Marc Bergevin croit en son monde
Canadiens lundi, 25 févr. 2019. 18:58 dimanche, 15 déc. 2024. 04:35Quelle équipe s'est le plus améliorée?
Je sympathise beaucoup avec les collègues de la télévision qui jasent et analysent la situation des diverses organisations de la Ligue nationale pendant des heures, tout en ayant vraiment très peu de choses à se mettre sous la dent. Compétition oblige, ils sont tous en ondes à partir de six heures du matin. Ça frise le ridicule quand on y pense. Des analystes tous très bien rémunénérés sont en ondes au lever du soleil dans le but de mettre la table pour d’interminables heures de blabla qui, dans la majorité des cas, ne mènent nulle part. Il a d’ailleurs fallu attendre huit heures et 45 minutes, à l’intérieur d’une émission de 9 heures, avant que la plus grosse prise de la journée, celle de Mark Stone à Las Vegas, soit confirmée. La journée est coûteuse pour tous les réseaux impliqués, mais il faut ce qu’il faut.
C’était plutôt loufoque de voir la machine médiatique s’énerver quand le Canadien a laissé filer Michael Chaput pour obtenir Jordan Weal, auteur d’une présente saison de quatre buts et dont les principaux faits d’armes se limitent à deux saisons de huit buts chacune avec les Flyers de Philadelphie.
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On s’est empressé d’obtenir une entrevue avec Weal en l’amorçant par l’inévitable question: «Comment te sens-tu à l’idée de te joindre à une organisation comme le Canadien?»
Bien sûr qu’il était excité. Deux équipes, Philadelphie et Arizona, l’avaient laissé tomber au cours des dernières semaines. Son passé n’a rien de très brillant. Disons qu’il était peut-être plus excité par cette nouvelle que le Canadien pouvait l’être lui-même. On se serait attendu à ce que Marc Bergevin ajoute un pion important à son organigramme. Il a plutôt trouvé du matériel pour le Rocket de Laval.
Admettons-le, cette seule transaction de Bergevin ne fera pas la moindre différence dans le dernier droit de la saison. On ne voit pas comment elle pourrait assurer au Canadien une place en séries.
Sa décision de conserver tous ses acquis est logique à première vue. Il s’agit d’une belle marque de confiance envers les joueurs qui ont fait du Canadien ce qu’il est devenu cette saison. Il était inutile de porter le grand coup pour acquérir un joueur d’impact dans un moment où le Canadien n’a aucune chance de remporter la coupe Stanley. Avec un joueur important de plus dans la formation, aurait-il eu la moindre chance d’éliminer le Lightning de Tampa Bay dans une série 4 de 7? Après les acquisitions majeures faites par Nashville, Winnipeg et Las Vegas, aurait-il pu éliminer l’un de ces trois-là? On arrête là. Pour gagner une coupe, il faut pouvoir écarter des rivaux plus gros, plus talentueux et davantage bâtis pour de longues séries.
Le Canadien ne possède pas les outils pour réussir pareil accomplissement cette année. Il n’obtient aucune production de son quatrième trio. Artturi Lehkonen et Joel Armia sont zéros en attaque. Ça fait pas mal de joueurs qui ne produisent pas. De plus, on arrive en mars et l’attaque à cinq est toujours aussi pauvrement ridicule. C’est beaucoup trop de facteurs négatifs au sein d’une équipe qui affiche des ambitions démesurées.
À défaut d’obtenir un élément d’impact, Bergevin a couru un certain risque en n’obtenant pas au moins un joueur d’une grande utilité qui aurait pu assurer la présence de l’équipe en séries et peut-être de lui permettre d’engraisser les coffres de l’organisation d’une dizaine de millions en jouant au moins trois matchs locaux, avec tout ce que cela comporte en vente de gugusses, de coûteux chandails, en plus des revenus de la restauration et du stationnement. Un tel dénouement permet généralement au directeur général de convaincre son propriétaire que les chances de remporter la coupe seront bien meilleures l’an prochain.
Bergevin s’en est tenu à son plan; comment l’en blâmer? S’il a refusé de toucher à son personnel ou d’hypothéquer une partie de ses réserves pour s’installer solidement sur l’échiquier des grandes puissances de la ligue, c’est peut-être aussi parce qu’il était loin d’être convaincu de se rendre très loin en avril. Il ne le dira jamais, mais on peut le penser.
En réagissant de cette façon, il croit avoir couru un risque calculé. Toutefois, quel message a-t-il envoyé à son vestiaire par la même occasion? En principe, les joueurs, qui ne sont pas obligés de nous dire la vérité, semblent croire dur comme fer qu’ils possèdent les atouts pour se battre d’égal à égal avec la concurrence.
Bergevin affirme croire en son groupe. Il aime ce qu’il voit en prenant le pari que ses joueurs continueront de foncer le pied au plancher. Cependant, même s’il affirme que le Canadien devra se battre jusqu’au dernier match du calendrier pour s’assurer d’une présence en séries, il n’a pas jugé bon d’ajouter un élément de plus grande importance que Jordan Weal.
Personnellement, j’apprécie qu’il n’ait pas agi sous pression en prenant une décision que toute l’organisation aurait pu regretter pendant longtemps. On lui reproche de ne pas avoir fait l’impossible pour acquérir Mark Stone. S’il l’avait fait, jamais le Canadien ne lui aurait offert près de 10 millions $ pour huit ans.
Je crois que Bergevin prendra le temps de peaufiner davantage son équipe l’été prochain. Après avoir vu les meilleures formations s’entre-déchirer dans les séries, il saura davantage ce qu’il lui manque pour faire un pas de plus en avant la saison prochaine. Il s’agira encore d’une très grosse commande, mais avec les jeunes espoirs talentueux qui s’amènent, la mission de s’approcher d’une 25e coupe Stanley deviendra plus réaliste.
Le message sera toutefois très difficile à passer dans le public si jamais le Canadien ne dispute pas au moins une série ce printemps.