Nous sommes le 3 janvier et on en connaît déjà un peu plus sur le groupe d’entraîneurs de Mike Sherman, ce qui est en soi une bonne nouvelle.

Par le passé, on faisait souvent des annonces tardives et ce n’est jamais la meilleure solution. Sherman avait laissé entendre qu’ils allaient travailler là-dessus pendant le temps des Fêtes pour annoncer ça le plus rapidement possible et voilà le résultat.

C’est dur de porter un jugement sur les différentes embauches. Je veux donner la chance aux coureurs, mais ma première impression, c’est qu’il n’y a pas beaucoup d’expérience chez les coordonnateurs et l’entraîneur-chef. En même temps on a été audacieux, on a un mélange de NFL, de LCF, de plus vieux et de plus jeunes. C’est correct aussi de mélanger les idées. Il ne faut pas que tout le monde pense de la même façon et amène les mêmes idées.

Mike Sherman avait dit vouloir amener des entraîneurs provenant de ses propres contacts, des gars avec qui il a déjà travaillé et en qui il a confiance, pour se mêler à des gars de la LCF. Pour l’instant, ce n’est pas ce qu’on voit, et j’ai hâte de voir qui Sherman va amener.

On semble surtout avoir pigé dans les contacts du directeur général Kavis Reed. Rich Stubler a été le mentor de ce dernier pendant des années. Reed a joué et a été entraîneur pour Stubler. Khalil Carter a également joué pour Stubler et il a été entraîneur des demis défensifs avec les Stampeders alors que Stubler y était le coordonnateur défensif. Khari Jones, lui, a joué pour les Tiger-Cats au moment où Reed y était entraîneur. Comme connexions, c’est non négligeable, au football il faut être capable de travailler ensemble et de passer beaucoup d’heures ensemble. C’est donc intéressant de voir ça. Mickey Donovan, c’est la plus grande surprise du lot. Il a déjà été affecté aux unités spéciales dans les rangs universitaires, mais pas professionnels. De l’extérieur, je croyais que ça allait bien pour lui à l’Université Concordia. Être entraîneur-chef dans la ligue universitaire, c’est un bon boulot. Laisser ce poste pour aller dans les rangs professionnels, c’est une décision audacieuse de sa part. Le président des Alouettes Patrick Boivin était l’ancien directeur des sports à Concordia, c’est peut-être ce qui a fait la différence.

Même s’il est une recrue, Carter a au moins appris dans le système de Stubler, qui est dans la LCF depuis 30 ans, et il a bien fait avec la tertiaire à Calgary. Là-bas, DeVone Claybrooks utilisait beaucoup ce que Stubler a fait et Carter était impliqué là-dedans. Carter va arriver à Montréal avec de bonnes idées et ça va l’aider d'avoir Stubler à ses côtés. Stubler est un ancien entraîneur-chef, mais il faut admettre que ça n’a pas été un grand succès à ce chapitre. Comme on en voit souvent dans le football, c’est un grand coordonnateur adjoint, mais pas un grand entraîneur-chef. Quand même, il connaît la ligue, il connaît les règlements. Sherman est un gars d'attaque, et s'il veut tester des choses, il pourra se tourner vers lui.

Dans le cas de Khari Jones, c’est un ancien quart-arrière. Il connaît la position, il sait c’est quoi se faire ramasser, se faire plaquer. Il va pouvoir se mettre dans la peau du quart. C’est important pour la communication avec son joueur. Il va sûrement avoir une bonne discussion avec ses quarts et leur demander ce qu’ils aiment bien. Il a quand même quatre ans d’expérience comme coordonnateur à l’attaque, soit une année avec les Ticats et trois avec les Lions. Par contre, on a vu une régression l’an passé en Colombie-Britannique. Les Lions ont eu des problèmes de ligne à l’attaque, et sans ligne à l’attaque, c’est dur pour n’importe qui d’avoir du succès. Jonathon Jennings, un quart très prometteur qui était en feu en 2016, a lui aussi vécu une régression en 2017 et c’était décevant. Cela dit Jennings a été blessé à une épaule. Ç’a été une drôle d’année. C’est peut-être ce qui fait que BC a apporté des changements. Jones, ce n’est probablement pas le nom le plus sexy à ce poste et certains pourraient même avoir des doutes sur ses capacités, mais moi je pense au fait que Sherman est un spécialiste de l’attaque qui va sûrement amener des idées et ça fera peut-être un duo intéressant.

Enfin, Donovan aura un très grand défi. Il a laissé un bon emploi avec une bonne sécurité, il faut croire qu’il est prêt à le relever. Ce sera une dynamique différente dans chez les pros. En plus, il s’occupe des unités spéciales et c’est une grosse commande. La bonne nouvelle, c’est qu’on n’a pas reconduit celui qui était là l’an dernier, Bruce Read, car ce fut un désastre. Donovan a un profil intéressant. Au-delà du manque d’expérience, il est jeune, dynamique et enthousiaste. C’est un ancien secondeur au niveau universitaire et il a de l’intensité. C’est aussi un grand défi car les Alouettes prétendent avoir une équipe très talentueuse, mais j’ai mes réserves. Il faut faire avec les ingrédients qu’on a sous la main sur les unités spéciales : ça va du 25e au 44e joueur sur la formation bien qu’elle peut également comporter certains partants. Si tu n’es pas l’équipe la plus talentueuse avec le plus de profondeur, avec le plus de talent canadien, c’est un gros défi. Sherman a d’ailleurs vite compris l’importance des joueurs canadiens, il en a fait l’allusion lors de son point de presse en disant à Reed que le repêchage allait être important et qu’il ne faut pas se tromper. Bref, j’ai l’impression que Donovan va arriver avec une bonne éthique de travail, qu’il sera prêt et qu’il voudra faire bonne impression. Cela dit, c’est au moment où la saison commence qu’on aura de vraies réponses.

Plusieurs autres postes à combler

Maintenant, parlons des entraîneurs de position.

Anthony Calvillo ne dirigera plus les quarts-arrières cette saison. C’est juste une impression, mais quand je le voyais l’an passé, il n’avait pas l’air à avoir beaucoup de plaisir. C’est sûr que les résultats n’ont pas aidé et que c’était très difficile pour tout le monde, mais entraîner, c’est une vocation. Pour quelqu’un qui a une jeune famille, c’est beaucoup de sacrifices. En plus d'être coordonnateur offensif, Jones prendra-t-il donc la relève d'AC? On a de jeunes quarts, mis à part Darian Durant, et il faut les développer.

À la ligne à l’attaque, si on ramène Paul Charbonneau, je n’ai pas de problème avec ça. Il a quand même fait du bon travail malgré toutes les blessures. En début d’année, la ligne offensive des Alouettes était parmi les meilleures. Ensuite, ce fut le festival des blessures. Par contre, il faut se rappeler qu’une des premières choses qu’a dites Sherman, c’est que parmi ses premiers emplois chez les pros, il était lui-même entraîneur de la ligne à l’attaque. Il a peut-être d’autres noms en tête, un entraîneur américain pourrait bien s’en tirer à ce titre. Il faut absolument solidifier la ligne.

Ensuite, s’il y a un groupe qui a sous-performé l’an passé, c’est celui des receveurs de passe. L’entraîneur des receveurs sera primordial.

Pour ce qui est de la ligne défensive, soulignons qu’on n’a jamais remplacé Mike Sinclair. Il était l’entraîneur de la ligne défensive dédié exclusivement à la ligne défensive sous les ordres de Mark Trestman. C’est un ancien joueur vedette dans la NFL, il a fait un bon boulot dans la LCF, et on ne l’a jamais remplacé. Ça en prend un bon. Que ce soit au football américain ou canadien, le mandat est le même : attaquer le quart adverse. Évidemment, ça prend de bons joueurs aussi.

Ce sont les quatre groupes les plus importants qui me viennent à l’esprit. Je ne sais pas non plus ce qui arrivera au niveau des porteurs de ballon. André Bolduc a bien fait l’an passé et j’espère qu’on va lui offrir la chance de revenir. C’était probablement la position à laquelle on a le mieux performé en 2017. Pensons aussi à Billy Parker et aux demis défensifs. Khalil Carter est un spécialiste de la tertiaire. Peut-il s’occuper de la tertiaire en plus d’être coordonnateur? Je ne sais pas.

Tout ça pour dire qu’on commence à avoir de plus en plus de morceaux dans le casse-tête, mais il y a encore du pain sur la planche. J’ai hâte de connaître les autres adjoints. L'entraîneur arrive avec sa philosophie, les coordonnateurs arrivent avec leur système. Mais qui enseigne les systèmes, les fondamentaux? Qui sont tous les jours avec les joueurs? Ce sont les entraîneurs de position. Ce sont des entraîneurs qui ont un impact très important dans les performances d’une équipe. C’est la prochaine étape.

Attendons au début de la campagne pour voir le résultat. On a beau avoir des entraîneurs, mais il faudra aussi trouver des joueurs. Si on compte sur un groupe d’entraîneurs exceptionnels, mais qu’on n’a pas de joueurs sur le terrain, on ne sera pas plus avancé. On a tous hâte que la saison 2018 commence.

*Propos recueillis par Audrey Roy