Felipe avait ce genre de respect! Mais, personne ne lui a demandé!

C’est donc un grand homme qui voit les portes du Temple canadien s’ouvrir. Évidemment, un honneur pleinement mérité. Je remercie Felipe Alou pour tout ce qu’il a fait pour la cause du baseball à Montréal, mais surtout à toutes ces leçons de vie qu’il nous a si gentiment offertes lors des ses nombreuses années dans l’organisation des Expos. Un modèle à suivre, un mentor pour tous! Bravo Felipe!