Qui verra rouge: Alonso ou Massa?

Croyez-vous que l'embauche de Fernando Alonso par Ferrari est une bonne chose pour l'écurie ?
- Mathieu Papillon


Comment sera la relation entre Felipe Massa et Fernando Alonso au sein de Ferrari l'an prochain. Verra-t-on un autre épisode comme celui d'Alonso avec Hamilton chez McLaren il y a deux ans ? - Mario Forgues, Montréal

Cela risque en effet de faire des étincelles.

Lors de sa saison 2007 chez McLaren, Alonso a démontré qu'il ne pensait qu'à lui-même. Comme tout pilote de Formule Un qui se respecte d'ailleurs !

Avec son titre de champion du monde, l'Espagnol se croyait doté d'un statut de pilote numéro un en arrivant chez McLaren. Il savait bien que l'écurie britannique ne fonctionnait pas de cette manière, mais cela - en principe - n'allait pas constituer un problème face à un tout jeune espoir comme Lewis Hamilton. Erreur.

L'écurie a été incapable de gérer ses deux poulains. La situation s'est lentement détériorée jusqu'à atteindre son point culminant lors des qualifications du Grand Prix de Hongrie.

En début de Q3, Hamilton ne respecte pas l'alternance de stratégie (imposée par l'écurie pour convaincre les pilotes de son impartialité), qui devait permettre à Alonso de prendre la piste en premier et ainsi brûler un maximum d'essence dans le but d'être le plus léger possible en fin de séance. Mais Hamilton est le premier à sortir des puits McLaren, devant Alonso.

Celui-ci, furieux, va aussitôt prendre sa revanche. Alors qu'il vient de changer de pneus avant de s'élancer pour une ultime tentative, il ne repart pas ! Il fait ainsi patienter Hamilton, qui est stationné derrière en attente de nouveaux pneus. Alonso part tout juste à temps pour effectuer un dernier tour lancé avant la fin de la séance (il va d'ailleurs signer le meilleur temps), mais il a suffisamment retardé son rival pour que celui-ci ne puisse faire une ultime tentative. Belle ambiance !

Voilà donc Alonso qui s'amène chez Ferrari. Le nouveau patron Stefano Domenicali semble avoir adopté une autre attitude que celle de son prédécesseur Jean Todt. Ce dernier donnait l'impression d'avoir fait sienne la maxime : « la fin justifie les moyens ». Ce qui nous avait fait vivre, entre autres, l'horrible saison 2002 et ses consignes d'équipe.

Donc en principe Alonso et Massa partent sur un pied d'égalité. Le problème, pour Massa, est qu'Alonso est un meilleur pilote.

C'est d'ailleurs ce que pensent les dirigeants de Ferrari. Après avoir signé cet été un contrat avec Alonso pour la saison 2011, ils ont décidé, grâce au carnet de chèques du nouveau commanditaire Santander, de se débarrasser de Kimi Raikkonen qui avait pourtant un contrat en bonne et due forme pour 2010. En lui versant un dédit estimé à son plein salaire, estimé à 30-40m $US. Faut vouloir !

Les hostilités entre Alonso et Massa ont officiellement débuté le mercredi 14 octobre. Lors d'un point de presse avec les médias de son pays, quelques jours avant le Grand Prix du Brésil, Massa a déclaré qu'il croyait qu'Alonso était au courant de l'accident programmé de Nelson Piquet au Grand Prix de Singapour 2008, alors que l'Espagnol nie tout.

Oui, cela commence bien !

Déjà que ces deux pilotes ont quelques antécédents en piste. Un contact dans le premier virage après le départ au Grand Prix d'Espagne 2007. Mais il faut surtout se rappeler le Grand Prix d'Europe en Allemagne la même année. Il y avait eu un léger contact entre les deux pilotes, alors qu'Alonso avait dépassé Massa pour se diriger vers la victoire. Les deux s'étaient engueulés devant les caméras de télévision dans une pièce attenant au podium.

Comment un pilote qui se bat pour le titre (Barrichello) peut-il avoir de la misère à se trouver un volant pour 2010. On dirait que les équipes veulent des pilotes en couche ! Il y a plein de bons pilotes dans la trentaine.
- Roger Gagnon


Le cas Barrichello est en effet intéressant.

Je crois que Ross Brawn, dans l'absolu, aurait bien aimé garder Rubens Barrichello, qu'il apprécie depuis leurs années chez Ferrari.

Par contre il n'a sûrement pas aimé que le Brésilien se plaigne (à tort ou à raison) du comportement de l'écurie à deux reprises cette année. Au point, selon certaines sources, que Brawn ait même songé à le remplacer à partir du Grand Prix de Hongrie.

Espagne : Barrichello mène la course devant son coéquipier Jenson Button. Les deux sont sur une stratégie pré-établie de trois arrêts. Button change sa stratégie pour deux arrêts et gagne devant Barrichello ! Inutile de dire que le Brésilien n'était pas très heureux après l'arrivée.

Allemagne : Barrichello roule devant Button au deux-tiers de l'épreuve. Par communication radio, Button demande à l'écurie de dire à Barrichello de le laisser passer, car il s'estime plus rapide. L'écurie choisit plutôt la subtilité, soit devancer le 3e arrêt de Barrichello, donnant ainsi un tour à Button pour hausser le rythme avant son propre arrêt, à la suite duquel il ressort des puits devant le Brésilien… Inutile de dire que ce dernier était furieux après l'arrivée et qu'il ne s'est pas gêné pour le faire savoir.

Cela dit, des facteurs extérieurs sont venus miner la position de Barrichello au sein de l'écurie Brawn.

On sait que Ross Brawn est en négociation avec Mercedes pour la vente d'une partie de son écurie.

Le constructeur allemand veut profiter au maximum de son investissement, et cela passe par l'embauche d'un pilote allemand. Comme par hasard, Nico Rosberg a récemment signé un contrat avec Mercedes, qui peut le placer soit chez McLaren, soit chez Brawn. Cela dit, Rosberg constitue un bon recrutement pour Brawn et un investissement dans l'avenir.

Quant au manque de respect envers les pilotes d'expérience, il est vrai que les écuries ont tendance à jouer la carte jeunesse, dans l'espoir de dénicher la perle rare, le nouveau Senna, le nouveau Schumacher, le nouveau Hamilton.

Et cela ne date pas d'aujourd'hui. Parlez-en à Damon Hill. Champion du monde avec Williams en 1996, son contrat n'est pas renouvelé pour la saison suivante. Son remplaçant ? Un pilote qui a la réputation d'être aussi sinon plus rapide que Michael Schumacher, du temps que les deux courraient en F3 puis en catégorie sport-prototype. Son nom : Heinz-Harald Frentzen. Parlez-en à Frank Williams…

Je vous ai entendu dire que vous étiez d'accord avec Felipe Massa pour effacer le résultat du Grand Prix de Singapour 2008, en raison de l'affaire Piquet-Renault. N'est-ce pas là oublier que Massa et son équipe sont quand même responsables de ce qui lui est arrivé dans ce Grand Prix, alors qu'il est parti en arrachant le boyau de remplissage d'essence. C'est là qu'il a vraiment perdu le titre à mon avis.
- Louis Poirier, St-Augustin


L'idée n'est pas d'annuler les résultats du Grand Prix de Singapour 2008 pour donner le titre à Felipe Massa. L'idée est d'annuler les résultats d'une course dont l'issue a été faussée par une manœuvre anti-sportive.

Que se serait-il passé à Singapour si Piquet n'avait pas jeté sa Renault contre un mur ?

À ce moment de la course, Massa menait facilement devant Hamilton. Le même ordre après les 61 tours de l'épreuve aurait donné le titre à Massa.

Puis Massa a sombré. Son équipe aurait-elle commis la même faute (feu vert alors que l'embout est encore connecté à la voiture) si le Brésilien avait fait son arrêt dans des circonstances normales, et non pas durant une neutralisation ? A-t-on été amené à confondre vitesse et précipitation en voyant Kimi Raikkonen stationné derrière Massa en attente de son propre ravitaillement ? La question se pose.

De toute façon, nous ne saurons jamais quel aurait été le classement de la course sans l'incident Piquet. Cette seule affirmation permet de demander l'annulation des résultats du Grand Prix de Singapour 2008.

Massa a-t-il perdu le titre mondial à Singapour ? Non.

Sur le plan du pilotage, Massa et Hamilton ont fait jeu égal en 2008, alternant les bons coups et les erreurs.

Massa a perdu le titre parce que son moteur a sauté en Hongrie alors qu'il menait la course avec trois tours à faire.

Massa a perdu le titre parce que son équipe a éprouvé des ennuis avec l'appareil de ravitaillement au Canada (au moins trois points de perdus).

Massa a perdu le titre parce qu'un mécanicien a commis une erreur à Singapour.