Équipe Canada, avec son capitaine Pat Simmons et John Morris dans le rôle de meilleur acteur de soutien, a remporté le Championnat canadien de curling masculin de façon extrêmement spectaculaire dimanche, et ce, à plusieurs point de vue.

Tout d'abord sur les glaces. Après une journée de samedi chargée en émotions, durant laquelle la formation de Pat Simmons a remporté deux matchs âprement disputés. La première était une victoire en quart de finale contre la Saskatchewan en bout supplémentaire, et la deuxième une spectaculaire remontée en fin de match face à Terre-Neuve Labrador du Capitaine Gushue. En finale, Équipe Canada a surpris les grands favoris, la formation de Brad Jacobs, médaillée olympique aux derniers Jeux de Sotchi.

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Jacobs et sa troupe ont terminé au premier rang à la suite du tournoi à la ronde, avec une fiche presque parfaite de 10-1, pour ainsi accéder directement à la finale avec une victoire convaincante en demi-finale contre Brad Gushue. Comme mentionné plus tôt, ils étaient les grands favori pour décrocher un deuxième titre canadien en trois ans, mais le scénariste de ce championnat canadien, avait prévu une toute autre fin à son synopsis. Dans les faits, la victoire de Pat Simmons tient beaucoup plus d'un scénario hollywoodien que du curling canadien traditionnel!

Relatons un peu les éléments de ce scénario aux multiples rebondissements.

L'histoire commence tout d'abord au printemps 2014. Le championnat canadien est remporté par la formation albertaine de Kevin Koe, et en plus de représenter le Canada aux Championnat mondiaux en Chine, Koe et sa formation ont obtenu le droit de revenir défendre leur titre l'année suivante en portant les couleurs d'Équipe Canada, une première dans l'histoire du curling canadien masculin. Jusque là rien de surprenant. Koe remportait un deuxième titre Canadien en quatre ans et s'apprètait à disputer le Championnat mondial en Chine où il serait le grand favori. Tout les espoirs était permis pour le Canada, sauf que tout juste avant de s'envoler pour Pékin, coup de théatre, le rumeur se répand dans les coulisses du curling canadien comme quoi le capitaine Koe aurait pour projet de s'aligner avec une autre formation en 2015!

Nul besoin de vous signaler que ce fut une distraction majeure durant les Mondiaux, et sans aucune surprise le Canada n'a pas réussi à s'imposer, terminant même au quatrième rang, hors du podium.

De retour au pays, la rumeur s'est concrétisée. Koe a abandonné le navire et laissé Curling Canada et ses coéquipiers avec un Équipe Canada sans capitaine pour 2015.

Après de longues tractations à savoir ce qui arrivait de la supposée équipe Canada pour 2015, John Morris, finaliste de l'édition 2014, a accepté de se joindre à l'ex-formation de Kevin Koe, et Equipe Canada fut sauvée.

La décision d'insérer une Équipe Canada au détriment d'une province (la Nouvelle-Écosse n'a pas pu participer à l'édition 2015 du Brier) a fait coulé beaucoup d'encre et susciter beaucoup de scepticisme auprès des amateurs. Le fait que la formation Équipe Canada serait en quelque sorte une équipe raboutée, formée en grande partie dans le simple but de sauver les apparences, n'était pas sans ajouter de l'huile sur le feu.

Le tournoi s'amorce donc avec une Équipe Canada hypothéquée à laquelle peu d'analystes accorde la moindre chance de se distinguer. Comble de malheur. le nouveau capitaine (John Morris) connaît un début de tournoi difficile et on amorce la semaine avec une fiche de deux victoires contre trois défaites.

Autre coup de théâtre, John Morris cède sa place de capitaine à Pat Simmons au beau milieu du tournoi à la ronde. On inverse les rôles et Simmons se retrouve dans la maison pour la première fois depuis 2010! Contre toute attente, ça fonctionne. Simmons ne semble pas trop rouillé et Morris retrouve le rôle de vice-capitaine, rôle dans lequel il a connu ses meilleures performances en carrière. Équipe Canada remporte même son match contre son ancien capitaine Kevin Koe dans un match des plus émotifs et digne des grandes finales. Cette victoire donne des ailes à Simmons et Équipe Canada, qui vont par la suite remporter cinq matchs d'affilé et et réussir à se qualifier pour la ronde des médailles en quatrième position.

Lorsque l'on termine en troisième ou quatrième position, la route est très longue vers la plus haute marche du podium. Seulement deux équipes aux cours des 20 dernières éditions ont réussi à remporter l'or en passant par les quarts de finale. En effet, pour remporter l'or, une formation qui passe par les quarts doit vaincre les trois autres formations qui ont accédé à la ronde des médailles.

Équipe Canada a réussi cet exploit. En grande finale, Simmons et sa troupe ont effacé un déficit de deux points. L'exploit n'est pas mince lorsque l'on connaît la force de frappe de la formation de Brad Jabobs. Cette formation, très efficace sur les sorties, ne laisse pratiquement jamais filer d'avance de deux points ou plus!

Le tout s'est terminé comme toute bonne finale de curling devrait se terminer, soit par un placement sur le bouton au 10e bout, ou encore mieux, en bout supplémentaire. Simmons et ses brosseurs ont fait preuve d'un sang-froid remarquable. La pierre de Simmons s'est immobilisée sur le bouton au grand plaisir des milliers de spectateurs présents au Saddledome de Calgary et de plusieurs centaines de milliers de téléspectateurs rivés sur leur écran de télé pour assister à cette fin de match des plus spectaculaires. On pourrait préciser que la formation de Brad Jacobs avait irrité plusieurs amateurs de curling au cours de la semaine avec un geste anti-sportif guère apprécié par les amateurs d'un sport avec une longue tradition de fairplay. Équipe Canada, avec ses nombreuses mésaventures au cours de la saison morte et cours du tournoi à la ronde, avait généré un élan de sympathie d'un bout à l'autre du pays.

Dans les faits, cette victoire de Simmons est aussi la victoire de Curling Canada, qui a gagné son pari en insérant envers et contre tous : une Équipe Canada dans la compétiton. Cette décision avait pour but d'élever encore davantage le niveau de jeu du Championnat canadien.

Simmons, Rycroft et Teissen ont remporté leur propre pari en faisant le plus gros pied de nez possible à leur ancien capitaine, celui de remporter un deuxième titre consécutif cette fois sans la présence de celui qui les avait laisser tombé.

John Morris a remporté également son pari, en acceptant de se joindre à la formation Équipe Canada, mais surtout, en démontrant aux yeux du Canada entier qu'il était avant tout une joueur d'équipe. Que le succès de celle-ci passait bien avant son égo personnel. Dans un monde où les prima donna font légion, ce simple geste de Johnny Mo comme on le surnomme, ne fait qu'ajouter à la grandeur du personnage.

Cette formation aura la chance de faire amende honorable pour la contre-performance du printemps derniers. Le Canada n'a pas l'habitude d'être exclu du podium au Championnat mondial. Si Simmons et sa troupe peuvent emporter avec eux une partie de l'émotion qui les a enflammés lors du Brier jusqu'à Halifax, site du prochain Championnat mondial masculin, ils seront les favoris.

À surveiller bientôt sur vos écrans bientôt, la suite de cette production cinématographique mettant en vedette Équipe Canada, en provenance de Halifax. À l'affiche à compter du 28 mars prochain!