Il est facile de dire tout haut que Tim Raines devrait être au Temple de la renommée du baseball puisque nous l’avons vu jouer et nous l’avons adoré dans l’uniforme des Expos. Mais a-t-il vraiment tout ce qu’il faut pour être parmi les éternels?

Je ne m’en cache pas, Tim Raines a eu une énorme influence sur ma carrière. Quelque chose me dit que je ne suis pas le seul. Le gars était tout simplement incroyable. Voilà un jeune joueur repêché d’une école secondaire américaine en 5e ronde pour son côté athlétique. Il n’était pas le meilleur frappeur, mais ses fibres rapides et ses habiletés laissaient entrevoir quelque chose de bien spécial. À peine deux ans plus tard, les Expos lui font signe cinq jours avant ses 20 ans, pour son baptême des ligues majeures. À 21 ans, il était déjà un joueur étoile du baseball majeur. Ce n'est pas pour rien que j’ai tenté pendant toutes ces années d’imiter son élan et d’analyser tout de cet élan court, rapide et explosif. Les années se sont succédées et Raines a gardé une constance remarquable en volant des buts et en marquant des points pour son équipe. Dans le fond, Raines était en avance sur son temps.

Tim RainesPendant que l’on valorisait les frappeurs de puissance, Raines accumulait les buts sur balles et les présences sur les buts. Le fameux OPS (moyenne de présence sur les buts + la moyenne de puissance) n’existait pas. Pourtant, parmi les statistiques les plus utilisées pour comprendre l’apport d’un joueur en attaque, Raines a maintenu un OPS de ,810 durant sa carrière de 23 ans et une moyenne de présence sur les buts de ,385, ce qui est, vous comprendrez, remarquable.

Par ailleurs, une autre nouvelle statistique sabermétrique du baseball, le WAR (Win Above Replacement que l’on pourrait traduire par victoires au-dessus du remplacement) qui vise à quantifier le nombre de victoires supplémentaires qu'un joueur procure à son équipe si elle le préfère à un joueur de niveau égal à la moyenne, donne une avance à Raines (69,1) sur Tony Gwynn (68,8) en carrière. Gwynn, a été intronisé à sa première année d’admissibilité et était reconnu pour être le meilleur frappeur de sa génération. Gwynn a conservé une moyenne en carrière époustouflante de ,338, ce qui a généré une moyenne de présence sur les buts de ,388 soit seulement ,003 de plus que Raines. Durant sa carrière de 20 ans, sur une moyenne de 162 matchs, Gwynn marquait 92 points contre 102 pour Raines, et je n’ai pas encore souligné l’aspect vol de but.

Raines est au cinquième rang de tous les temps pour le nombre de vols de buts avec 808. Les quatre joueurs qui le devancent sont tous au Temple de la renommée. Mais voler un but est un art, et pour rendre cette statistique efficace, il faut considérer le pourcentage de réussite. Un taux d’efficacité de moins de 70 % est considéré comme ordinaire, ce qui enlève toute valeur au vol. Parmi les joueurs avec 400 buts volés et plus en carrière, Raines vient au 1er rang avec un taux de 84,7. Pour vous donner une idée, le meneur de tous les temps, Ricky Henderson (1406), est à 80,1 %. Vous direz que 4,6 % de différence n’est pas la fin du monde. En chiffre, ça veut dire qu’il faudrait que Henderson retourne au jeu et vol 448 buts consécutifs sans se faire surprendre une seule fois pour atteindre le taux de Raines! Voilà la différence!

Pour avoir évolué dans le baseball professionnel durant quelques années, j’ai rarement entendu parler d’un joueur qui faisait l’unanimité, et pourtant Raines était un de ceux-là. Et le plus surprenant, c’est que les raisons variaient. Voici quelques commentaires que j’entendais sur lui :

- Le plus bel élan!
- Le meilleur athlète point à la ligne!
- Le plus rapide avec intelligence!
- Le meilleur gars au monde
- Une attitude hors du commun

Et j’en oublie certainement!

Ce n’est donc pas juste dans mon imaginaire de jeune partisan des Expos que Raines devrait être intronisé au Temple de la renommée du baseball à Cooperstown, mais avec statistiques à l’appui. Si jamais Raines ne passe pas, il faudra repenser à qui on offre le droit de voter. J’ai confiance que cette année sera la bonne et que le nom de Tim Raines sera gravé à tout jamais dans l’histoire du baseball. Cette fois,  il ne l’aura pas volé!