MONTRÉAL – Huit ans et une vingtaine de combats après ses débuts fracassants sur la scène internationale, le nom de Georges St-Pierre commence à poindre au sommet d’impressionnants palmarès.

Dès qu’il franchira la porte de l’octogone pour affronter Nick Diaz, dans exactement un mois au Centre Bell, St-Pierre accèdera au deuxième rang de l’histoire du UFC en s’engageant dans son treizième combat de championnat. Seul Randy Couture, avec 15, le devancera alors à ce chapitre.

En l’emportant, St-Pierre défendrait le titre qu’il détient depuis 2008 pour la huitième fois, ce qu’aucun mi-moyen n’aurait réussi à faire avant lui. Il signerait aussi une 18e victoire sous la bannière du UFC, un autre record.

Contre Diaz, GSP visera une onzième victoire consécutive, un exploit que seuls Royce Gracie et Anderson Silva peuvent se vanter d’avoir accompli.

La liste est longue et de plus en plus difficile à ignorer, mais St-Pierre s’en soucie à peu près autant que si vous tentiez de le surprendre avec une amenée au sol à deux jambes. Pour un homme ouvertement soucieux de la marque qu’il laissera sur son sport à la fin de sa carrière, il n’accorde étonnamment aucune valeur aux chiffres qui permettent de dresser une comparaison tangible avec ses pairs.    

« Je veux un jour être reconnu comme le meilleur, le plus grand combattant livre pour livre de la planète, a récemment réitéré le champion québécois en entrevue à RDS. Ça, ça ne s’accomplit pas en gagnant des combats de championnat. Ce qui importe, c’est qui je vais battre et la façon dont je vais les battre. Mais j’ai beaucoup de chemin à faire encore avant d’y arriver. »

Du chemin à faire, certes. Mais les statistiques, peu importe l’importance qu’on veuille bien leur accorder, ne mentent pas.

Nez à nez avec Matt Hughes

Preuve du bon bout de chemin accompli par le petit gars de Saint-Isidore, son nom commence à se retrouver dans les mêmes hauteurs que celui de Matt Hughes. Intronisé au Temple de la renommée du UFC en 2010, Hughes était l’homme à battre pour un jeune mi-moyen qui aspirait aux plus grands honneurs au milieu des années 2000. Quand St-Pierre est arrivé dans les grandes ligues, avec ses cinq combats d’expérience, son modèle américain venait tout juste de défendre sa ceinture contre Frank Trigg et montrait une fiche de 35-3.

« C’était une sorte d’icône à l’époque. Il était imbattable, le meilleur athlète dans le sport », se souvient la vedette du Tristar Gym.

En l’espace de trois ans, de 2005 à 2007, Hughes et St-Pierre ont été impliqués dans une trilogie qui a marqué la transition entre l’ancienne et la nouvelle garde d’un sport alors en pleine évolution.

Georges St-Pierre et Matt HughesLa première manche est allée au vétéran, qui a piégé son prétendant dans une clé de bras tout juste avant la fin du premier round. C’était la première fois que St-Pierre, alors âgé de 23 ans, connaissait l’agonie de la défaite. L’occasion de venger cet affront est venue deux ans plus tard et il l’a saisie pour devenir champion du UFC pour la toute première fois. Encore aujourd’hui, St-Pierre classe cette spectaculaire victoire comme l’un des moments marquants de sa carrière, tout juste derrière ses succès en sol montréalais contre Matt Serra et Carlos Condit.

Il faut remonter au dernier chapitre de la rivalité pour trouver le dernier combat dans lequel St-Pierre n’avait pas une ceinture à défendre. Sa domination totale de Hughes en finale du UFC 79 peut être identifiée comme la passation finale du flambeau entre le roi déchu et son successeur logique. Personne n’a battu GSP depuis.

Aujourd’hui, St-Pierre est dans l’enviable position de pouvoir à la fois se projeter vers l’avenir avec la confiance d’un champion au sommet de son art et regarder fièrement s’éloigner dans le rétroviseur le reflet d’exploits anciens. Mais, au tournant de la trentaine, même si le temps ne semble pas pressé de le rattraper, il doit se faire à l’idée qu’un renversement des rôles est inévitable.  

« Ça fait quand même un bout que je fais ça. Il y a des jeunes qui poussent en arrière et il faut que je reste au top le plus longtemps que je peux. C’est la même chose dans tous les sports, il ne faut pas que je me fasse d’illusions, réalise-t-il. Je ne vais pas rester champion pour le reste de mes jours. Un jour, il va y en avoir un meilleur que moi et celui-là va trouver meilleur que lui plus tard. C’est comme ça, le sport. Tu n’es jamais là pour toujours. »

Mais qui te délogera, Georges?

« On ne sait pas qui va prendre ma place. Peut-être que je vais prendre ma retraite, peut-être que j’ai des plans pour le futur... peut-être que je ne dis pas tout non plus! »