MONTRÉAL - Passer de la troisième division collégiale à la NFL en cinq ans est un rêve qu'on pourrait croire irréalisable. Bien, Laurent Duvernay-Tardif est en train de déjouer les pronostics - et même les siens - alors que le joueur de ligne offensive attire de plus en plus de regards du côté des États-Unis.

Depuis un an, le joueur des Redmen de McGill vit dans un véritable tourbillon. Le tout a commencé lorsque l’étudiant en médecine s’est démarqué lors du Défi Est-Ouest en mai 2013, à London en Ontario. Le jeune homme de 22 ans a dominé les tests physiques à sa position ce qui lui a permis de se faire remarquer par les recruteurs de la NFL.

De nature plutôt réservée, Duvernay-Tardif ne s’est pas enflé la tête avec cet intérêt de la NFL. Des équipes comme les Bears, les 49ers, les Jets, les Packers et les Colts, pour ne nommer que celles-là, ont le produit du collège André-Grasset sur leur radar.

Laurent Duvernay-TardifMais aujourd’hui, après quatre dominantes saisons dans le réseau universitaire québécois, le natif de Mont-Saint-Hilaire met toutes les chances de son côté pour percer dans le plus prestigieux circuit de football.

La première étape : s’entourer d’une équipe qui lui permettra de gagner en notoriété dans le pays de l’Oncle Sam. Duvernay-Tardif possède déjà depuis un bon moment un agent certifié pour la LCF, son ami qui terminera son barreau au mois de mai, Sasha Ghavami. Les deux hommes ont déniché une agence qui répondait aux exigences qu’ils s’étaient fixées, soit de pouvoir faire connaître le bloqueur auprès des recruteurs et dirigeants des formations de la NFL.

Leur choix s’est arrêté sur l’agence Allegiant Athletics Agency (a3 Athletics), qui compte parmi ses clients plusieurs joueurs actifs dans la NFL et dans la NBA. Duvernay-Tardif s’est donc envolé en direction de Knoxville au Tennessee, vendredi dernier, pour aller se préparer en vue de la Classique Shrine, étape importante dans sa quête de visibilité.

« La Classique Shrine sera ma première exposition à la différence de talent. C’est bien beau d’en parler, mais quand tu ne t’es jamais comparé aux joueurs de la NCAA, tu ne sais pas exactement ce que tu vaux », a-t-il humblement résumé.

Le Québécois tente donc de se faire un nom pour le repêchage qui se déroulera en mai. S’il n’est pas repêché, une équipe pourrait lui offrir un contrat, ce qui est l’option la plus envisageable étant donné qu’il n’est pas répertorié parmi les espoirs de la NFL.

« Lorsqu’on a proposé Laurent à cette agence, ils ne le connaissaient pas. Ils se sont informés et ils m’ont rappelé dans les heures qui ont suivi. Cette agence a beaucoup de contacts du côté des recruteurs et des directeurs généraux. Il faut vraiment profiter du peu de temps à notre disposition. On a une fenêtre de deux mois pour le faire connaître », a expliqué Sasha Ghavami.

Beaucoup de ressources à sa disposition

L’imposant joueur de six pieds cinq pouces et 310 livres s’entraîne avec Charles Petrone, un préparateur physique réputé, dans un complexe d’entraînement tout près de l’agence. Duvernay-Tardif suit un entraînement spécifique pour se préparer pour les tests physiques qui seront tenus pendant la semaine de la Classique Shrine, qui regroupe une centaine d’étoiles provenant pour la plupart d’institutions de la NCAA.

Le joueur de ligne par excellence du Sport interuniversitaire canadien (SIC) bénéficie aussi des conseils d’un entraîneur de ligne offensive pour parfaire sa technique. Il pourra également s’adapter aux règlements qui diffèrent entre le football américain et canadien.

« Il n’y a pas de verge entre les deux lignes. Je vais aussi pratiquer avec des joueurs américains. On me prépare également avec un directeur marketing pour savoir comment faire les entrevues », a-t-il ajouté.

Deux joueurs du SIC sont invités à cette classique annuelle qui en sera à sa 89e édition le 18 janvier prochain.

« Il y a longtemps qu’un joueur du Canada n’est pas ressorti du lot lors de cet évènement. J’ai mis mes études en médecine de côté pour me concentrer sur mon entraînement. J’essaie de mettre les chances de mon côté et j’espère que ça va donner de bons résultats », a relaté celui qui a reçu la mention d’honneur du gouverneur général du Canada pour l’excellence sportive et académique en novembre dernier.

L’objectif du bloqueur est d’impressionner suffisamment pour ensuite recevoir une invitation pour les tests physiques de la NFL (NFL Combine), la dernière chance de se faire valoir auprès des recruteurs.

Scruté à la loupe

Laurent Duvernay-Tardif a été nommé meilleur espoir en vue du repêchage de la Ligue canadienne de football dès le premier classement en septembre.

S’il est bien connu de ce côté-ci de la frontière, les recruteurs de la NFL d’une dizaine d’équipes ont voulu en savoir plus sur le no 66 des Redmen au courant de la saison. Les entraîneurs de McGill ont envoyé des bandes vidéo aux formations intéressées par les services de Duvernay-Tardif. Un recruteur des Bears de Chicago a également assisté à la rencontre du 28 septembre dernier entre les Redmen et les Stingers au stade de l’Université Concordia.

Toute cette attention a mis de la pression supplémentaire sur les épaules du joueur de ligne offensive qui, il faut le rappeler, n’a que 22 ans. En plus de son entraînement et du football, Duvernay-Tardif passait aussi beaucoup de temps dans sa formation pour devenir médecin.

Laurent Duvernay-Tardif« En plein milieu de la saison, j’ai eu une blessure à l’épaule. La médecine était très exigeante alors que j’y consacrais environ 70 heures par semaine en plus de jouer au football. C’était vraiment fou, fou, fou! », a raconté celui qui a reçu un grand appui du département athlétique de l’Université McGill.

« Il est resté très terre à terre dans cette situation. Il a pris ça au jour le jour. Toute sa concentration était mise dans les choses qu’il pouvait contrôler. Notre message était de nous laisser s’occuper de ses affaires hors du terrain pour qu’il se concentre sur lui-même », a mentionné Ghavami.

Les études universitaires ont toujours été une priorité pour Duvernay-Tardif. Ce dernier a reçu une bonne nouvelle de sa faculté cet automne lorsqu’elle lui a confirmé qu’elle lui donnait cinq ans pour terminer la dernière année de son programme.

« C’était stressant de se dire que si ça ne fonctionnait pas, il fallait que je recommence ma médecine. Ça n'avait pas de sens dans ma tête. De savoir qu’il y a des gens qui m’encouragent et qui essaient de m’accommoder, ça me fait vraiment du bien », s’est-il exclamé en précisant que si tout va bien, il complétera ses études pendant les saisons mortes.

Il a aussi eu la chance de s’entretenir avec l’ancien joueur québécois de la NFL, Jean-Philippe Darche. Celui-ci est passé par les mêmes étapes alors qu'il étudiait en médecine à McGill avant son parcours dans la NFL avec les Seahawks de Seattle et les Chiefs de Kansas City.

« J’avais des questions par rapport à l’aspect business de la NFL. Mais il m’a rassuré en me disant qu’il y avait moyen d’avoir un esprit d’équipe et d’avoir du plaisir. Il m’a rappelé que c’est quand même un sport d’équipe », a affirmé Duvernay-Tardif.

Le bloqueur reviendra passer le temps des Fêtes au Québec. Il retournera à Knoxville le 2 janvier pour continuer son entraînement au sein de l’agence Allegiant Athletics Agency jusqu’à la Classique Shrine.

Même si l’aventure de la NFL ne fonctionne pas pour Duvernay-Tardif, un avenir prometteur se dessine devant lui que ce soit dans la LCF ou dans la pratique de la médecine. Le bloqueur a démontré une approche réfléchie par rapport à ce processus et il prouve que sa plus grande qualité est d’avoir une bonne tête sur les épaules.

Les honneurs sportifs et académiques de Laurent Duvernay-Tardif :

- Récipiendaire du trophée J.P.-Metras (2013), remis au joueur de ligne par excellence du SIC

- Finaliste au prix Russ-Jackson (2013), qui récompense les résultats sportifs, académiques et l'engagement communautaire

- Nommé sur l'équipe d'étoiles du SIC en 2012 et 2013 (bloqueur)

- Nommé sur la première équipe d'étoiles du RSEQ en 2012 et 2013 (bloqueur)

- Récipiendaire du prix de leadership et engagement social RSEQ (2013)

- Capitaine chez les Redmen en 2011, 2012 et 2013

- Moyenne de 3,88 dans ses études préparatoires à la médecine en 2010-2011 et a obtenu des notes parfaites lors des trois années suivantes.

- Mention d'honneur du gouverneur général du Canada pour l’excellence sportive et académique (2013)

- Récipiendaire du prix des « Champions de 1938 de McGill » (2011 et 2013) récompensant le leadership, les prouesses sportives et l’excellence académique

- Plusieurs bourses dont deux des Alouettes de Montréal

- Nommé étudiant-athlète universitaire de l’année 2012-2013 en excellence académique volet masculin lors du 28e Gala du sport universitaire québécois

Équipes :

- Redmen de McGill (2010 à 2013) --> Positions occupées : bloqueur et parfois ligne défensive (aucune fois en 2013)

- Phénix du collège André-Grasset dans la 3e division collégiale (2008-2009) --> Position occupée : joueur de ligne défensive

- Pirates de la vallée du Richelieu (2005-2008) --> Position occupée : joueur de ligne