RDS et RDS Direct présentent la demi-finale de l'Est entre les Alouettes et les Eskimos dimanche dès midi.
AVANT-MATCH

Il y aura de la fébrilité dans l’air au Stade Percival-Molson dimanche, à l’occasion du premier match éliminatoire joué par les Alouettes depuis 2014.

Plusieurs membres de l’édition actuelle des Oiseaux n’ont jamais goûté aux matchs d’après-saison, donc ce sera une dynamique intéressante à surveiller dans la demi-finale de l’Est face aux Eskimos d’Edmonton.

En tant qu’équipe locale ayant affiché la meilleure des deux fiches en saison régulière, ce sont les Montréalais qui sont favoris. De manière générale, les observateurs s’attendent à une victoire des Alouettes.

Il sera quand même curieux de voir quelle émotion habitera les joueurs plus inexpérimentés de l’équipe. Est-ce qu’ils seront détendus, crispés, nerveux? Pour ma part, j’ai toujours pensé qu’en ce qui a trait aux matchs éliminatoires et à l’expérience, une fois le ballon envoyé dans les airs, ce n’est qu’un mot qui ne veut rien dire. Les instincts prennent le dessus une fois le match commencé. Tu ne joueras pas avec plus d’intensité qu’en saison régulière. Normalement, tu donnais déjà ton maximum match après match.

L’expérience des matchs éliminatoires, en ce qui me concerne, ça aide avant toute chose à mieux gérer les énergies durant la semaine de préparation. C’est un danger potentiel que je perçois pour une formation jeune. Celui de changer sa routine en raison de la nervosité, ou bien de tomber à plat après avoir été trop gonflé à bloc avant le coup d’envoi.

Évidemment, les Eskimos débarquent à Montréal sans avoir connu une saison à tout casser. Ils montrent une fiche de 8-10, et seulement deux victoires en neuf parties dans la deuxième moitié de saison. Ces succès ont été obtenus contre le Rouge et Noir d’Ottawa et les Lions de la Colombie-Britannique. Bref, rien de bien éclatant même s’il est vrai qu’ils ont dû faire sans les services de leur quart partant pendant quatre matchs. Les Albertains n’ont pas été bien menaçants dans les stades adverses non plus, avec une fiche cumulative de trois gains et six revers.

Clairement, on a affaire à une équipe qui est à la portée des Alouettes. Je ne pense pas qu’on verra arriver un club visiteur débordant de confiance dimanche.

La 1re mi-temps fait foi de tout pour Edmonton

J’ai bien hâte de voir quelle équipe prendra l’ascendant durant la première demie. Pour les Alouettes, ç’a été plus ou moins important cette saison, car ils nous ont habitués à connaître des performances en montagnes russes. Les remontées au quatrième quart, ça ne les effraie pas et ils en ont fait la preuve à quelques reprises.

De l’autre côté du spectre cependant, c’est carrément « noir ou blanc » avec les Eskimos. Lorsqu’ils ont mené au tableau indicateur après deux quarts de jeu en 2019, ils ont remporté chacun de leurs sept matchs. Mais lorsqu’ils tiraient de l’arrière à la mi-temps, ç’a été complètement l’inverse avec une fiche de 1-9. En anglais, on dirait qu’ils sont une équipe de front runners. Ils se sentent à l’aise avec une priorité au score, mais n’aiment pas se retrouver en mode rattrapage. C’est un scénario potentiellement intéressant pour les Als s’ils devaient sortir forts.

On se souviendra que durant la semaine no 1, Antonio Pipkin s’était blessé face à ces mêmes Eskimos, et Vernon Adams fils avait aidé à amorcer une spectaculaire remontée qui était tout juste tombée à court. Il avait donné des maux de tête au Eskimos.

Puis le 20 juillet, les Als avaient remporté leur match à domicile face aux Eskimos, en les limitant cette fois à seulement 10 points (marque finale de 20-10). Dans les deux duels, Edmonton a démontré une vulnérabilité face à la grande mobilité d’Adams.

Faire payer les Eskimos pour leur agressivité

Une des plus grandes confrontations qu’on voudra observer est celle entre le front défensif agressif des Eskimos et la ligne offensive montréalaise. La ligne défensive des Eskimos ne fait pas dans la dentelle; elle aime appliquer énormément de pression sur le quart, parfois à quatre joueurs, mais souvent aussi à cinq, six et même sept joueurs. Clairement, la philosophie est d’empêcher l’attaque adverse de trouver son rythme et de faire jouer nerveusement le quart adverse. La rapidité avec laquelle Adams parviendra à trouver ses cibles ainsi que la protection offerte par les porteurs de ballon seront deux aspects cruciaux.

Qui dit pression incessante sur le quart dit aussi couverture homme à homme dans la tertiaire. Un sage homme de football a déjà dit : « Tu vis par le blitz, et tu péris par le blitz! » En ce sens, les receveurs des Alouettes doivent se frotter les mains à l’idée de travailler aussi librement. Il y aura régulièrement des situations un contre un qui ne demanderont qu’à être exploitées. Et mine de rien, les Als mènent la ligue quant à l’efficacité des gros jeux aériens. De toutes les passes ayant voyagé plus de 20 verges dans les airs, pas moins de 48 % ont été complétées par les Oiseaux. Du lot, 16 passes ont été captées pour des touchés.

Je vous rappelle que les Eskimos ont récolté 56 sacs du quart durant le calendrier régulier. C’est le plus haut total dans la LCF, tout comme les 16 pénalités écopées pour rudesse contre le quart. Comme vous le voyez, c’est écrit dans le ciel que la stratégie défensive tournera autour de l’idée de brasser le quart montréalais.

Si je récapitule, oui, il y aura un élément « menace » provenant de cette agressivité des chasseurs de quarts des Eskimos. Mais l’envers de la médaille est qu’il y aura forcément des opportunités à saisir. Il faut faire payer chèrement l’adversaire pour cet excès d’agressivité.

Une des façons les plus évidentes de contenir la pression du front défensif adverse, c’est de remettre le ballon au demi offensif. Le fait d’impliquer William Stanback sera une des clés en offensive.

Dans le match en juillet, ça avait été réparti également au niveau de la production du jeu au sol entre Stanback, Adams et Jeremiah Johnson. Ça avait été un peu difficile pour Stanback face aux Eskimos, et ça s’inscrit dans la façon de jouer des Eskimos. Ils amènent tellement de joueur dans le champ-arrière qu’il est normal, lorsqu’il y a de la pénétration, que le porteur de ballon essuie des pertes de terrain ici et là. Je me souviens d’un troisième essai et une qui s’était transformé en jeu négatif de deux verges.

Si Stanback n’arrive pas à prendre son élan, c’est payant pour Edmonton. Mais s’il arrive à échapper aux plaqués, il y a le potentiel de jeux de course d’une douzaine de verges et plus.

Une autre façon, dans un match disputé à domicile, est de les forcer à prendre des pénalités. Ils ont tendance à voler le départ pour se rendre rapidement au quart. Tu es chez toi, dans ton stade, et tu as le contrôle sur le bruit de la foule. Les ingrédients sont réunis pour que les Eskimos écopent de pénalités de hors -jeu en utilisant la cadence verbale. C’est un élément banal mais qui peut faire toute une différence.

Pour conclure du point de vue offensif, je serai intéressé de voir si les Alouettes arriveront à maintenir leur tendance à terminer leurs séries dans la zone payante avec des touchés. C’est une variable non-négligeable car Edmonton est premier dans le circuit pour le nombre de points alloués dans la zone payante, tandis que Montréal vient aussi en tête de lice pour le taux de réussite, à 68 %. À cet égard, ce sera force contre force!

Dans le match du 20 juillet, les Als n’avaient converti en touché qu’une de leurs trois occasions à l’intérieur de la ligne de 20 des Eskimos. Il faudra avoir une mentalité de « sans pitié » pour aller chercher les quatre points supplémentaires quand on sent la zone des buts se rapprocher.

Chez les Eskimos, le quart Trevor Harris revient au jeu après une absence d’un mois. Cet été, on l’avait dérangé. Il n’avait pas décoché de passe de touché et avait été victime de deux interceptions. C’était d’ailleurs les deux premières interceptions de sa saison. Harris n’avait pas essuyé de sac du quart mais avait été régulièrement mis sous pression. Son travail avait été affecté de façon significative.

Harris est un quart qui dégaine rapidement. Il faut assurément mettre tout en œuvre pour le forcer à ignorer sa première lecture. Une des façons d’y parvenir est d’embêter le travail de ses receveurs. S’ils arrivent en retard à l’endroit où le ballon est censé aboutir, Harris se retrouve à conserver le ballon une seconde ou deux de plus. C’est l’effet domino : ça permet à la pression défensive de se rendre à lui. Il deviendra soudainement plus nerveux et il perdra du rythme, un des éléments les plus importants dans ses succès.

C’est un défi plutôt imposant pour la défense car Harris est un quart qui sans problème arrive à compléter entre 70 et 75 % de ses passes. On sait aussi que les Als formaient en saison régulière la défense qui concède le plus haut taux de passes complétées aux quarts adverses, à 74 %. C’est aussi une unité montréalaise qui freine rarement des séquences offensives après deux essais (seulement 69 fois cette saison). Il ne faut surtout pas laisser Harris compléter un paquet de passes et ainsi contrôler le temps de possession.

En conclusion, comme tout match éliminatoire au football canadien, on ne parle pas ici d’une série quatre de sept. C’est 60 minutes qui décideront qui s’en ira en finale de l’Est la semaine suivante.

Il y aura des impondérables qui auront échappé à cette analyse. Un de ceux-ci sera la discipline, car les Eskimos formaient l’équipe la plus punie de la ligue en saison régulière. À l’inverse, j’ai aimé la discipline démontrée par les Als dans leurs six derniers matchs.

Par ailleurs, qui nous sortira un lapin de son chapeau avec un jeu truqué? Dans un match sans lendemain, l’occasion peut être belle de sortir un jeu qui changera complètement la dynamique.

Dans la deuxième confrontation de l’année entre les deux clubs, Eugene Lewis avait décoché une passe en direction de Vernon Adams fils pour le majeur.

Finalement, les unités spéciales d’une des deux équipes sauront-elles donner du rythme à leur équipe avec un gros jeu tel un retour explosif?

En conclusion, je vous avouerai  que j’ai hâte de voir quel visage nous montrera la défense de Khari Jones. Car elle a eu de multiples visages au cours des quatre derniers mois. Il est trop souvent arrivé que l’équipe n’applique pas suffisamment de pression sur les quarts adverses pour les déranger. Mais ce n’est pas parce qu’on n’a pas tenté différents types de stratégies. Et récemment, on a vu un blitz plus soutenu.

 Que verrons-nous dimanche? Est-ce que Jones retournera à ce qui a déjà fonctionné face aux Eskimos par le passé? Ou à l’inverse, cherchera-t-il l’effet de surprise dans cet éternel jeu d’échecs entre les entraîneurs-chefs?

La réponse à toutes ces questions dimanche dès midi sur RDS!