Par Nicolas Landry - Georges St-Pierre est incapable de se montrer le bout du nez à Las Vegas sans se faire demander un autographe, mais il peut déambuler dans les rues de Montréal dans l'anonymat le plus complet. Pour l'instant…

"Ma vie va changer, réalise St-Pierre, de passage à Montréal avec la caravane du UFC pour promouvoir le premier gala de la plus importante organisation d'arts martiaux mixtes à se tenir au Canada, le 19 avril prochain au Centre Bell. Je n'aurai pas le choix de m'habituer."

Le combattant de St-Isidore, en banlieue de Montréal, dit présentement vivre le meilleur de deux mondes. Il goûte à la célébrité et à tous ses avantages quand il parcourt les États-Unis alors que ses discrets passages au Québec viennent conforter le côté timide de sa personnalité.

"Le kid fait partie du UFC depuis quatre ans et je ne comprends pas pourquoi son visage ne se retrouve pas sur les boîtes de céréales ici, se questionne Dana White, le président de l'organisation. Si notre sport était aussi populaire que le basketball, il mettrait Michael Jordan dans sa petite poche."

Un combat à Montréal n'élèvera pas encore St-Pierre au rang d'idole d'un peuple - sait-il au moins patiner? - mais le principal intéressé est conscient que sa cote de popularité est à la hausse au Québec.

"Je ne suis pas ce genre d'athlète qui se bat parce qu'il n'a pas le choix. J'ai des études, je pourrais faire autre chose de mes dix doigts. Mais je pratique ce sport avant tout parce que j'aime ça. Donc, juste à penser que je serai finalement reconnu comme un athlète chez moi, ça fait chaud au cœur. Je suis l'homme le plus heureux au monde."

Selon White, plus de 13 000 billets ont trouvé preneur dès la première journée de mise en vente auprès des membres du fan club du UFC, dimanche. Le président s'attend d'ailleurs à ce que le UFC 83 attire 22 000 spectateurs, ce qui en ferait l'événement le plus populaire de l'histoire de l'organisation.

"Je n'ai pas toujours été convaincu qu'on pourrait attirer les foules à Montréal, mais depuis que l'annonce a été faite, tout le monde m'en parle. C'est un grand rêve que je m'apprête à réaliser. J'attendais cette opportunité depuis longtemps. Je n'ai jamais été aussi motivé pour un combat."

Une ceinture en carton

Pour son retour à Montréal, St-Pierre retrouvera un visage qu'il connaît trop bien. L'Américain Matt Serra, qui avait mérité un affrontement contre son mentor en remportant les honneurs d'une émission de télé-réalité, avait causé une gigantesque surprise en détrônant le champion au UFC 69, en avril dernier.

Serra n'est pas remonté dans le ring depuis. Il devait défendre son titre contre son compatriote Matt Hughes, mais une blessure au dos l'a empêché de le faire. St-Pierre s'est donc chargé de Hughes pour mériter une chance de reprendre l'objet qui lui revient.

"La ceinture de champion intérimaire ne veut rien dire pour moi, lance celui qu'on surnomme Rush. C'est une belle pièce de collection, ça paraît bien dans ma maison, mais je ne me sens pas comme un champion. Le champion est assis juste à côté de moi et il s'appelle Matt Serra."

On ne pourrait pas en vouloir à Serra de se plaindre qu'il n'obtient pas le respect qu'il mérite. Après tout, il n'a même pas mis quatre minutes à passer le KO à St-Pierre la dernière fois que les deux pugilistes se sont retrouvés face à face, mais encore une fois, on lui accorde peu de chances de sortir vainqueur de l'octogone.

"De mon point de vue, si vous parvenez à vaincre l'homme à battre, vous devenez l'homme à battre, mais on dirait bien que ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Ça doit être un 2 de 3!", a rigolé Serra, qui ne s'en fait pas trop avec les prévisions des experts.

"Je suis habitué d'être le négligé. Avant notre premier combat, c'était tout simplement ridicule. Je m'attends à ce qu'on me prenne un peu plus au sérieux cette fois. La première fois, j'ai fait mentir bien des observateurs, mais je ne sens pas avoir encore quelque chose à prouver. Ça sera une soirée historique et je suis juste heureux d'en faire partie."

Personnage coloré, Serra aime se comparer à Rocky qui, dans le quatrième volet de la vie du célèbre boxeur fictif personnifié par Sylvester Stallone, se rend en Russie pour terrasser le grand Ivan Drago sous les regards consternés d'une foule qui refusait de croire à une défaite de son champion.

"Il va se rendre compte que la réalité sera fort différente de la fiction", promet St-Pierre en riant.

Populaire au Canada

Dana White a bien fait rire son auditoire lorsqu'on lui a demandé pourquoi il avait fallu attendre si longtemps avant de voir son organisation tenter une percée au nord de la frontière américaine.

"Chaque fois que nous voulions venir ici, il y avait un match de hockey!", s'est exclamé le charismatique président avant de reprendre son sérieux.

"Nous avons perdu beaucoup d'argent la première fois que nous sommes sortis des États-Unis pour aller en Angleterre. Ça nous a rendu hésitants à retenter l'expérience outre-mer, même qu'on ne voulait plus sortir de Las Vegas. Mais nous avons commencé à connaître du succès dans des endroits comme Houston, Columbus. Maintenant, partout où nous allons, nous sommes les seuls à attirer plus que les Rolling Stones!"

Le Canada était donc la suite logique. "La restauration rapide, la télé-réalité… Habituellement, quand quelque chose fonctionne aux États-Unis, ce n'est pas très long avant qu'on le retrouve au Canada", illustre St-Pierre.

"Les gens ne réalisent pas à quel point les arts martiaux professionnels sont populaires au Canada, poursuit White. Partout où nous allons dans le monde, je suis sous le choc quand je vois le nombre de Canadiens que nous rencontrons."

Les autres combats du UFC 83

Jonathan Goulet (Victoriaville) c. Kuniyoshi Hironaka
Patrick Cote (Québec) c. adversaire à determiner
Travis Lutter c. Rich Franklin
Michael Bisping c. Charles McCarthy
Kalib Starnes c. Nate Quarry
Mac Danzig c. Mark Bocek
Jason MacDonald c. Joe Doerksen
Sam Stout c. Rich Clementi
Ed Herman c. Demian Maia.