MONTRÉAL – Le même jour, Quan Bray a perdu sa mère et son père. Déjà bouleversé par le décès de sa mère, le receveur des Alouettes a appris quelques heures plus tard qu’elle avait été assassinée par son père.

 

Le 3 juillet 2011, Bray était au volant de sa voiture et il avait raté quelques appels. C’est également là que son père lui a envoyé un message texte pour lui dire de s’enquérir de ce qui se passait avec sa mère, Tonya Bray.

 

Inquiet, il tenait à être le premier membre de sa famille à arriver sur les lieux de la résidence familiale à LaGrange en Géorgie. À son arrivée, le véhicule de sa mère était vide et percé de trous de balle. Les autorités l’ont envoyé sur-le-champ à l’hôpital où la tragédie lui a été annoncée. 

 

« J’étais avant tout en état de choc, je ne crois même pas avoir pleuré sur le coup pour cette raison. Je me demandais si je vivais un cauchemar ou si c’était la réalité », a-t-il raconté à RDS dans le cadre d'une entrevue planifiée depuis quelques semaines. 

 

Peu de temps après, son père se rendait à la police afin d’admettre son crime.

 

Alors âgé de 18 ans, Bray a été immédiatement catapulté dans une nouvelle vie. Au lieu de s’effondrer, il a choisi de se servir de ce drame comme une motivation. Son instinct de survie était trop fort pour s’affaisser surtout qu’il devait désormais s’occuper de son jeune frère, Jymere (Jones), qui n’avait que 10 ans.

 

« Ce fut le point tournant de ma vie, le moment que j’ai dû devenir un homme. Mais même les pires choses surviennent pour une raison. Dans mon cas, c’était pour que je devienne un homme et que je reste fort pour le bien de mon petit frère et ma grand-mère », a découvert Bray.

 

Quan BraySa résilience était puissante au point qu’il s’est présenté, dès le lendemain, à un camp de l’Université Auburn qui venait de le recruter. Même en essayant de s’imaginer une partie de sa souffrance, on ne parvient pas à comprendre où il a puisé cette force.

 

« J’ai l’impression d’avoir été bâti pour de telles épreuves. Le football m’a aidé énormément surtout en sachant qu’elle voulait que je réussisse. Elle s’assurait que j’étais sérieux dans le football », a confié l’Américain de 26 ans qui ne se sent pas prêt à pardonner son père. 

 

« Si je suis fatigué et que je n’ai pas le goût de sortir du lit, je dois me souvenir de ce qui se passe à la maison. Je parle de mon petit frère qui s’inspire de moi et qui souhaite être le meilleur lui aussi. Je ne peux pas simplement lui dire quoi faire sans être à la hauteur de mon côté, ce serait hypocrite », a exprimé Bray à propos de son « petit » frère qui mesure maintenant six pieds trois pouces.

 

L’athlète de cinq pieds dix pouces a tout de même peiné à trouver de nouveaux repères.

 

« Certaines journées ont été vraiment éprouvantes, je n’avais plus de personnes sur lesquelles me fier. Des membres de la famille venaient nous épauler, mais je ne savais plus en qui je pouvais avoir confiance. »

 

Heureusement pour lui, sa grand-mère est devenue son phare et sa bouée de sauvetage en même temps.

 

« J’apprécie énormément tout ce qu’elle fait. Elle est la raison qui explique ce que je suis aujourd’hui. Je ne voulais pas retourner à la maison, je voulais toujours être avec elle. Sa force me pousse à avancer », a exposé celui qui est rapidement devenu une ressource de confiance à Montréal.

 

Quan BrayEn cours de route, sa réalité particulière l’a forcé à procéder à des choix déchirants.

 

« En devant agir comme un père, j’ai eu à devenir mature plus rapidement et à prendre de meilleures décisions comparativement à des jeunes du même âge. J’ai dû m’éloigner de quelques personnes et j’ai eu à faire les choses d’une manière différente parce que j’étais devenu l’exemple mon frère », a précisé celui qui a publié le livre Keep The Dream Alive pour raconter son parcours.

 

Ce titre est significatif parce que personne n’aurait blâmé Bray de renoncer à ses plus grands rêves pour veiller sur son frère tout en choisissant un métier plus sécuritaire. Au contraire, il s’est nourri de ses ambitions et il a atteint la NFL, notamment avec les Colts d’Indianapolis, en 2015 même s’il n’a pas été repêché.

 

Poursuivre l’héritage de sa mère

 

Bray ne s’est pas uniquement accroché à son souhait, il l’a fait avec une attitude qui rendrait sa mère encore plus fière. C’est encore plus vrai, car il s’agit de ses legs les plus précieux.

 

« Probablement mon sourire, elle avait un magnifique sourire. Je dirais aussi son énergie et c’est justement le moteur de ma vie, la chose qui me pousse à demeurer positif », a identifié Bray sur les choses qu’il a héritées de sa fan numéro un.

 

« C’est une histoire tellement incroyable. Tout le monde doit composer avec des difficultés, mais c’est rare de trouver un événement plus négatif que celui-ci dans une vie et il a transformé ça en positif. Les personnes fortes sont en mesure de garder le sourire, voilà ce qu’il est », a décrit Zac Parker, l’un de ses meilleurs amis chez les Alouettes avec Greg Reid.

 

Il a rendu un bel hommage à sa mère avec un tatouage de son visage et il en porte un autre ‘Love is pain’ qui prend tout son sens – et plusieurs sens – avec son histoire personnelle et sa carrière au football.

 

« Le football, c’est ma façon de m’évader de ce drame. Je sais aussi qu’elle aurait voulu que je continue à jouer. J’aurais facilement pu abandonner, mais je ne sais pas où je serais rendu dans la vie si j’avais renoncé au football », a conclu Bray qui espère vivre le bonheur à Montréal.