TORONTO - Parce que leurs chers Maple Leafs n’ont pas gagné la coupe Stanley depuis 1967 et que leurs Blue Jays sont de retour en séries pour la première fois depuis leurs conquêtes de la Série mondiale en 1992 et 1993, les amateurs de sports de Toronto sont habitués d’attendre patiemment, ou non, les succès de leurs clubs favoris.

Les Argonauts les gâtent de temps en temps. Je veux bien. Mais les Torontois attendent plus. J’irais jusqu’à écrire qu’ils méritent mieux.

Débarqués au Rogers Centre et dans le centre-ville avec la conviction que les Jays sont à quelques victoires de leur offrir LA grande fête sportive dont ils rêvent depuis si longtemps, les amateurs devront patienter encore. Du moins un peu. Malgré la présence de leur as lanceur David Price au monticule, malgré la puissance de leur attaque, malgré l’appui inconditionnel qui les transporte comme une grosse vague d’un bout à l’autre du pays, les Jays sont passés dans le beurre jeudi. Ou dans la mitaine si vous préférez un terme plus baseball.

Loin de la panique

La défaite de 5-3 n’est toutefois pas venue à bout de l’enthousiasme de leurs partisans. Loin de là. Sur les trottoirs entourant le Rogers Center personne n’a lancé à bout de bras ou brûlé son chandail aux couleurs de l’équipe de l’heure à Toronto. Un triste sort qui sera réservé aux chandails des Maple Leafs encore cette année si la tendance se maintient...

Pas vu non plus de casquettes enfoncées sur un piquet en guise de geste de frustration après une défaite que personne ne semblait envisager avant que l’arbitre James Hoye ne donne le signal du « Play Ball » à 15 h 37 sous un dôme fermé en dépit de la belle journée d’automne qui égayait Toronto presque autant que la fièvre du baseball jeudi. Presque...

Tout au plus, j’ai entendu un fan huer lorsque, en fin de huitième manche, Jose Bautista a frappé une très haute chandelle captée dans le territoire des balles fausses pour une fin hâtive à la présence des Jays au bâton. Si j’ai entendu ce partisan huer, c’est parce qu’il était assis tout juste sous la galerie de presse. Et à en juger par la réaction des amateurs qui l’entouraient, ce cri de protestation, loin d’avoir été suivi, a plutôt été rabroué par des fans qui croient en leur club et en ses chances de se rendre jusqu’au bout. Des fans qui y croient très fort.

Gâtés à plusieurs reprises cette saison par la plus redoutable offensive des majeures, les fans des Jays ont pleinement raison de garder confiance. Ils savent mieux que quiconque qu’avec un coup de bâton de Bautista ici, un autre d’Encarnacion là, sans oublier la contribution des Russell Martin, Josh Donaldson, Ben Revere et autres Troy Tulowitzki ou Kevin Pillar, les Jays peuvent réaliser des remontées dont d’autres clubs ne peuvent pas même rêver.

C’est sans doute pourquoi jeudi, chaque fois qu’une balle était frappée avec force, au sol ou dans les airs, les rares fans qui étaient assis se relevaient avec les autres pour suivre la trajectoire en espérant la voir se rendre à la clôture, ou mieux, la voir tomber de l’autre côté.

Malgré un enthousiasme évident moussé par la confiance qu’ils affichent en leurs favoris, les fans des Jays retombaient toutefois dans un calme un peu surprenant dès que leur club ratait une occasion, ou pire que les Rangers ajoutaient coups sûrs et points à leur fiche. Comme si derrière l’enthousiasme normal qui déferle sur Toronto, la dure réalité des disettes de 48 ans des Leafs et de 23 ans des Jays ne venait miner la confiance des fans.

Cela dit, ces séquences de calme relatif cédaient rapidement toute la place à la fête dans le stade dès que les Jays donnaient le moindre signe d’une possible remontée.

« C’était vraiment magique de sentir la foule derrière nous comme ça. De la sentir se lever dès qu’on touchait la balle, dès qu’on réalisait un retrait, dès que nos lanceurs s’approchaient d’un retrait sur des prises ou du troisième retrait d’une manche. Il y a vraiment une grosse vague qui nous transporte. Il ne faut pas qu’elle se brise. Il ne faut pas qu’on la manque. Ça doit continuer », assurait le receveur québécois Russell Martin avec qui j’ai quitté le vestiaire très tranquille des Jays après la rencontre.

Donaldson et Bautista blessés

Plus encore que la défaite, un revers que Marcus Stroman pourra effacer dès cet après-midi s’il prolonge à cinq sa série de victoires depuis son retour au jeu il y a à peine un mois, les pertes de Josh Donaldson et Jose Bautista en cours de rencontre ont de quoi inquiéter les Jays et leurs fans.

Je veux bien croire qu’Adrian Beltre a dû déclarer forfait dans le camp des Rangers. Mais comme l’a reconnu Russell Martin après la partie : « on a de bons joueurs pour venir en relève dans ce vestiaire, mais perdre tes deuxième et troisième frappeurs, ça fait mal. »

Mettons!

Bautista a retraité au vestiaire en début de neuvième alors que des crampes à une jambe l’ont empêché de prendre son poste au champ droit. Des crampes, ça fait mal à mourir. Quand elles te frappent, tu voudrais te faire amputer sans même être anesthésié. Mais elles repartent souvent aussi vite qu’elles sont venues. On peut donc croire qu’une fois bien réhydraté, Bautista sera vite rétabli et qu’il sera à son poste vendredi.

Dans le cas de Josh « MVP » Donaldson, c’est moins clair. Plus nébuleux même. Atteint à la tête par le genou gauche de Rougned Odor alors qu’il glissait au deuxième but pour briser un double jeu, « MVP » a été secoué. Il a effectué un retour en défensive, mais une fois les Jays au bâton à la manche suivante, il a retraité au vestiaire par mesure préventive.

John Gibbons, le gérant des Jays, a indiqué après la rencontre que les tests effectués par les médecins de l’équipe avaient permis d’écarter un diagnostic de commotion cérébrale. Pour l’instant. Car après un tel impact, personne ne peut prévoir dans quel état le troisième but étoile des Jays se réveillera demain matin. Comme le match est à 12 h 45, s’il se réveille avec une migraine, avec la nausée ou simplement quelques étourdissements et la vue voilée, il n’aura pas grand temps pour retrouver son aplomb et sa place au sein de la formation torontoise.

Ce qui serait une très mauvaise nouvelle. Car si les Jays peuvent réellement croire en leurs chances de revenir de l’arrière pour remporter la série trois de cinq qui les oppose aux Rangers, ces chances seront bien meilleures si Josh Donaldson est de la partie.

Ce ne serait pas une vilaine idée non plus que l’attaque frappe et marque des points. Et aussi, que les lanceurs soient à la hauteur des attentes. Sinon : l’attente déjà très longue des amateurs de sports de Toronto, tout comme celles des amateurs de sports de Montréal est-il besoin d’ajouter, pourrait bien se prolonger encore longtemps avant d’être récompensée.

Toit ouvert ou fermé

Le baseball majeur a décidé que le premier match Rangers-Jays serait disputé sous un dôme fermé. Aucune raison officielle n’a été donnée par le bureau du commissaire Rob Manfred.

La crainte que la température passe de fraiche qu’elle était en début de match à froide une fois le soleil sur son déclin pourrait expliquer cette décision. Bien qu’on puisse ouvrir ou fermer rapidement le dôme du Rogers Centre en cours de partie, il semble qu’on préfère que les conditions demeurent le plus stable possible du début à la fin de la partie.

Ce qui me semble bien plus logique que la théorie du complot anti-canadien tel que stipulé par Don Cherry. Un complot pour quoi d’ailleurs? Pour éviter que les joueurs du Texas meurent de froid si on avait joué à ciel ouvert alors que ceux des Jays auraient été tout à fait à l’aise puisqu’ils sont devenus des coureurs des bois du grand nord depuis qu’ils vivent à Toronto?

N’importe quoi!

Parce que le match débute plus tôt vendredi et que la météo prévoit un mercure un peu plus chaud, il sera toutefois intéressant de voir si on optera pour un stade ouvert ou couvert dans le cadre de la deuxième partie.

Personnellement, j’aimerais beaucoup mieux un match en plein air. Mais ce n’est pas moi qui décide. La décision viendra tôt vendredi matin j’imagine. À moins qu’elle ne soit déjà prise.