Les risques du surentrainement
En forme jeudi, 19 août 2021. 09:35 dimanche, 15 déc. 2024. 12:53L’importance de ne pas aller trop vite
Te (re)mettre en forme, c’est bien parfait et ça peut t'aider à gérer ta santé mentale. Il n’y aura jamais de mal à vouloir améliorer sa condition physique, même si on devrait le faire pour d’autres facteurs que le poids. Par contre, et particulièrement en ce moment, c’est important d’éviter la tentation de se lancer dans l’entrainement trop vite, trop fort.
L’idée n’est pas de faire peur à personne, mais la vulnérabilité de notre état post-pandémie nous rend quand même peut-être plus prompts à tomber dans un piège où le surentrainement devient séduisant et selon notre logique désespérée, « nécessaire ».
Selon Ali Register, un entraîneur privé, les gens qui retournent ou arrivent dans les gyms en ce moment ont une « inclinaison » particulière : « 9 sur 10 entrent au gym et avant toute autre chose, nous disent qu’ils veulent retrouver leur physique d’avant la pandémie. Cette espèce d’urgence est devenue la mentalité standard. Il y a un désespoir, non seulement de paraître mieux mais même de montrer que la pandémie et tout ce qu’elle a amené ne les a pas affectés ».
Les risques du surentrainement sont rares, mais réels
Le problème avec cette mentalité, c’est bien sûr le risque de dépasser les limites de son corps. Et dans les gyms ou dans certains groupes, il y a définitivement un effet d’entrainement (sans mauvais jeu de mot) où les gens sont portés à se dépasser constamment et à ne pas s’écouter juste pour suivre les autres ou montrer qu’ils sont forts, meilleurs, capables de tout.
Selon le médecin du sport Dr. David Wang, la mentalité du « No pain, no gain » (en gros : s’il n’y a pas de douleur, il n’aura pas de bénéfices à l’entraînement) « n’est pas quelque chose que personne ne devrait suivre, jamais! », met-il en garde.
Le médecin ajoute qu’il voit beaucoup de problèmes dans « des situations de sports d’équipe ou de cours de groupe, parce que les gens ont peur d’avoir l’air faibles ou encore pas assez sérieux dans leur entraînement. Au lieu d’être à l’écoute des signes de leur propre corps, ils se fient aux autres et ne respectent pas leurs limites.
Le Dr. Wang ne prend vraiment pas les risques du surentrainement à la légère : « Ça prend des semaines et mêmes des mois pour développer de la force – c’est un processus très graduel. Personne ne sera immédiatement capable de revenir à leur niveau d’il y a six mois ou encore d’avant que la pandémie commence/que tout ferme. Ignorer cette réalité équivaut à mettre la table parfaite pour développer des blessures. »
Les blessures physiques sont non seulement plus courantes avec le surentrainement, mais il y a aussi le risque de s'écoeurer du processus et de nouer une relation malsaine avec le sport. Se connecter à son plaisir de bouger demeure un bon indicateur.
Un peu comme avec l'appétit, écouter son intuition est toujours gage d'équilibre.
Deux conséquences sérieuses de l’abus d’entrainement
La majorité des personnes actives physiquement se blessent à la longue : c’est presque inévitable. Après des années de course à avoir eu l’impression que « personne n’a de limite aux progrès qu’il(elle) peut faire », j’ai un jour reçu un signal plutôt brutal de mon corps : un syndrôme de la bandelette extrêmement douloureux qui m’a complètement mis sur le carreau pendant 5 mois.
Mais au moins : tout comme les ligaments déchirés, les muscles étirés ou d’autres petits bobos du genre, il ne s’agissait pas d'une blessure grave. Un peu de temps, de la physio, des exercices ciblés et une meilleure écoute de moi-même m’ont permis de retrouver non seulement ma pratique du sport, mais aussi un équilibre plus sain. Je fais partie des chanceux. Il existe plusieurs signes pour reconnaître le surentrainement.
Par contre, certains se retrouvent avec des conséquences graves à long terme de leur surentrainement, alors que souvent ils n’avaient jamais imaginé que s’entrainer pouvait poser un risque pour leur santé (ça sonne tellement bizarre à dire, n’est-ce pas?)
Une de ces conséquences est la rabdomyolyse, un trouble potentiellement fatal, qui survient après un surmenage physique, particulièrement lors de mouvements répétitifs et non-familiers. Ce qui se produit, c’est que les muscles, n’en pouvant plus, se dégradent en relâchant dans l’organisme des toxines comme la créative kinase et la myoglobine. Quand cela se produit, les patients ressentent souvent des fortes douleurs musculaires ainsi que de la faiblesse et ont une urine brun-rougêatre (un signe de myoglobine excessive dans le sang). 40 % des cas de rabdomyolyse finissent en insuffisance rénale. À quel point la « radbo » est commune? Il y a environ 42 000 cas par année aux États-Unis, selon le Washington Post.
Les facteurs de risque aggravant le risque de rabdomyolyse : être un homme qui s’entraine beaucoup, mais aussi la consommation/la prise d’alcool ou de drogues, de caféine, de suppléments « fitness » tels que la créatine, ainsi que de médicaments tels que les antidépresseurs, les antibiotiques, les statines, les anti-allergènes ou les anti-rhumes et grippe.
La deuxième conséquence grave touche cette fois plus les femmes : il s’agit du défilé thoracique neurogénique. Ce syndrôme chronique rare se manifeste à cause de la compression des nerfs situé dans le haut du torse et dans le cou. Très incapacitant, le défilé thoracique neurogénique est non seulement douloureux mais invalidant, puisqu’il peut empêcher d’effectuer de nombreux mouvements usuels et ce, de façon permanente.
Selon le Dr. Rosaire Vaillancourt, chirurgien thoracique à la retraite à Québec, il y a eu une progression de la prévalence de cette condition « liée à une période d’entraînement trop intensive ». Le médecin affirme que « ces dernières années, environ 80 % à 85 % de ma clientèle était composée de femmes âgées de 16 à 40 ans. Des femmes de petit gabarit, assez jeunes, qui faisaient du CrossFit ».
En résumé, l’entrainement, oui! Mais doucement au début, graduellement, sans excès et en respectant ses limites individuelles, peu importe l'activité. Je laisse au Dr. Vaillancourt le mot de la fin : « les gyms ne sont pas toujours synonymes de santé… Les gens qui en abusent, c’est tout sauf la santé ». Quoi de mieux donc que de se connecter au plaisir du mouvement et garder cela comme boussole....
Auteur : Marie-Ève Laforte
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