Le nuage s’est dissipé. Maintenant que les joueurs ont ratifié vendredi la nouvelle convention collective qui les lie à la LCF, on peut enfin parler football.

On a tous hâte à la prochaine saison, moi le premier. Découvrir les nouveaux joueurs, leurs nouveaux entraîneurs et leurs stratégies. Malheureusement, les récentes négociations entre les deux partis ont fait de l’ombre à ce qui se passe sur le terrain.

La bonne nouvelle, c’est qu’on va avoir la paix pour cinq ans.

D’une part, l’amateur de football en moi est heureux que tout cela soit réglé. L’ancien joueur que je suis comprend toutefois le stress que mes semblables ont pu vivre ces dernières semaines.

Sans les joueurs, il n’y a pas de Ligue. Je sais. Or, il est important de se rappeler que l’inverse est tout aussi vrai. S’il n’y a pas de propriétaires, il n’y a pas d’équipes, encore moins de joueurs.

La réalité dans la LCF, c’est qu’il y a toujours quelques équipes très fragiles sur le plan financier. En bout de ligne, c’est ce qui a contraint les joueurs à accepter un contrat de travail moins profitable qu’espéré.

C’est sans doute ce que l’Association des joueurs a fait saisir à ses membres des derniers jours. La nouvelle convention collective se devait en effet d’avoir du sens pour Toronto, Montréal et Hamilton, mais surtout Toronto. Les Argonauts en arrachent le plus et peinent à générer des revenus.

Le problème, c’est que le marché de Toronto est vital pour la LCF. Pas d’Argonauts, pas de contrat de télévision, une source de revenus majeure pour la ligue et ses équipes. Le commissaire Mark Cohon et les gouverneurs n’avaient donc pas le choix de se doter d’une entente qui n’allait pas nuire à Toronto, qui risque cependant d’essuyer encore des pertes.

N’empêche, il reste que la Ligue a adopté une attitude quelque peu baveuse, arrogante et irrespectueuse envers les joueurs lors du dépôt des offres initiales. Maintenant que c’est le temps de négocier, la ligue n’est plus en aussi bonne santé que lors du discours très positif prononcé par le commissaire au dernier week-end de la Coupe Grey.

Le problème pour Mark Cohon, c’est que tout le monde écoute...

Rêver en couleur

Bien au fait du lucratif contrat de télévision de la Ligue, les joueurs avaient évidemment raison de s’attendre à recevoir une plus grosse part de ce gâteau. Malgré cela, la Ligue n’était prête qu’à ajouter que quelques miettes au plafond salarial, piquant les joueurs au vif. Disons que ça ne mettait pas la table à des négociations très amicales.

Un ton qui a alors encouragé les joueurs à adopter eux aussi la ligne dure. Pas de convention collective, pas de camp d’entraînement… Pas de convention collective sans plafond salarial de 6,2 millions $ lié aux revenus...

En confiance et s’attendant au meilleur, les joueurs ont ainsi décidé de prendre part à leurs camps d’entraînement respectifs.

Je comprends que les joueurs pensaient en obtenir davantage et avoir plus de pouvoir, mais ils ont peut-être rêvé en couleur. L’Association des joueurs a fait miroiter à ses membres qu’elle serait en mesure d’arracher des gains très appréciables.

Les joueurs ont finalement accepté un plafond salarial de 5 millions $ qui n’est pas lié aux revenus de la Ligue.

Émotifs, les joueurs devraient en vouloir davantage à leurs représentants qu’à la Ligue. L’Association a fixé des attentes trop hautes et tout est tombé à plat par la suite.

À tête reposée, s’ils comparent leur nouveau contrat de travail aux précédents, les joueurs constateront qu’ils ont tout de même fait des gains substantiels. Il y a plus d’argent pour eux.

Je ne sais pas à quel point les joueurs des années 2000 ont sacrifié leur part du gâteau. Ce que je peux assurer par contre, c’est que ceux qui ont œuvré dans les années 90 ont dû faire des concessions majeures sur le plan salarial au nom de la santé de la Ligue.

Si les joueurs ont beaucoup sacrifié au fil des 25 dernières années, il était cependant utopique de croire qu’il récupérerait toutes ces concessions en une seule convention collective.

Vers une 10e équipe?

Les grands gagnants dans ce dossier sont les partisans puisque la saison aura lieu comme prévu. Ensuite viennent les propriétaires, qui ont tenu leur bout afin de s’assurer d’avoir un système leur permettant de faire des profits.

Un modèle financier qui permettra aux équipes de prendre de la valeur, ce qui facilitera la vente de celles-ci, car je vous rappellerai que les Argonauts et les Lions de la Colombie-Britannique appartiennent au même propriétaire. À l’heure actuelle, personne ne veut des Argos.

Avec des coûts fixes, l’arrivée d’une 10e équipe devient aussi plus probable.

Bref, cette entente prépare la prochaine. Dans cinq ans, nous aurons une bien meilleure idée de la santé de la nouvelle LCF, son nouveau contrat de télé, ses nouveaux stades et sa nouvelle franchise à Ottawa, le Rouge et Noir.

Il n’y aura donc plus d’excuse pour la Ligue. Ce sera alors le moment pour les joueurs d’obtenir ce qu’ils leur reviennent.

*Propos recueillis par Mikaël Filion