Comme sur les unités spéciales, l’attaque des Alouettes a montré de belles choses dans la défaite face aux Argonauts de Toronto, lundi. Mais c’est le fameux momentum dont je parlais dans ma chronique d’hier qui est venu gâcher le match.

Il y a eu quelques longs jeux, mais seulement deux considérés explosifs et ceux-ci impliquaient Duron Carter. Il y a eu le touché de 61 verges et un attrapé de 45 verges. Des jeux explosifs, on en veut plus dans un match. De plus, Kevin Glenn a quand même complété 24 de ses 28 passes.

Quand je regarde l’attaque, le jeu au sol est sous-utilisé. On me taquine souvent quand je dis ça puisque je suis un ancien joueur de ligne offensive, mais j’y crois vraiment.

En premier essai et 10 verges à gagner face aux Argos, lors des trois premiers quarts, les Alouettes ont utilisé 3 courses comparativement à 13 passes. Au quatrième quart, je peux comprendre que c’était du football de rattrapage, ce qui explique qu’il n’y ait eu aucune course en premier essai.

Par contre, lors des trois premiers quarts, l’écart était serré. Brandon Rutley a terminé la rencontre avec 45 verges en 9 courses, soit une moyenne de 5 verges. Stefan Logan a couru à deux reprises pour 12 verges. Ce n’est pas une mauvaise production pour le jeu sol. En fin de compte, les porteurs ont effectué 11 courses pour 57 verges, ce qui est très acceptable.

Duron CarterLes Alouettes ont sélectionné 29 passes, donc pas beaucoup d’équilibre dans un match qui était chaudement disputé jusqu’au quatrième quart. Le jeu au sol a été productif, mais il a quand même été laissé de côté.

Lorsqu’Anthony Calvillo a été nommé coordonnateur offensif, plusieurs s’imaginaient qu’il utiliserait l’attaque que Marc Trestman a implantée lorsqu’il était l’entraîneur-chef des Alouettes. On veut tenter de mettre en valeur le style d’attaque de Trestman. Il y a un problème avec cela : ce n’est pas Trestman qui choisit les jeux et surtout, ce n’est pas Calvillo qui est sur le terrain pour les exécuter. Aussi, les receveurs ne sont pas Ben Cahoon, S.J. Green ou Kerry Watkins.

Il faut prendre un pas de recul. Il faut peut-être faire un amalgame de jeux entre ce que Calvillo aime et intégrer plus ce que Jacques Chapdelaine peut amener. L’attaque des Alouettes compte sur deux bonnes têtes de football.

Le jeu au sol est quelque chose d’intéressant. Étant donné que les Alouettes n’ont pas les éléments pour implanter l’attaque de Marc Trestman, il serait peut-être mieux d’avoir plus d’équilibre sur l’unité offensive, même si à la base on aime bien lancer le ballon.

Trestman pouvait commencer un match en lançant 18 passes d’affilée. C’était acceptable puisque Trestman sélectionnait les jeux et Calvillo réussissait à les exécuter. Ce n’est pas cette combinaison qui est en place présentement.

C’est pour cette raison que le jeu au sol devrait peut-être revenir à l’avant-plan. On dit souvent en attaque qu’il faut lancer dans les zones profondes pour étirer la défense et créer de l’espace. Je ne vois pas les Alouettes courir beaucoup et encore moins vers les périmètres, en d’autres mots vers l’extérieur. C’est aussi une façon d’étirer la défense et de créer des corridors de course au centre pour plus tard dans le match.

Avec une plus grande utilisation du jeu sol, et vous me voyez peut-être venir, on va aider une jeune ligne à l’attaque. Quand on pense à la ligne offensive des Alouettes, on parle de beaucoup de changements et d’inexpérience. Ce ne sont pas des mots qui sont plaisants à utiliser pour une ligne à l'attaque où la cohésion doit être au rendez-vous. Ça aussi, ça doit faire partie de l’équation.

En deuxième demie, étant donné que les Argos devinaient que les Alouettes allaient sélectionner des jeux de passe, la ligne à l’attaque s’est fait malmener et a mal paru à certains moments. Je reconnais qu’elle doit en donner plus. Mais en même temps, elle n’a pas été aidée par ses quarts-arrières. Ça devient presque un cercle vicieux.

Si le quart sent la pression, il va peut-être avoir moins confiance et il va s’éloigner plus de la ligne d’engagement. Il va se retrouver beaucoup trop profondément dans la pochette. Cela fait en sorte que les bloqueurs vont se faire contourner facilement. Les ailiers défensifs de l’adversaire vont simplement faire le tour des bloqueurs pour se rendre au quart-arrière. J’ai vu cela à plusieurs reprises lundi soir.

C’est comme si les angles de blocage de la ligne à l’attaque et la profondeur du quart étaient déconnectés. Je ne sais pas si, inconsciemment, les quarts reculent un peu plus pour se donner de l’espace étant donné qu’ils ont peur que la pression se rende à eux.   

La défense a plié et ultimement cassé

La tertiaire des Alouettes montrait un nouveau visage en début de saison. L’unité défensive se faisait battre régulièrement dans les zones profondes. Après les trois premières rencontres, elle avait accordé huit passes de plus de 30 verges, ce qui la plaçait avant-dernière dans la ligue à ce chapitre.

Il faut croire que Noel Thorpe et sa défense ont été échaudés. Ils ont donc décidé de jouer le type de défensive qui plie, mais qui ne casse pas. On accorde plus de petits jeux et de verges, mais on va tenter de limiter les dégâts en empêchant l’adversaire de traverser le terrain à coup de long jeu.

Cette stratégie teste donc la patience de l’autre attaque. Ce ne sont pas toutes les unités offensives qui sont en mesure de se contenter de jeux de cinq à six verges à la fois. Il y a des quarts-arrières et des coordonnateurs qui se tannent et qui veulent le gros jeu. Ils peuvent alors tomber dans le panneau et la défense peut en profiter pour faire une interception par exemple.

Une défense qui utilise ce type de stratégie teste aussi le niveau d’exécution d’une attaque. Quand tu dois traverser un terrain à coup de jeux de cinq ou six verges, cela veut dire que ça te prendra beaucoup plus de jeux en succession. Ton niveau d’exécution doit donc être plus élevé parce que tu as plus de chance de commettre des erreurs.

Ça teste aussi l’ego des quarts-arrières. Ce ne sont pas tous les quarts qui aiment lancer des ballons à cinq verges et aller au dépanneur. C’est la philosophie derrière le « plie, mais ne casse pas ». Dans une certaine mesure, cela a fonctionné. Le plus long jeu de passe des Argos a été de 17 verges.

Par contre, quand l’équipe adverse arrive dans la zone payante, il faut que tu l’empêches de marquer des touchés. C’est sur ce point que la stratégie des Alouettes n’a pas fonctionné. L’adversaire est allé cinq fois dans la zone payante et il a marqué quatre majeurs. Bref, en fin de compte, la défense a plié et ultimement cassé.

Un des défauts de cette philosophie, si l’adversaire est prêt à changer ses façons de faire et qu’il exécute bien, il peut contrôler le tempo du match. Les Argos ont contrôlé le temps de possession face aux Alouettes. Je donne le mérite à Toronto. Je comprends la stratégie des Alouettes parce que les Argos sont une équipe qui aime lancer le ballon. C’est dans leur code génétique. La preuve, c’est qu’ils avaient seulement effectué 44 courses en quatre rencontres, soit une moyenne de 11 courses par match.

Les Alouettes ont donc opté pour une stratégie pour tenter de les frustrer en n’accordant aucun long jeu de passe. On les invitait même à courir. Comme je dis à la blague, si Toronto était un droitier, on veut le forcer à jouer de la main gauche. Bref, ce n’est pas nécessairement leur pain et leur beurre et ce n’est pas ce que les Argos aiment faire.

Toronto a accepté ce défi de lancer plusieurs petites passes et d’utiliser le jeu au sol. Les Argos ont terminé la rencontre avec 27 courses. C’est tout à leur honneur d’avoir changé leur stratégie pour trouver la manière de marquer des points.

Les Argos ont effectué 68 jeux en attaque et en moyenne, ce fut 5,3 verges par jeu. Cela démontre que le niveau d’exécution était bon puisqu’ils devaient effectuer beaucoup plus de jeux que d’habitude pour se rendre à la zone des buts. Chapeau!

Le style d’attaque utilisé par Toronto est venu rattraper les Alouettes qui n’ont pas été assez efficaces dans la zone payante.

Quand on regarde la performance des deux attaques dans la zone payante, les Alouettes ont pour leur part marqué qu’un seul touché en trois présences. Au final, Toronto a été plus opportuniste et cela lui a permis de gagner le match.

En contrôlant le tempo, les Argonauts ont eu le ballon pendant plus de 38 minutes. À la fin du match, la défense des Alouettes était à bout de souffle. On a vu des joueurs manquer des plaqués et arriver en retard sur des jeux. Par la bande, les Alouettes ont été victimes du style de jeu qu’ils voulaient utiliser.  

John BowmanDisons aussi que ce n’était pas la bonne semaine pour passer 38 minutes sur le terrain avec seulement trois jours entre les deux matchs. Ce sera intéressant de voir le niveau d’énergie que les joueurs auront dans le réservoir, vendredi, face aux Roughriders.

Dans les points positifs pour la défense, il faut noter qu’elle a provoqué trois revirements. Elle n’en avait provoqué que deux au cours des deux rencontres précédentes.

Là où ç’a été un peu plus décevant, c’est du côté de la pression. Noel Thorpe est un coordonnateur qui utilise de la pression à trois ou cinq joueurs. Celle à cinq vient toujours avec des jeux en croisée. Les Alouettes ont terminé la rencontre contre Toronto avec un seul sac du quart. On ne peut pas parler de pression constante.

La pression à cinq doit être plus soutenue puisqu’il reste seulement sept joueurs en couverture. Une pression à cinq permet d’avoir des affrontements à un contre un avec les joueurs de ligne à l’attaque. Un d’entre eux doit gagner sa bataille pour se rendre au quart. Tant mieux si ce sont les cinq. Mais ça en prend seulement un. Contre Toronto, rares ont été les occasions où un joueur des Alouettes est sorti gagnant.

Toronto a toutefois bien contré cette pression en utilisant de courtes passes. Les Argos ne se sont pas cassé la tête.

Les pénalités font encore mal

Les Alouettes n’ont pas une assez bonne équipe pour être punis autant qu’ils le sont. Ils ne sont pas assez explosifs en attaque pour se permettre de gaspiller des occasions. Ce discours revient souvent au cours des derniers matchs. Contre les Argos, le total s’est élevé à 13 pour 130 verges.

Les pénalités ont deux effets : soit elles te retirent un beau jeu ou elles permettent à ton adversaire de poursuivre une séquence. C’est en plein ce qu’on a vu lundi.

La pénalité à Billy Parker a annulé une interception. Celle à Jeff Perrett a annulé un jeu à Brandon Rutley. Plusieurs infractions en défense ont permis à l’attaque de Toronto de demeurer sur le terrain.

Sur les 13 pénalités des Alouettes, six d’entre elles ont permis aux Argos d’aller chercher un premier jeu. L’attaque continue donc sa séquence et des fois elle est allée marquer des points. D’autres fois, cela lui a permis de contrôler le cadran.

Il y a eu une séquence au premier quart où les Argonauts ont eu le ballon pendant 6:40. Ils ont seulement inscrit un point sur un placement raté, mais ils ont brûlé beaucoup de temps. Cela hypothèque la défense puisque la température était chaude et humide.

Quand on regarde les joueurs qui ont eu des pénalités, il y a Perrett et John Bowman. Ce ne sont pas seulement que des recrues. Les vétérans sont aussi victimes de pénalités. Ça doit cesser.

La semaine d'entraînement est très courte étant donné que les Alouettes ont joué lundi et qu'ils retrouvent le Stade Percival-Molson vendredi. On verra si Bede, l'attaque et la défense auront eu le temps d'apporter les corrections nécessaires.

*Propos recueillis par Christian L-Dufresne