Le règne de Bermane Stiverne à titre de champion mondial WBC des lourds se résume à une seule défense infructueuse. Son règne n’aura duré que sept mois et trois jours, ou si vous aimez mieux, une période de 252 jours. C’est toujours mieux que le record de tous les temps détenu par Tony (TNT) Tucker dont la domination IBF n’avait duré que 64 jours, soit du 30 mai 1987 au 1er août 1987.

Russ Anber avait raison sur toute la ligne : « Deontay Wilder sera champion un jour, prenez ma parole », m’avait-il confié dans le creux de l’oreille.

Wilder détrône Stiverne

Utilisant une portée aussi longue qu’un poteau de téléphone, Wilder a prouvé qu’il n’était pas simplement un boxeur à la Butterbean (le champion des 4 rounds), mais qu’il était un athlète superbement taillé dans le roc capable de bien boxer pendant 36 minutes.

La plupart des experts croyaient que Wilder aurait des difficultés dans la deuxième partie du combat, lui qui n’avait jamais fait plus que quatre rounds en 32 combats, mais ce ne fut pas le cas. Par contre, pour la première fois de son séjour professionnel il voyait un rival l’obliger à mettre l’issue de la rencontre entre les mains des juges.   

Quant à Bermane Stiverne, à 36 ans, ses meilleurs jours sont maintenant derrière lui et je doute qu’on le revoie un jour dans un match de championnat. Mais je lui souhaite quand même bonne chance.

Incapable de dégainer

Après sa défaite par décision, Stiverne a déclaré à Jim Gray qu’il n’avait jamais été en mesure de dégainer et de couper le ring à son rival avec le résultat que l’on connaît.   

« Ce n'était pas ma soirée »

Pour la première fois depuis 2007, soit depuis les beaux jours de Shannon Briggs, les Américains se retrouvent avec un champion « made in the USA ».   

Le nouveau monarque WBC a la langue bien déliée. Peut-être pas autant que Muhammad Ali, mais il parle comme un vrai fils de l’Oncle Sam.   

« Je vous l’avais dit que je pouvais faire douze rounds de boxe, a-t-il expliqué après sa victoire. Maintenant, amenez-moi Tyson Fury et ensuite ce sera Wladimir Klitschko... »   

Aujourd’hui, on sait que Wilder est capable de bien boxer. Il a un long jab qui lui sert très bien. Peut-être pas aussi bien que celui de Wladimir Klitschko, mais à cause de ses 6 pieds 7 pouces, il peut facilement faire l’affaire.  

De l’autre côté, Bermane Stiverne a prouvé qu’il avait un bon menton. Une seule fois il a été ébranlé à la toute fin du deuxième engagement. Brillant, il s’est laissé tomber sur Wilder, l’entraînant au tapis alors que la cloche sonnait la fin de la reprise. Mais le coup de Wilder avait bel et bien terrassé Stiverne, sans toutefois que l’arbitre intervienne.

Le monde des géants

La classe des poids lourds appartient maintenant au monde des géants. Quand on pense que dans les années 50, le monarque Rocky Marciano faisait à peine 5 pieds 10 pouces tout comme le champion des années 80 Mike Tyson.   

La déception pour Stiverne

Aujourd’hui, Wladimir Klitschko fait 6 pieds 7 pouces ou presque, tout comme Wilder. Parmi les autres aspirants, on retrouve Kubrat Pulev à 6 pieds 5 pouces, Vyacheslav Glazkov à 6 pieds 3 pouces tout comme Bryant Jenning. Parlant de Jennings, il a déclaré pendant la soirée qu’il avait signé une entente pour affronter Wlad Klitschko à Las Vegas le 25 avril prochain. 

On peut donc s’attendre à ce que le prochain rival de Wilder soit le Britannique Tyson Fury, un autre longiligne boxeur de 6 pieds 9 pouces. L’affrontement devrait avoir lieu en avril puisque Wilder a déclaré publiquement qu’il voulait se battre entre trois et quatre fois par année.   

Tous ces géants sont loin du record de tous les temps chez les poids lourds. Le plus grand n’a été nul autre que le Roumain George Mitu qui faisait 7 pieds 4 pouces tout comme l’Américain John Rankin. À 7 pieds 2 pouces, on retrouve l’Irlandais Jim Cully et le Sud-Africain Ewart Potgieter tandis qu’à 7 pieds 1 pouce, on se souviendra de Nicolay Valuev.   

Sans vouloir l’excuser, disons que la taille de Bermane Stiverne ne l’a pas trop favorisé dans son affrontement avec Wilder. Il n’a jamais été capable de traverser la muraille établie par le long jab du nouveau champion et il n’a pu couper le ring ni fatiguer l’Américain. En somme, rien n’a fonctionné dans la stratégie de Stiverne qui s’est dit totalement déboussolé dès les premiers instants du combat.

Enfin un score correct  

Chez les juges, ce fut presque l’unanimité dans leurs pointages. Le plus dur à l’égard du champion fut le Canadien de l’Alberta Craig Metcalfe qui ne lui a accordé aucun round, remettant une feuille de pointage de 120-107.

Adelaide Byrd, l’épouse de l’arbitre Robert Byrd, a jugé le combat 118-109 et Jerry Roth a remis une carte de 119-108. Pour une fois, les juges de Las Vegas ont frappé dans le mille à l’unanimité. 

Pour Stiverne, la pilule est dure à avaler. C’était sa première défaite en treize combats. Il faut remonter aussi loin qu’en 2007 pour le retrouver vaincu par K.-O. technique au 4e round aux mains de Demetrice King.

À 36 ans, il doit reprendre le collier. J’ai l’impression qu’il restera parmi les quinze meilleurs poids lourds au monde, mais il devra dire adieu aux bourses millionnaires.

Parlons-en donc des bourses millionnaires. Pour cet affrontement contre Wilder, Stiverne a touché la somme de 910 000 dollars contre un million pour l’aspirant. C’est très rare qu’une telle situation survienne lors d’un match de championnat. Ce qui prouve que les Américains avaient misé sur leur représentant et se foutaient éperdument de l’Haïtien du Québec qui habite pourtant Las Vegas depuis une dizaine d’années et veut éventuellement devenir un fils bien légitime de l’Oncle Sam.

Bravo et félicitations à Deontay Wilder et bon courage et bonne chance à Bermane Stiverne. C’est vrai qu’il a perdu son titre, mais il pourra continuer à gagner honorablement sa vie sans couronne pour encore quelques années.