Si je vous avais dit que les Wildcats de Kentucky allaient rater le championnat national en début d’année, vous ne m’auriez certainement pas cru. C’est pourtant ce qui risque de se produire alors que la troupe de John Calipari sera privée des services de Nerlens Noël, projeté parmi les 5 premiers choix au prochain repêchage de la NBA, jusqu’à la fin de la saison.

La blessure

Je vous replonge dans l’action. Mardi dernier, à RDS2, les Gators de l’Université Florida voguent allégrement vers la victoire contre les Wildcats de Kentucky, dans un match qui a comme enjeu le 1er rang de la conférence SEC. Perdre un match, c’est une chose, mais avec un peu plus de 8 minutes à faire à la rencontre, la saison des Wildcats et la carrière universitaire d’un jeune homme de 18 ans, Nerlens Noël, allaient basculer.

Nerlens NoelAprès avoir rattrapé Mike Rosario, qui s’en allait seul au panier, Noël bloque le tir de son rival, avant de retomber sur ses pieds et voir son genou gauche heurter lourdement la structure du panier. Résultat : déchirure du ligament croisé antérieur (cœurs sensibles s’abstenir : photo lorsqu'il heurte la structure). J’ai eu à décrire ces longs moments d’agonie de Noël en compagnie de Simon Bibeau, porte-couleurs des Redmen de McGill, qui a justement subi cette même blessure la saison dernière. Sans qu’il dise un seul mot, je pouvais lire toute l’empathie qu’avait Simon pour Nerlens à travers son visage; les souvenirs de cette blessure, la douleur, l’opération, la réadaptation et la crainte de ne plus jamais être le même joueur par la suite.

Dans le cas de Noël, on peut ajouter une autre crainte : celle de voir son rang de sélection au prochain repêchage de la NBA glisser (ce qui pourrait faire en sorte qu’il touche moins d’argent que prévu). On doit également se demander si Noël ne sera pas tenté de dissiper tous les doutes concernant sa blessure en revenant jouer une 2e saison dans la NCAA en 2013-2014.

L’absence de Noël s’est fait sentir contre Tennessee

Les attentes étaient élevées, lire injustement élevées, envers Noël avant le début de la saison. Dans l’engouement du championnat de 2012 et après avoir vu John Calipari obtenir la meilleure récolte de joueurs de 1re année dans la NCAA, on s’attendait à ce que Noël soit en mesure de remplacer le 1er choix au total du repêchage de la NBA en juin dernier, Anthony Davis.

S’il n’a jamais été en mesure d’obtenir les mêmes statistiques que Davis à l’attaque, Noël a répondu aux attentes en défense. Avant sa blessure, il était premier dans la NCAA au chapitre des contres, avec 4,4 par rencontre (par rapport à 4,7 pour Davis l’an dernier). Les chiffres ne racontent toutefois qu’une partie de l’histoire. À 6 pieds 10 pouces, Noël est rapide et agile tel un félin, ce qui lui donne un avantage par rapport à plusieurs joueurs à sa position. Sa simple présence sème un doute dans la tête de ses adversaires. Il influence plusieurs tirs sans nécessairement les bloquer. Voilà exactement pourquoi les Wildcats se retrouvent dans le pétrin.

Personne ne peut remplacer Noël en défense, même pas Willie Cauley-Stein, qui a connu un match très difficile contre l’Université Florida, au grand plaisir d’Erik Murphy, qui a profité de chaque moment de repos de Noël sur le banc pour attaquer Cauley-Stein. Ce dernier n’a tout simplement pas la vitesse latérale requise pour défendre de façon efficace dans la clé.

Samedi, à leur premier match sans Noël, les Wildcats ont subi un humiliant revers de 88 à 58 contre les Volunteers de l’Université Tennessee (13 victoires, 10 revers avant le match contre Kentucky), une équipe qui ne marque que 63,7 points par match en moyenne (265e rang / 347 dans la NCAA) et qui en accorde 62,3 (80e).

John Calipari doit trouver une solution et vite. Déjà qu’il n’a jamais été en mesure de faire marcher toutes les pièces du casse-tête ensemble lorsque Noël était là alors imaginez-vous sans lui. Les détracteurs de Calipari se lèchent les lèvres à l’idée de voir les Wildcats rater le March Madness. L’entraîneur des Wildcats a roulé les dés cette année en faisant confiance à de jeunes joueurs de première année, désireux de passer à la NBA dès l’an prochain. Contrairement à l’an dernier, Calipari a cette fois perdu son pari.

Si Kentucky devait rater le tournoi national américain, il s’agirait de la première fois depuis 2010 (North Carolina) que les champions en titre ne participeraient pas au March Madness. Parlant des Tar Heels, leur situation est un peu moins précaire, mais ils devront connaître une bonne fin de saison pour être en mesure de participer au March Madness. On pourrait alors revivre la même situation qu’en 1974, alors que Kentucky et North Carolina avaient tous les deux raté la grande danse.

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