COLLABORATION SPÉCIALE

Le premier tournoi de la nouvelle série LIV Golf mise de l’avant par Greg Norman et soutenue par des intérêts financiers de l’Arabie Saoudite se déroulera au Centurion Club, non loin de Londres, à compter du 9 juin prochain. L’événement sera directement en opposition à l’Omnium canadien RBC du circuit PGA Tour et au Volvo Scandinavian Mixed du DT Tour, la nouvelle appellation du circuit européen.

L’arrivée de ce nouveau circuit engendrera inévitablement des bouleversements majeurs pour le golf professionnel. Par la voix de son commissaire Jay Monahan, le circuit PGA Tour a rappelé à ses membres qu’ils ne peuvent pas participer aux activités de la série LIV sous peine de sanctions disciplinaires.

Dustin Johnson, ancien numéro Un mondial qui compte 24 victoires en carrière sur le circuit PGA Tour; a annoncé qu’il a accepté l’offre du nouveau circuit. Les rumeurs entourant son arrivée sur LIV font état d’un boni de signature de 150 millions de dollars américains. Se joindront à lui Sergio Garcia, Kevin Na, Louis Oosthuizen, Charl Schwartzel, Martin Kaymer, Lee Westwood, Ian Poulter et Graeme McDowell.

Le noyau des joueurs vedettes du PGA Tour demeure cependant intact pour le moment.

Cette compétition modifiera-t-elle le portrait à plusieurs égards ?

Bien entendu.

D’abord en offrant des revenus garantis aux golfeurs qui en feront partie. On a même approché le vénérable Jack Nicklaus afin d’obtenir son appui. Il aurait refusé une offre de 100 millions de dollars. Tous n’auront pas la même réaction.

Le calendrier comprend sept tournois et une grande finale. Les bourses offertes sont de l’ordre de 255 millions de dollars. 25 millions par tournoi et quatre millions assurés au vainqueur d’une compétition qui ne comptera que 54 trous (d’où l’appellation du circuit en chiffres romains). Il n’y aura pas d’élimination et les joueurs seront incorporés dans des équipes.

Reste au circuit LIV à recruter des jeunes joueurs. Les futures vedettes ont opté pour le confort du PGA Tour, mais qui sait combien de temps les golfeurs de la relève résisteront à cette pluie de dollars qui provient de l’Arabie Saoudite qui a clairement indiqué son intention qu’elle veut ainsi améliorer son image sur la scène internationale. Le Royaume n’a pas toujours baigné dans des eaux calmes en matière des droits de l’homme, loin de là.

Ça ne sera pas la première, ni la dernière fois que l’on jouera sur la conscience élastique des sportifs professionnels. Nombre de joueurs ont accepté de participer au tournoi Invitation de l’Arabie Saoudite sur le circuit européen au cours des dernières années en encaissant des millions et des millions de dollars. On repassera pour s’offusquer de l’affaire Khashoggi.Plusieurs commanditaires ont déjà signifié qu’ils mettaient un terme à l’association qu’ils avaient avec les transfuges. Dustin Johnson et Graeme McDowell, longtemps associés à RBC sont dorénavant orphelins de ce partenaire important. C’est également le cas pour Lee Westwood et Louis Oosthuizen qui ont perdu leur contrat avec UPS. Il est certain que cela aura un effet domino sur l’ensemble des commanditaires.

Et on a bien hâte de voir où se situeront les principaux manufacturiers  d’équipement qui pour la plupart sont associés avec les joueurs vedettes pour des motants très importants. Callaway à titre d’exemple a déjà suspendu son alliance avec Phil Mickelson, même si ce dernier n’a pas encore officiellement indiqué qu’il sera à Londres prochainement.

Dans les faits, Greg Norman  avait proposé un tel circuit dans les années 1990 voulant sortir des limites du circuit PGA Tour afin que les meilleurs de la profession puissent engranger encore plus de bénéfices. Le commissaire de l’époque, Tim Finchem, avait répliqué avec la création de la série de Championnats Mondiaux réservés aux 50 meilleurs joueurs au monde. Norman n’a jamais  digéré l’affront.

Il est évident que cette nouvelle situation risque d’engendrer une bataille juridique sans merci qui pourrait ressembler aux poursuites anti-monopole intentées contre la NFL il y a quelques années. Dans ce cas-ci, ce sont une multitude d’entreprises qui seront touchées. Les partenaires et les commanditaires, l’ensemble des intervenants de l’industrie et surtout les joueurs eux-mêmes qui sont tous des « présidents de compagnies » qui dans bien des cas ont des chiffres d’affaires très importants.

Il reste encore plusieurs points en suspens et qui n’ont pas encore été éclaircis par les dirigeants de LIV, notamment les droits de télédiffusion de ces fameux tournois.

Un des aspects les plus désolants des propos entendus par ceux qui ont opté pour la nouvelle ligue, c’est d’en entendre plusieurs se plaindre qu’ils ont été exploités. Quand on profite de l’un des meilleurs fonds de pension du sport professionnel et qu’on a engrangé des dizaines et des dizaines de millions de dollars sinon davantage, on pourrait peut-être se garder une petite gêne en prononçant le mot « exploité » et en acceptant des bonis qui ne feront que confirmer dans bien des cas qu’ils sont en fin de carrière.